Mobilité et transports : l'AMF fait « 25 propositions » au gouvernement
Par Franck Lemarc et Bénédicte Rallu
La crise énergétique occulte un peu, ces jours-ci, tous les autres problèmes. Pourtant, la question des transports et de la mobilité reste une préoccupation essentielle des citoyens, que ce soit en territoire rural ou dans les agglomérations.
La question de la compétence mobilité
Les deux coprésidents de la commission transports, mobilité et voirie de l’AMF ont donc présenté hier les propositions de la commission « pour répondre aux enjeux des transitions climatique, énergétique, économique et sociale auxquels sont aujourd’hui confrontés les collectivités et leurs habitants en matière de transports et de mobilités ».
Frédéric Cuillerier, maire de Saint-Ay (Loiret) et Sylvain Laval, maire de Saint-Martin-le-Vinoux (Isère), ont abordé des sujets aussi divers que la compétence mobilité, le ferroviaire, les ZFE (zones à faibles émissions) ou la mobilité électrique. Sur tous ces sujets, l’AMF fait des propositions concrètes, présentées dans une plaquette diffusée hier.
La question de la compétence mobilité est bien évidemment l’une des plus prégnantes. En théorie, le débat est aujourd’hui clos, puisque la date butoir du 31 mars 2021 avait été fixée pour que les communautés de communes fassent le choix de conserver, ou pas, cette compétence. Lorsque les communautés de communes ont fait le choix de ne pas garder la compétence, celle-ci est revenue automatiquement aux régions.
Comme l’ont montré plusieurs enquêtes (lire Maire info du 6 mai 2022), la situation est très inégale d’une région à l’autre. Très schématiquement, le pays est divisé entre le nord, où les communautés de communes ont majoritairement fait le choix de conserver la compétence, et le sud, ou ce sont plutôt les régions qui l’exercent. Avec, rappelle l’AMF, une attitude des régions qui a pu « viser à dissuader les communautés de communes de prendre la compétence ».
L’association relève que certaines communautés « regrettent » aujourd’hui leur choix. C’est pourquoi l’AMF demande – comme du reste le fait Intercommunalités de France – la réouverture d’une période permettant aux communautés de communes de revenir sur leur choix. « L’enjeu est de permettre aux territoires de se rendre compétents lorsqu’ils le souhaitent, à leur rythme et selon leurs besoins, à la carte. »
Autre point important : l’AMF souhaite une « simplification et une clarification » de la répartition des compétences mobilité. Il existe en effet des territoires « dans lesquels la région assure un service qui vient se superposer aux services déjà existants ». Comme l’a expliqué hier Sylvain Laval, « cette superposition des AOM dans un même territoire, c’est l’angle mort de la loi d’orientation des mobilités. C’est illisible pour l’usager. » Pour éviter ces « chevauchements », l’association demande que soit créée « une instance de dialogue, un collège des mobilités entre régions, départements, bloc communal », a poursuivi Frédéric Cuillerier.
ZAN contre pistes cyclables
Sur la question des mobilités « douces », l’AMF demande la mise en place d’un « grand plan national » pour rattraper le retard de la France dans ce domaine : « Les 250 millions d’euros du plan de la Première ministre sont très importants, c’est un début ; a expliqué hier Frédéric Cuillerier. Ils s’ajoutent à celui d’Édouard Philippe qui se déroule jusqu’en 2023. Mais il y a un effort très sensible à faire. Les communautés de communes se sont engagées. Mais nous avons besoin du soutien de l’État. »
Les deux maires ont également souligné le télescopage entre les objectifs du ZAN (zéro artificialisation nette) et la volonté des élus de bâtir des pistes cyclables et/ou piétonnes. « Ces pistes, étant artificialisées, comptent dans le bilan de l’artificialisation brute et ne font pas l’objet de déduction dans le décompte des sols artificialisés. » L’AMF demande donc que les liaisons douces soient sorties du calcul de l’objectif ZAN.
En matière de mobilités électriques et de verdissement des flottes de véhicules municipaux, les deux élus ont souligné que les obligations portées par l’ordonnance du 17 novembre 2021, qui impose des quotas aux collectivités dans le renouvellement de leur flotte, se heurtent à des difficultés techniques réelles et à des coûts aujourd’hui exorbitants. Comme l’a rappelé Sylvain Laval, « les chasse-neige électriques, cela n’existe pas. Il y a un enjeu de progressivité : nous ne pouvons pas tout changer du jour au lendemain. Il nous faut du temps, de la souplesse et des financements. »
Zones à faibles émissions
Les deux maires ont également abordé la question des zones à faibles émissions (ZFE), dont l’extension est prévue dans une trentaine d’agglomérations d’ici à 2024. L’AMF souligne que ces ZFE posent plusieurs problèmes, notamment de « fracture territoriale » entre les zones urbaines soumises à cette réglementation zones périurbaines qui ne le sont pas ; et encore plus de « fracture sociale », car les ZFE, qui interdisent les véhicules les plus polluants, « frappent les plus fragiles », a rappelé Sylvain Laval. Ce dernier n’a pas mâché ses mots, hier, sur l’attitude du gouvernement en la matière : Les ZFE, « les collectivités ne les ont pas demandées. Et maintenant, l’État nous dit : ‘’Débrouillez-vous pour les appliquer’’. L’État ne pas poser un cadre puis s’en laver les mains dans son application. Nous demandons des moyens. »
L’AMF a adressé ces propositions au gouvernement et espère maintenant que celui-ci va s’en emparer et les « concrétiser », « pour répondre aux enjeux auxquels les collectivités territoriales et leurs habitants sont directement confrontés ».
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