Véhicules électriques : comment Jean-Baptiste Djebbari veut « dynamiser » le déploiement des bornes de recharge
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Pour atteindre l’objectif de 100 000 bornes de recharge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables fin 2021, les autorités organisatrices de la mobilité pourront élaborer un « schéma directeur » pour structurer le déploiement de ces bornes. Le gouvernement a édité un guide à ce sujet à l’attention des collectivités. Quel sera exactement leur rôle ?
Pour l’élaboration des schémas, la collectivité territoriale ou l’établissement public associera à la concertation les acteurs publics ou privés qui sont aménageurs d’infrastructures de recharge ouvertes au public, de même que les aménageurs de nouvelles infrastructures de recharge. Les gestionnaires du réseau public de distribution d’électricité seront également mobilisés. Il est possible, et c’est objectivement préférable, que les schémas directeurs soient réalisés à une maille territoriale la plus grande possible.
Comment cela va précisément se mettre en musique ?
En premier lieu, les travaux doivent s’appuyer sur une analyse fine de la situation actuelle incluant un état des lieux de la mobilité électrique et de l’utilisation des infrastructures de recharge ouvertes au public existantes. Ainsi pour faciliter l’élaboration de ces diagnostics, nous avons pris un décret pour permettre la récupération des données des aménageurs d’infrastructures de recharge. Associée à une vision prospective de la mobilité électrique, ces éléments vont ainsi servir de base à l’élaboration des besoins d’infrastructures de recharge sur chaque territoire, tant pour les usages locaux que pour les usages en transit.
Justement, les collectivités doivent définir leurs priorités « afin de parvenir à une offre de recharge suffisante pour satisfaire le trafic local et le trafic de transit ». A partir de quels indicateurs cette offre sera-t-elle considérée suffisante ?
L’offre doit naturellement prendre en compte les éléments prospectifs de la mobilité électrique du territoire, c’est-à-dire les flux potentiels de véhicules électriques à court et moyen termes. Plus que des indicateurs, il s’agit de fixer des objectifs car les actions définies dans les schémas directeurs font l’objet à moyen terme d’une évaluation. Au regard de cette évaluation et de l’actualisation du diagnostic, le schéma directeur sera mis à jour en définissant de nouvelles échéances de moyen et de long terme.
« Un coup de boost aux aides pour les nouveaux déploiements »
Les textes d’application de la LOM sur les infrastructures de recharge de véhicules électriques imposent des travaux sur l’espace public à ce point coûteux et dans des délais intenables qu’ils peuvent décourager les élus de déployer des bornes. Le dépassement de ces freins n’est-il pas un prérequis indispensable à l’atteinte de objectifs fixés par le gouvernement ?
Nous avons conscience des freins au déploiement des infrastructures de recharge. C’est pourquoi nous avons pris récemment de nouveaux textes d’application de la loi d’orientation des mobilités (Lom) afin de simplifier le cadre réglementaire et de dynamiser le déploiement des bornes. Ces modifications étaient, à juste raison, demandées par les acteurs de l’écosystème de la recharge pour justement faciliter les solutions de déploiement.
Nous avons également mis en place un accompagnement financier renforcé depuis fin 2020 via le Programme Advenir en permettant à la fois la prise en charge du retrofit des points de charge « obsolètes », et également en mettant un coup de boost aux aides pour les nouveaux déploiements, qui s’élève à 60 % du coût des installations. Les aides à l’installation de bornes ouvertes au public auparavant inférieures à 2000 euros par point de charge s’échelonnent maintenant de 2000 à 9000 euros en fonction de la puissance de la borne. Les stations et hubs de recharge rapides sont également éligibles avec des aides comprises entre 100 000 et 240 000 euros par station.
Une prise en charge du coût de raccordement prolongée jusqu’en 2025
A quel niveau l’Etat va-t-il prendre en charge le coût de raccordement par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE) ?
La loi d’orientation des mobilités et l’arrêté du 12 mai 2020 prévoyaient jusqu’à fin 2021 une prise en charge « majorée » à 75 % par le TURPE pour le raccordement des infrastructures de recharge ouvertes au public, dès lors que la puissance du raccordement est inférieure ou égale à 250 kVA. Le gouvernement a souhaité que cette mesure soit prolongée jusque fin 2025 pour les raccordements des infrastructures de recharge ouvertes au public qui s'inscrivent dans un schéma directeur. Il s’agit là d’un avantage financier important pour tous les futurs déploiements concernés
Comptez-vous revenir sur le régime de sanction pour l’interopérabilité des bornes ?
