Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 6 juillet 2021
Plan de relance

Un rapport parlementaire préconise un « pack rebond » pour les territoires touchés par la crise

Une politique d'appui ciblée à destination des territoires les plus en difficulté, en lieu et place des dispositifs de zonage, régulièrement contestés : c'est la principale recommandation du rapport d'une mission parlementaire commanditée par le gouvernement en janvier dernier.

Par Emmanuel Guillemain d'Echon

Un « pack rebond »  déployé dès 2022 et calé sur la nouvelle contractualisation entre État et collectivités, afin de le réviser tous les six ans, à chaque mandat municipal : c’est la principale recommandation du rapport du député des Yvelines Jean-Noël Barrot (MoDem), appuyé par l’Inspection générale des finances.

Début juin, le député, qui s’était attaché à l’étude des bassins les plus fragilisés par la crise, avait dévoilé un premier constat : la crise du covid-19 n’a pas tant touché les zones déjà en déprise que les métropoles et les secteurs touristiques (lire Maire info du 8 juin 2021).

Le rapport complet, publié le 30 juin dernier, apporte plus de détails sur les propositions de la mission pour aider les territoires en déprise. En premier lieu, il s’ajoute à la longue liste de ceux qui critiquent les aides réparties en fonction d’un zonage – rappelons que les zones de revitalisation rurales, le plus ancien de ces dispositifs, ont été prolongées jusqu’à la fin 2022, après de multiples réformes avortées.

Une concentration des aides pour les territoires fragiles

Un « pack rebond », mis en place dès 2022, pourrait venir se substituer progressivement à ces zonages, qui se superposent souvent et sont mal connus des acteurs économiques. Il s’agirait de se greffer sur la nouvelle contractualisation entre l’État et les collectivités, notamment via les contrats de relance et de transition écologique (CRTE), qui sont en cours de signature. Ces packs seraient mis en place pour des territoires spécifiques, en concertation avec les régions, jusqu’à ce qu’ils n’en aient plus besoin.

Le député s’inspire notamment des quatre « pactes territoriaux »  signés en 2018 et 2019 avec des territoires en difficulté (Sambre-Avesnois-Thiérache, Nièvre, Ardennes, Creuse), dont les premiers retours sont positifs. Le « pack rebond »  se déclinerait, selon les besoins exprimés par les « acteurs de terrain », en plusieurs volets : exonérations fiscales ciblées, avec un accès simplifié ; cofinancement d’une etude de gestion previsionnelle des emplois et des competences territoriale (GPECT), qui permet d’identifier les métiers en tension et les besoins en formation ; coordination de la définition d’une stratégie de territoire, qui nécessite des mois de travail et de concertation entre élus, acteurs économiques et société civile – Jean-Noël Barrot, constatant le succès auprès des élus des nouveaux sous-préfets à la relance, suggère de pérenniser des postes, au niveau départemental, de « sous-préfets à l’animation économique ». Il s’agirait aussi de cibler des moyens d’ingénierie technique, des dotations de droit communs et des fonds européens, et d’accorder certaines dérogations au droit du travail pour les jeunes entreprises.

Plus d’ingénierie pour accéder aux appels à projets

S’il plébiscite la « logique de projet »  à celle d’aides zonées, le rapport reconnaît toutefois que celle-ci « présente un risque potentiel de marginalisation pour les territoires les plus fragiles », notamment en ce qui concerne le recours systématique aux appels à projets : « La mission a constaté la crainte récurrente de voir ces financements aller en priorité aux territoires les mieux dotés en ingénierie et, par conséquent, les plus réactifs face aux délais souvent serrés de dépôt des dossiers. »  Ce d’autant que « certains appels à projets ont été saturés en un temps record », comme celui sur le renouvellement des agroéquipements,  « saturé en quelques jours ».

Autre exemple, le fonds friches, « l’un des outils les plus populaires de France relance », plébiscité par les élus puisque, doté de 300 millions d’euros, il a reçu 1 200 dossiers pour 1,6 % de subventions demandées ! Même si, en mai, le Premier ministre a permis le déblocage d’une tranche supplémentaire de 350 millions, les besoins sont clairement supérieurs pour cet outil que le rapport qualifie de véritable « catalyseur de projets de territoire ».

En outre, certains territoires, pénalisés par un déficit d’ingénierie, n’ont même pas pu présenter de projet. Conscient de ce problème, Jean-Noël Barrot appelle à une « gestion déconcentrée des appels à projets », pour permettre aux préfets de relancer une seconde vague ou de réorienter les candidats déçus vers d’autres dispositifs nationaux ou régionaux.

Si le rapport salue la montée en puissance de l’ANCT, il constate que « ces évolutions ne permettent toutefois pas encore de répondre a tous les besoins d’ingénierie des territoires », notamment en ce qui concerne les postes de chef de projet, « qui ont un rôle important car ils ne se limitent pas a des durées courtes et apportent une certaine continuité d’action ». Pourtant, « les collectivités locales sont souvent confrontées a un déficit d’attractivité de certains territoires que ne permet pas de résoudre le co-financement des opérateurs nationaux. » 

Agents publics experts

Constatant, en outre, la réticence de certains élus à faire appel à des cabinets d’étude privés « pas toujours les mieux au fait des enjeux locaux », le rapport suggère de mettre en place un « vivier d’agents publics de haut niveau »  - soit des fonctionnaires expérimentés, incités par des bonus financiers, soit des jeunes diplômés de l’ENA et de son futur avatar, l’Institut national du service public. Ceux-ci pourraient venir abonder les rangs des sous-préfets à l’animation économique que le député appelle de ses vœux. Pour faciliter la mise en rapport de l’offre et de la demande, ce dernier imagine la création d’une plateforme numérique, « ingenierie.gouv.fr ».

Le rapport formule de nombreuses autres propositions, comme l’aide des collectivités à l’accueil des télétravailleurs, ou le déploiement d’une stratégie immobilière pour favoriser la mobilité des travailleurs licenciés.

Lire le rapport.

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