Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 14 février 2020
Télécommunications

New Deal mobile : des députés s'interrogent sur la première échéance du dispositif de couverture ciblée

Sur le papier, ce n’est plus qu’une question de mois : en juin 2020, les habitants de 485 zones blanches, notifiées aux opérateurs par le gouvernement deux ans plus tôt, bénéficieront de la 4G (1 374 sites ont été notifiés au total pour 2018 et 2019). Dans les faits, « le compte n’y est pas et le nombre de pylônes posés ne saurait suffire à une couverture satisfaisante de nombreux territoires », déplore Philippe Vigier. Pour accélérer ce déploiement qu’il qualifie « d’anormal », le député Libertés et territoires d’Eure-et-Loir a déposé une proposition de loi pour permettre aux collectivités volontaires de contribuer au financement des pylônes via « un accord entre, d’une part, l’État, les départements et les régions et, d’autre part, les opérateurs de télécommunication ». Seuls les opérateurs, « loin de se conformer à leurs engagements »  dixit le parlementaire, en en ont l'obligation aujourd’hui. 
Le texte, examiné hier à l’Assemblée nationale, s’est heurté aux réserves de Julien Denormandie, ministre chargé du suivi du « New Deal mobile »  au gouvernement. Il a été rejeté par 49 voix (24 pour). Explications.

« Instaurer une réelle garantie de libre choix par les collectivités » 
L’heure de vérité approche pour le New Deal mobile et Julien Denormandie, qui en est à son origine. Mais Philippe Vigier, suivi par d’autres groupes parlementaires, n’attend pas l’échéance de juin 2020 pour douter de l’efficacité du dispositif de couverture ciblée (environ 12 000 nouveaux sites déployés par les opérateurs d’ici à 2026) : « Nous ne sommes pas sur un faux plat lorsque, sur le territoire national, seuls six sites sont en fonctionnement, contre 485 prévus. Il y a là, me semble-t-il, quelque chose d’anormal », regrette-t-il, en référence aux propos prononcés la veille en commission des affaires économiques par le président de l’Autorité de régulation des télécoms (Arcep) Sébastien Soriano. « 37 pylônes fonctionnent et des travaux sont en cours pour en installer 123 autres », rectifiera quelques instants plus tard Julien Denormandie.
Pour expliquer la lenteur de ces déploiements, le député met directement en cause les opérateurs, qui privilégieraient, selon lui, « les sites ayant leurs préférences, plutôt que ceux spontanément choisis par les élus locaux », pourtant censés avoir le dernier mot. « Les opérateurs ne font pas le boulot », abonde dans son sens François Ruffin, député La France insoumise de la Somme. Ils « pensent davantage business qu’aménagement du territoire », constate aussi Jean-Paul Dufrègne, député PCF de l'Allier.

« Les équipes projets locales font l’objet de pressions » 
D'autres députés, à l'instar de Laure de la Raudière (Eure-et-Loir, MoDem), pointe le nombre trop peu élevé de dotations par département ainsi que le « manque de visibilité concernant les intentions de couverture en propre des opérateurs ». « Aussi, il paraît indispensable d’instaurer une réelle garantie de libre choix par les collectivités des zones qu’elles souhaitent voir desservies », gronde Philippe Vigier.
Sylvia Pinel, sa collègue du Tarn-et-Garonne (Parti radical de gauche), embraye : « Alors que le New Deal mobile prévoyait une concertation entre élus locaux et opérateurs afin de déterminer la localisation des sites, les équipes projets locales font parfois l’objet de pressions visant à leur imposer la localisation du site mobile. Ainsi, un pylône peut être à la fois destiné à permettre la couverture des axes de transport et à répondre au dispositif ciblé, au détriment parfois de la qualité de la couverture de la zone. Face à ces pratiques, les élus locaux [qui ne peuvent se reposer sur une carte fiable de la couverture pour contester les localisations proposées par les opérateurs] sont démunis ». 

Un état des lieux de la consultation des maires publié en février
« Nous avons une divergence d’appréciation sur le financement : j’estime qu’il est fondamentalement bon que celui-ci revienne aux opérateurs et non aux collectivités. Par ailleurs, rien n’empêche une collectivité de participer au financement », leur répond Julien Denormandie, toujours convaincu que « les quatre mois et demi qui nous restent permettront de mener à bien [les 485 sites] ». Le ministre a également proposé que ses équipes « transmettent à la représentation nationale, avant la fin du mois de février, un état des lieux de la consultation des maires concernés par les 485 sites. Si des maires n’ont pas été consultés, au moins nous le saurons et les équipes projets correspondantes les consulteront ».
Christine Hennion, députée La République en marche des Hauts-de-Seine, ne dit pas autre chose quant à la participation des collectivités au financement. Elle « remettrait en cause l’esprit du New Deal, dans le cadre duquel les opérateurs se sont engagés à financer les sites en échange de la prolongation des licences. Les communes, par l’intermédiaire de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, se prononcent d’ailleurs contre cette disposition, qui augmenterait de fait leurs charges. » 
Pour rappel, Julien Denormandie a fixé trois principaux objectifs avec le New Deal mobile  : la généralisation des accès à la 4G sur l’ensemble du réseau d’ici fin 2020 (depuis le mois de janvier 2018, 5 111 sites sont passés des anciennes technologies à la 4G) ; l’amélioration de la couverture sur les axes de transport et à l’intérieur des bâtiments ; la garantie d’un accès de qualité au réseau dans des zones ciblées.

Ludovic Galtier

Accéder au compte-rendu des débats.

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