L’expérience client dans la recharge est primordiale dans le passage à la mobilité électrique, en particulier la faculté de pouvoir se recharger sur toutes les bornes de façon simple est une attente forte des usagers des véhicules électriques. Ainsi, la capacité de pouvoir disposer d’une cession de recharge payable à l’acte, sans nécessité de disposer d’un badge ou d’un abonnement, reste le minimum obligatoire imposé par l’Etat. L’interopérabilité est une priorité dans le déploiement des bornes.
Quid des moyens supplémentaires que l'État compte mettre en œuvre pour parvenir à déployer 70 000 points de recharge publics supplémentaires ?
J’ai déjà cité les moyens financiers conséquents mobilisés, ainsi que la simplification de quelques contraintes de configuration sur les stations de recharge. Ce renforcement des aides avec une enveloppe de 100 M€ porte déjà ses fruits : il s’est déployé plus de points de recharge sur les 3 premiers mois de 2021 que sur toute l’année 2020. Mais le déploiement doit encore s’accélérer.
De nombreuses enseignes de la distribution, des énergéticiens ainsi que la fédération des autorités concédantes des réseaux d’électricité se sont engagés à poursuivre et à accélérer leurs déploiements d’ici fin 2021, avec le déploiement de plus de 30 000 bornes.
J’invite donc l’ensemble des élus à se saisir des aides mises en place par l’Etat et, à l’occasion de l’élaboration de ces schémas directeurs, à prévoir des déploiements ambitieux et à la hauteur des besoins de demain pour la mobilité électrique.
ZFE : le transfert de compétences au niveau de l’EPCI confirmé
De nombreux maires envisagent d’instaurer des Zones à faible émission (ZFE) mais les dispositions de la loi Climat imposent un transfert obligatoire de cette compétence. Pensez-vous faire évoluer cette injonction pour favoriser l’élaboration des ZFE par les maires ?
Pour mettre en place une ZFE-m il faut disposer du pouvoir de police de la circulation. Actuellement la configuration fait que ce sont principalement les maires qui seuls ont ce pouvoir. Outre la simplification du dispositif par cette mesure, il faut souligner que le transfert de la compétence ZFE-m au niveau du président de l’EPCI permet d'assurer la cohérence des restrictions envisagées au niveau de l'agglomération, que ce soit par exemple pour le périmètre géographique, en particulier pour éviter des périmètres « à trous » comme cela peut être le cas actuellement en Île-de-France, les véhicules concernés, les horaires, ou encore la délivrance des dérogations individuelles (qui sinon supposent d'obtenir une dérogation de la part de chaque maire concerné pour pouvoir circuler dans l'agglomération). Les restrictions des ZFE-m doivent être lisibles et aisément compréhensibles pour pouvoir être acceptables par la population.
La crise sanitaire et le report des élections municipales ont rendu complexe la prise de compétence mobilité par les communautés de communes. Pour celles qui n’aurait pas eu l’occasion de délibérer à temps, envisagez-vous une tolérance pour qu’elles puissent se saisir de cette compétence dans des conditions plus souples que celles prévues par la Lom ?
L'ouverture de la compétence mobilités aux communautés de communes était en effet une des mesures clefs de la Lom. L'objectif est que, au 1er juillet 2021, 100% du territoire soit couvert par une autorité organisatrice de la mobilité qui développera ensuite une offre de mobilité adaptée. C'est donc la fin des zones blanches !
Nous avions décalé le calendrier initialement prévu par la loi pour intégrer le report de 3 mois du second tour des élections municipales. Les communautés de communes avaient ainsi jusqu'au 31 mars 2021 pour signaler leur intérêt et les communes membres ont jusqu'au 30 juin au plus tard pour confirmer ce choix.
Nous pouvons néanmoins d'ores et déjà tirer un bilan encourageant de cette prise de compétence ! Certes, les résultats sont disparates en fonction des régions. Néanmoins, là où seulement 5 % des communautés de communes avaient pris la compétence en 2019, nous sommes aujourd'hui à plus de 50 % de volontaires. Nous avons notamment de très bons taux en Normandie, Grand Est, Pays de Loire (plus de 90 %) et Bourogne-Franche-Comté (plus de 75 %).
Notre souhait est maintenant d’accompagner toutes ces communautés de communes dans cette prise de compétence et le déploiement de nouveaux services de mobilités. Les régions, qui deviennent AOM quand les communautés de communes n'ont pas pris la compétence, doivent aussi jouer pleinement leur rôle. Il conviendra de procéder à un retour d’expérience avant de statuer sur l’opportunité de nouvelles étapes.
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