Une proposition de loi transpartisane pour rétablir la réserve parlementaire
Par Franck Lemarc
C’est en 2017 que la « réserve parlementaire » a été supprimée, dans le cadre de la loi pour la confiance dans la vie politique. Pour mémoire, il s’agissait d’une fraction du budget de l’État, dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales », répartie entre tous les députés et les sénateurs, et que ceux-ci pouvaient utiliser pour soutenir des projets de leur choix. Chaque député disposait ainsi de 130 000 euros par an, et chaque sénateur de 150 000 euros, soit un budget total d’environ 56 millions d’euros par an.
Depuis les années 2000, ce dispositif a été critiqué, car jugé trop peu transparent : il a fallu attendre 2011 pour que les montants alloués par les parlementaires et leur destination soient rendus publics. Mais cela n’a pas suffi : les accusations de « clientélisme » ont finalement conduit les parlementaires à voter, en août 2017, la suppression de ce dispositif. Cette suppression a été très partiellement compensée par la création du FDVA (Fonds de développement de la vie associative) – nettement moins doté – et par une augmentation de la DETR (dotation d’équipement des territoires ruraux). Autant de dispositifs qui, cette fois, n’étaient plus à la main des parlementaires mais à celle des préfets.
Des projets « sous les radars »
Trois députés (respectivement LR, Renaissance et Horizons) ont déposé au début de l’année dernière une proposition de loi pour demander le rétablissement de la réserve parlementaire. Dino Cinieri, Frédéric Descrozaille et André Villiers ont été rejoints par plus de 140 autres députés qui ont accepté de cosigner le texte, donnant à celui-ci un caractère particulièrement transpartisan, de la France insoumise au Rassemblement national.
L’argument principal mis en avant par les « trois mousquetaires » à l’initiative de ce texte, comme ils se baptisent eux-mêmes, est que la suppression de la réserve parlementaire a encore un peu plus coupé les liens entre les parlementaires et le « terrain », après la loi sur le non-cumul des mandats. Par ailleurs, ils estiment que les projets susceptibles d’être soutenus via la réserve parlementaire sont souvent « sous les radars », trop modestes pour attirer l’attention des préfets (on parle en général de quelques milliers d’euros au maximum). D’autant que les porteurs de projets, souvent de petites associations locales ou des petites communes rurales, n’ont « ni l’envie ni les moyens » de constituer un lourd dossier FDVA ou DETR.
Guy Geoffroy, présent hier à la conférence de presse en qualité de vice-président de l’AMF pour apporter le soutien de l’association à cette initiative parlementaire, a évoqué quelques projets qu’il a soutenus lorsqu’il était député : 1 500 euros pour l’association des chiens-guides d’aveugles, ou encore « un petit sou pour aider une interco à acheter des costumes pour la fanfare qu’elle voulait créer ». Le maire de Combs-la-Ville a vivement rejeté le fait que la démarche pût être « clientéliste ». « En tant que président du groupe d’amitié franco-slovène, j’ai aidé grâce à la réserve parlementaire un lycée de Lubiana à acheter quelques ordinateurs… Je ne sache pas que les parents d’élèves de Lubiana aient été électeurs de ma circonscription », a raconté en souriant Guy Geoffroy.
Plutôt qu’une enveloppe « discrétionnaire » que les parlementaires pouvaient distribuer à tort et à travers, la réserve parlementaire était, comme l’a dit une députée intervenue hier, « une subvention de l’État à l’initiative des parlementaires ».
Transparence
C’est bien sous cet angle que la voient les signataires de la proposition de loi. Ils insistent sur la nécessaire « transparence » du dispositif : ils proposent que toutes les informations sur les bénéficiaires soient publiées au Journal officiel, et que ceux-ci « rendent des comptes sur l’avancement du projet avec des indicateurs précis de coûts, de délais, de qualité, d’efficacité et de progression ».
La proposition de loi dispose que la réserve parlementaire serait rétablie uniquement pour financer les projets associatifs et ceux « des communes de moins de 18 000 habitants ». On peut, en passant, s’interroger sur ce seuil, qui ne correspond à aucun des seuils officiels figurant dans le CGCT.
Plusieurs sénateurs ont déjà dit leur soutien à ce texte. Les signataires espèrent qu’il rencontrera un large soutien de leurs collègues, y compris chez ceux qui avaient voté la suppression de la réserve en 2017. D’ailleurs, l’un des auteurs du texte, Frédéric Descrozaille, a très naturellement reconnu hier qu’il avait personnellement voté la fin de la réserve parlementaire. « J’ai changé d’avis », a-t-il déclaré, convaincu que bien d’autres parlementaires le feront également, étant quotidiennement sollicités pour soutenir « des projets à 1 500 ou 2 000 euros ».
Les signataires espèrent pouvoir inscrire leur proposition de loi dans une niche transpartisane, dès cet automne.
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