Transports : 8,6 milliards et une proposition de loi pour les régionsÂ
Par Franck Lemarc
Il était prévu que l’enveloppe globale allouée par l’État aux régions pour financer les grands projets de transports soit validée mercredi dernier, 7 juin, en Conseil des ministres. Le sujet était très officiellement porté à l’ordre du jour du Conseil, diffusé la veille par l’Élysée. Mais pour une raison inconnue, le sujet n’a finalement pas été discuté, ou du moins on en trouve aucune trace dans le compte-rendu publié le lendemain, pas plus que dans le compte-rendu oral fait par le porte-parole du gouvernement.
Il faut espérer que ce contretemps ne remettra pas en question les décisions annoncées quelques jours auparavant dans la presse régionale, à savoir une enveloppe de 8,6 milliards d’euros pour le volet mobilités des CPER.
8,6 milliards d’euros
Rappelons qu’alors que les contrats de plan État-régions ont été signés en 2022 pour la période 2021-2027, le volet « mobilités » a été « sorti » de la négociation globale pour être discuté à part. Pour ce volet, il fallait attendre les arbitrages gouvernementaux, pour que les préfets puissent négocier en connaissance de cause – l’idée étant que tous les contrats soient signés en septembre prochain.
Clément Beaune, ministre chargé des Transports, explique que le financement des CPER mobilités est « la première brique » du plan d’investissement de 100 milliards d’euros pour les transports annoncé par le gouvernement en février dernier (lire Maire info du 27 février).
Le gouvernement, annonce le ministre, a arbitré : les régions disposeront pour la période 2023-2027 de 8,6 milliards d’euros, soit « 50 % de plus par an que lors des CPER précédents ». 70 % de cette enveloppe « iront aux infrastructures ferroviaires et aux transports publics ».
RER métropolitains : une proposition de loi
Environ 10 % de cette enveloppe sera consacrée aux nouveaux RER métropolitains, désormais baptisés Serm (services express régionaux métropolitains) : 800 millions d’euros seront consacrés à la phase d’études.
Pour soutenir ce projet, une importante proposition de loi est discutée aujourd’hui, en première lecture, à l’Assemblée nationale, avec pour objectif « d’accélérer le déploiement des Serm ». Avec un idée phare : transposer dans les régions le dispositif qui a été mis en place en Île-de-France pour la construction du gigantesque réseau Grand Paris express. L’établissement public chargé de la maitrise d’ouvrage de ce réseau, la Société du Grand Paris (SGP), serait autorisée à participer à la maîtrise d’ouvrage des Serm. En effet, est-il expliqué dans l’exposé des motifs de la proposition de loi, « L’expérience et l’expertise acquises par la SGP lors des travaux du Grand Paris Express constituent un véritable « bien public » qui mérite d’être valorisé au service de la France et de ses territoires, dans les collectivités qui le souhaitent ».
Le texte prévoit en outre un certain nombre de mesures de simplification et d’accélération des procédures : l’article 5 « permet de recourir à la procédure d’expropriation d’extrême urgence pour la réalisation de travaux de construction d’infrastructures nécessaires à la mise en œuvre des services express régionaux métropolitains » ; l’article 5 bis « étend aux projets de Serm le droit de bénéficier de la procédure intégrée prévue par l’article L. 300-6-1 du Code de l’urbanisme, dans le but d’accélérer et de simplifier les procédures de mise en compatibilité des documents d’urbanisme nécessitées par les projets de services express régionaux métropolitains ».
Compétence mobilités des communautés de communes, le retour
Les élus porteront une attention toute particulière à l’examen du nouvel article 5 ter de ce texte, adopté en commission, qui entrouvre la porte sur une revendication portée de longue date par l’AMF. Ce nouvel article imposerait au gouvernement, s’il était adopté, la remise d’un rapport avant la fin de l’année tirant, d’une part, le bilan de la prise de compétence d’autorité organisatrice de la mobilité par les communautés de communes prévu par la LOM. Mais surtout, d’autre part, le rapport devrait évaluer « l’opportunité d’ouvrir à nouveau temporairement la possibilité pour les communautés de communes de se saisir de cette compétence ». Les députés – à la différence du gouvernement, jusqu’à maintenant du moins – semblent conscients que la date limite fixée aux communautés de communes pour transférer, ou non, la nouvelle compétence mobilités aux régions a été trop courte, surtout en période de pandémie, pour que le choix ait été fait de façon totalement éclairé.
Reste à savoir quel accueil le gouvernement fera à cette proposition.
Régions de France clairement déçue
L’association Régions de France a accueilli les annonces faites par Clément Beaune avec un enthousiasme modéré. Si les régions considèrent que ce premier volet constitue « une étape », elle le jugent néanmoins « encore insuffisant ». « Les régions attendent de l’Etat une mobilisation beaucoup plus puissante, non seulement sur les études mais également sur les travaux dans les infrastructures, pour espérer produire un ‘’choc d’offres’’ en faveur du train et des mobilités décarbonées », déclare Carole Delga, présidente de Régions de France. L’association estime que « l’amplification attendue des investissements de l’État n’est pas au rendez-vous », en rappelant que le COI (Comité d’orientations des infrastructures) demandait à l’État un effort de 30 milliards d’euros d’ici à 2027. Les 8,6 milliards promis sont donc loin du compte, ce qui obligera préfets et présidents de région à arbitrer entre des projets « pourtant nécessaires ».
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