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Édition du vendredi 14 juin 2024
Transition écologique

Bornes de recharge électrique : des disparités territoriales persistent, selon l'Autorité de la concurrence

Dans un avis publié mardi dernier, l'Autorité de la concurrence plaide pour que le marché des bornes de recharge électrique pour les véhicules améliore sa transparence tarifaire. Elle insiste également sur l'importance de développer des infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE) de façon « cohérente et équilibrée » dans tous les territoires.

Par Lucile Bonnin

L’Autorité de la concurrence s’est saisie d’office pour avis le 16 février 2023 afin d’analyser le fonctionnement concurrentiel du secteur des infrastructures de recharge pour véhicules électriques. Mardi, le gendarme de la concurrence a rendu son avis, formulant une série de recommandations à destination des acteurs du secteur dont font partie les collectivités locales. 

Carence dans les zones rurales et périurbaines 

L’institution dresse d’abord un état des lieux du déploiement des infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE). Sans surprise, des disparités territoriales existent et elles sont de plusieurs natures.

D’abord, « la recharge normale se distingue de la recharge rapide et très rapide »  et « les points de recharge déployés sont ainsi de différentes puissances, selon leur lieu d’implantation. »  L’institution pointe que le déploiement de bornes de différentes puissances donne lieu à des disparités géographiques. Le département du Nord par exemple possède beaucoup plus de points de charge rapide (plus de 553) que son voisin des Ardennes. Ces disparités « engendrent une inégalité d’accès aux IRVE, limitent la confiance des utilisateurs et obèrent la transition vers une mobilité durable », alerte l’Autorité.

Il est aussi indiqué dans cet avis qu’il « existe une difficulté à parvenir à un maillage équilibré et adapté aux besoins réels des utilisateurs. »  Selon l’Autorité, « en dépit d’une action volontariste des pouvoirs publics matérialisée notamment par la multiplication des dispositifs d’aides publiques pour l’implantation des IRVE, les zones rurales et périurbaines pâtissent de la faiblesse, voire de la carence de l’initiative privée. »  De l’autre côté, « les zones, généralement urbaines, les plus dotées en IRVE sont aussi celles où existe le parc de véhicules électriques le plus fourni. » 

Face à ces constats, l’Autorité propose « une amélioration du diagnostic, passant notamment par la complétude de la base de données publiques, afin de permettre une identification plus fine des zones carencées en bornes de recharge et un recentrage des aides publiques sur le déploiement des IRVE dans les zones les plus déficitaires. » 

Enfin, « la persistance de zones à très faible densité en matière d’IRVE étant assimilable à une défaillance du marché », L’Autorité invite ainsi les opérateurs de recharge (« OdR » ), qui installent et exploitent les IRVE (comme Electra, Tesla ou Ionity) à réfléchir « à une mutualisation de leurs investissements pour équiper en IRVE des zones à très faible densité » , un peu sur le modèle « des solutions mises en œuvre pour assurer le déploiement de la fibre optique en dehors des zones très denses ».

60 % des bornes ont été financées par des collectivités

Dans son avis, l’Autorité de la concurrence reconnaît le rôle de premier plan joué par les collectivités territoriales dans le déploiement des IRVE, notamment pour les personnes ne disposant pas de borne à domicile. Elle rappelle qu’en 2021, « 60 % des bornes accessibles au public ont été financées par des collectivités territoriales ou des établissements publics »  (source : UFC-Que Choisir). 

En la matière, le gendarme de la concurrence considère que la mise en place des schémas directeurs pour les IRVE devrait être obligatoire et que la phase de diagnostic de ces derniers devrait être renforcée. Pour rappel, un guide qui vise à apporter aux acteurs publics locaux toutes les clefs pour mettre en œuvre ces schémas directeurs est consultable en ligne. 

Concernant la gestion de ces infrastructures, les collectivités choisissent en général soir « d’assurer elles-mêmes la gestion des IRVE »  soit « de confier l’exploitation de cette activité sur leur territoire à un ou plusieurs OdR » . Sur ce point, l’Autorité considère que « les collectivités devraient veiller à susciter une animation concurrentielle au niveau local, de façon à privilégier la présence de plusieurs OdR. »  Dans ce contexte, elle invite les collectivités territoriales à « étudier systématiquement les impacts concurrentiels associés au choix du mode de gestion ».

Amélioration de la transparence tarifaire

Plus largement, l’avis rendu par l’institution met en cause « une expérience de recharge [qui] demeure complexe »  et une « tarification opaque » . Le prix de la recharge diffère en effet avec ou sans abonnement et selon les opérateurs, et les paramètres du prix de la recharge peuvent également varier (à la minute, au kilowattheure, éventuels frais). D’autres variables de prix peuvent même intervenir (puissance de la borne, caractéristiques du véhicule).

Pour mettre fin à ce casse-tête, l’Autorité recommande « d'imposer »  aux opérateurs « une tarification de la recharge au kWh (kilowattheure) »  et la transmission de la « mise à jour en temps réel, par point de recharge »  de ces tarifs dans la base de données gouvernementale actuelle. « L'information du consommateur prime aujourd'hui, dans ce secteur émergent », insiste l’Autorité. 

Selon le gouvernement, la France compte actuellement près de 14 500 bornes haute puissance dont 7 000 en ultra haute puissance (supérieure à 150 kW). L’objectif est d’atteindre 400 000 points de recharge ouverts au public d'ici à 2030.
 

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