Budget 2026 : inquiétude autour des « importantes incertitudes » qui entourent les dépenses climatiques
Par A.W.
Fonds Vert, Fonds Barnier, Agences de l’eau… Dans une étude publiée vendredi, l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE) s’inquiète de la menace, dans un contexte budgétaire très contraint, qui pèse sur les dépenses publiques consacrées à l’adaptation de la France au changement climatique. Alors même que les conséquences du réchauffement planétaire seront très importantes pour des secteurs allant de l’agriculture aux catastrophes naturelles en passant par le logement.
Dans ce rapport intitulé Adapter la France à + 4°C : moyens, besoins, financements, l’institut indépendant de recherche s'est ainsi intéressé aux moyens alloués à la « réduction des vulnérabilités », la « gestion des crises » et la « prise en charge des dommages » en lien avec le changement climatique.
Montée en charge entre 2020 et 2024
Chiffrant à 1,7 milliard d’euros les dépenses explicitement consacrées à l'adaptation climatique en 2025, les auteurs de ce rapport évaluent, en fait, à « plusieurs dizaines de milliards d’euros » les dépenses qui, « sans être explicitement dédiées, contribuent significativement à l’adaptation ».
Ils se félicitent d’abord du fait que « la période 2020-2024 a constitué un réel moment de montée en charge du sujet », en termes d’efforts financiers publics. « Parmi ces moyens, on peut notamment citer la création du Fonds vert (2022), les moyens supplémentaires pour la mise en œuvre du Plan Eau pour les Agences de l’eau (2023), la hausse du Fonds Barnier (2025), les moyens dédiés à la planification écologique de la forêt et de l’agriculture (à partir de 2020), les pactes capacitaires de la sécurité civile (2023), ou encore l’ensemble des offres de prêt et d’ingénierie publiques (à partir de 2020) ».
Pour preuve, « il y a encore cinq ans, il aurait été extrêmement difficile voire impossible de dresser un inventaire consolidé des moyens dédiés à l’adaptation car très peu de dispositifs identifiaient explicitement cet objectif », souligne l’I4CE, en reconnaissant que « la dynamique d’adaptation est à présent bien lancée dans tous les domaines d’action publique impactés par le changement climatique ».
Bien que la situation reste « plus contrastée pour les moyens humains des opérateurs », l’institut ne relève ainsi « plus d’angle mort évident, même si les montants ou le périmètre couvert peuvent rester très limités à ce stade dans certains domaines comme la santé ».
Fragilisation et remises en cause
Pourtant, les auteurs de l’étude alertent sur la tournure que prennent les événements avec une année 2025 qui « laisse entrevoir des premiers signaux d’alerte ». « La période plus récente – marquée par la contrainte budgétaire – fait peser d'importantes incertitudes sur la suite de la dynamique », estiment-ils, prévenant que si « certaines avancées semblent bien acquises, d'autres en revanche pourraient être remises en cause ».
De fait, les montants accordés aux missions dédiées à l’adaptation climatique marquent « la fin de la montée en charge observée ces dernières années ». Pour eux, « cela tient d’une part à la fin d’un cycle de politiques d’aides à l’investissement sans que les relais ne soient prévus », comme la fin du Plan Avenir montagnes ou des engagements de France 2030.
D’autre part, cela tient à « une réduction nette des crédits pourtant initialement prévus ». C’est le cas des montants accordés cette année aux dispositifs de la planification écologique en forêt ou pour l’agriculture qui sont « très inférieurs à ceux annoncés initialement », des crédits budgétaires annoncés pour la mise en œuvre du Plan Eau qui ont été reportés, mais aussi du « faible niveau » des montants accordés pour la rénovation urbaine en 2025 qui « menace la réalisation de certains projets ».
En parallèle, les auteurs de l’étude font valoir que la baisse du Fonds vert – réduit de 850 millions d’euros pour atteindre 1,15 milliard d’euros – semble « peu conciliable avec les besoins » du moment et laisse « redouter des mises en concurrence avec les autres mesures ».
« D’une part, il n’est pas exclu que le montant final engagé pour l’adaptation soit inférieur au montant annoncé en fonction des projets déposés par les acteurs. D’autre part, même si les montants de l’axe adaptation sont maintenus, les montants alloués aux mesures des autres axes baisseront mécaniquement », déplore l’I4CE qui rappelle que « beaucoup d’entre elles – comme la rénovation énergétique, les actions en faveur de la biodiversité – génèrent aussi des cobénéfices pour l’adaptation ».
Budget 2026 : « pas d’amélioration » en vue
D’autant que cette baisse du Fonds vert reste « peu compensée par la hausse mise en avant du Fonds Barnier (+ 75 millions d’euros) ». Dans ce contexte, l’Institut reprend à son compte l’analyse du Haut Conseil pour le climat qui estime que « les financements connus à ce stade pour le PNACC 3 sont insuffisants comparés aux estimations de besoin ».
Pour rappel, ce troisième Plan national d'adaptation au changement climatique, présenté en mars dernier, prévoit une série de mesures destinées à préparer les transports, les infrastructures énergétiques ou encore l'agriculture de la France à une augmentation de 4 °C de la température d'ici la fin du siècle, l’accélération du réchauffement climatique étant désormais considérée comme inévitable.
Et ce ne sont pas les premières discussions engagées autour du projet de budget pour 2026 qui rassurent l’I4CE, l’Institut considérant que celles-ci « ne laissent pas entrevoir d’amélioration à court terme ».
À ses yeux, « plusieurs signaux interrogent la dynamique : qu’il s’agisse des dispositifs à cobénéfices comme MaPrimeRénov’ gelée une première fois durant l’été et dont la pérennité n’est plus assurée, des discussions sur la revue à la baisse des trajectoires de financement contractualisées avec certains opérateurs comme VNF, ou encore des hypothèses de fusion ou de réorganisation d’opérateurs – dont les moyens humains et techniques sont pourtant essentiels ».
L'investissement local « déterminant »
En juillet dernier, l’Institut estimait d’ailleurs que « la manière dont le PLF 2026 [projet de loi de finances pour 2026] préservera les capacités d’investissements des collectivités, en particulier pour le climat, sera déterminante ». « Entre couper dans certaines de leurs ressources, et brider leur capacité à s’endetter, il faudra choisir, sous risque perdre sur tous les tableaux », prévenait-il, en soulignant que, « dans cette équation, le montant du Fonds vert n’est qu’un sujet parmi d’autres ».
Reste que, parmi ses recommandations, l’I4CE réclamait d’« au moins stabiliser en 2026 les autorisations d’engagement du Fonds vert » et préconisait d’augmenter les crédits du Fonds Barnier (+ 150 millions d’euros) pour « accroitre les efforts en matière de prévention des risques » et de créer un Fonds érosion côtière (d’environ 100 millions d’euros).
En parallèle, il demandait de « mieux accompagner les collectivités locales en dotant la "Mission Adaptation" de moyens pour garantir sa montée en puissance face aux besoins locaux » et de « préserver [leur] autofinancement », tout en leur donnant de « la prévisibilité sur les ressources dont elles disposeront ».
À cette occasion, l’Institut rappelait que les dépenses des collectivités vont devoir « augmenter » de l’ordre de « 11 milliards d’euros entre 2024 et 2030 en moyenne annuelle » pour la seule mise en œuvre de la stratégie nationale bas carbone.
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