Plan d'avenir pour les transports : le gouvernement met 100 milliards sur la table pour le ferroviaire
Par Franck Lemarc
« Des mouvements radicaux sont nécessaires, des décisions fortes sont à prendre. » Dans le discours qu’elle a prononcé en recevant le rapport du Comité d’orientation des infrastructures (COI), Élisabeth Borne a voulu afficher son volontarisme. Les moyens vont avec : la Première ministre a annoncé une enveloppe de 100 milliards d’euros pour « une nouvelle donne ferroviaire » , d’ici à 2040.
Contrats de plan
Rappelons que le COI avait été sollicité en octobre dernier par le ministre chargé des Transports, Clément Beaune, pour réfléchir à des « scénarios d’actualisation de la programmation des investissements de l’État dans le secteur des transports ». Ce rapport était particulièrement attendu, dans la mesure où les arbitrages auxquels il aboutira vont déterminer le contenu du volet mobilités des Contrats de plan État-régions (CPER). En effet, si les CPER ont été signés pour la période 2021-2027, le volet mobilités a été traité à part, et ne sera signé – au mieux – que l’été prochain. Pour savoir sur quelle base financière les préfets vont négocier, il fallait attendre, d’abord, la publication du rapport du COI, puis les arbitrages du gouvernement. C’est chose faite.
Les conclusions du COI ont été dévoilées mi-janvier. L’élément le plus marquant de ce rapport est que les experts ont purement et simplement rejeté le cadrage financier établi par le gouvernement, estimant que les moyens prévus étaient clairement en-deçà des nécessités pour mener à bien la transition écologique. Le COI a proposé deux scénarios, respectivement baptisé « Planification écologique » et « Priorité aux infrastructures » , tous deux appuyés sur des enveloppes financières très largement supérieures à ce que le gouvernement avait prévu.
Scénario intermédiaire
L’exécutif a tranché : le scénario choisi sera « Planification écologique ». C’est le moins coûteux des deux scénarios du COI, mais il représente néanmoins un investissement bien plus important que prévu. Ce scénario servira de base aux échanges avec les collectivités, a expliqué la Première ministre, échanges qui sont « une impérieuse nécessité pour que chaque euro dépensé ait la plus grande efficacité ». « Ce sont bien les collectivités qui ont en main les outils nécessaires pour que nos investissements améliorent concrètement le quotidien de nos concitoyens », a martelé Élisabeth Borne.
Les 100 milliards d’euros mis sur la table vont servir deux objectifs prioritaires : l’amélioration du réseau existant et le développement d’infrastructures nouvelles. « Au-delà de la poursuite des projets de lignes nouvelles engagés » , a poursuivi la Première ministre, ce développement passera par le déploiement des fameux « RER métropolitains » annoncés en novembre dernier par le chef de l’État (lire Maire info du 28 novembre 2022).
RER métropolitains et petites lignes
Ces « RER métropolitains » - c’est-à-dire des lignes de trains dédiées aux agglomérations denses, sur le modèle du RER d’Île-de-France – doivent permettre de « mieux desservir les bassins de vie, [d’offrir] à nos concitoyens un transport en commun régulier, facilement accessible et fiable ». La Première ministre a annoncé que l’expertise de la Société du Grand Paris (SGP), qui gère le pharaonique projet du Grand Paris Express, sera sollicitée et « mise au service des régions ». Dès le mois de mars, la SGP et la SNCF « entameront des discussions avec les exécutifs locaux pour déterminer le calendrier, les modalités opérationnelles et de financement pour les nouveaux projets de RER métropolitains » . Ce qui nécessitera de changer la loi pour élargir les missions de la SGP.
Élisabeth Borne n’a pas voulu oublier les « petites lignes », car la stratégie du gouvernement « doit bénéficier à tous les Français, où qu’ils vivent, des petites communes jusqu’aux grandes métropoles » . Le plan du gouvernement va donc comporter un volet « renouveau des petites lignes » – sans donner plus de précisions.
Elle a également indiqué que le fret ne serait pas oublié. Le réseau routier non plus : les automobilistes « ne seront ni pénalisés ni oubliés » et les investissements pour « entretenir et moderniser notre réseau routier national » seront « renforcés ». Néanmoins, « chaque projet d’extension du réseau routier » sera « réinterrogé » , comme l’a d’ailleurs suggéré le COI.
Élisabeth Borne a enfin confirmé que le gouvernement est favorable au « billet unique » interopérable entre les différents réseaux de transports urbains, et annoncé que les financements du Plan vélo seraient « maintenus » dans les prochaines années.
Associer les maires
Plusieurs associations d’élus ont réagi à ces annonces. Il faut rappeler que ce « grand plan » répond à l’une des demandes de l’AMF, en particulier, dont la commission Mobilités avait, l’an dernier, émis un certain nombre de recommandations. Parmi celles-ci, la proposition d’un « grand plan national de l’État consacré aux infrastructures ferroviaires, établi en lien avec les élus locaux » , permettant de « redéfinir les besoins ferroviaires globaux afin de ne pas déséquilibrer le territoire » . Si l’on s’en tient aux annonces de la Première ministre, ces demandes sont satisfaites en tous points.
L’association Régions de France, concernée au premier chef par ces annonces, et dont les élus vont avoir la charge de négocier le volet mobilité des CPER avec l’État, n’a pas publié de communiqué de presse, mais un simple tweet pour « saluer » les annonces de la Première ministre et l’effort « inédit » annoncé pour le ferroviaire. L’association rappelle qu’en octobre dernier, elle a appelé, dans une tribune de presse, à « un New deal ferroviaire » , qu’elle chiffrait précisément à 100 milliards d’euros.
L’Association des petites villes de France, enfin, accueille « avec satisfaction » les annonces de la Première ministre mais appelle à ce que « personne ne reste à quai » . Elle juge que l’horizon 2040 est « trop éloigné » , et demande surtout que les RER métropolitains « bénéficient concrètement aux habitants des zones périurbaines » . Pour cela, l’APVF souhaite que les maires ne soient pas tenus à l’écart des négociations dans le cadre du CPER-Mobilité, et que celles-ci ne se déroulent pas exclusivement entre l’État et les régions.
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