Confrontées au tourisme de masse, les zones naturelles protégées contraintes à réagir
Par Ulysse Bellier, AFP
La saison estivale 2021 s’annonce chargée, avec des réservations en hausse de 20% par rapport à 2020, déjà supérieure à 2019, selon les chiffres du cabinet G2A pour l’Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM). Une réussite bienvenue pour un secteur qui cherche à réduire sa dépendance au ski hivernal.
« Si nous nous félicitons de ces retrouvailles entre les Français et leur nature, nous nous devons aujourd’hui de les appeler à la plus grande vigilance », ont averti fin juin l’ensemble des parcs nationaux, régionaux, réserves et grands sites de France. « Nos espaces naturels sont fragiles », écrivaient-ils de concert, inquiets des effets néfastes du tourisme de masse dans ces zones protégées.
En 2020, les Hautes-Alpes n’ont jamais accueilli autant de touristes estivaux. Le parc des Écrins a observé un bond de fréquentation, de même que la région autour de Gavarnie, dans les Hautes-Pyrénées, où il y avait + 30 % de touristes en 2020. « Le principal changement », note Pierrick Navizet, du parc des Écrins, « ce sont les nouveaux publics qui viennent des aires urbaines proches et qui ne sont pas tous connaisseurs de la montagne. »
Des navettes, pas de voitures
Une évolution manifeste au lac du Lauvitel, site naturel grandiose et facile d’accès en Isère, où jusqu’à 1 000 personnes ont randonné les week-ends d’août.
Les gardes du parc y ont constaté une « explosion de l’incivilité », avec un doublement du nombre d’infractions constatées par rapport à 2019 : abandon de déchets, feux sauvages, vols de matériel, chalets fracturés... Après l’été dernier, « on était un peu lessivé », reconnaît Pierre-Henri Peyret, le chef du secteur. Mais « c’est à nous de nous adapter », assure-t-il en présentant un plan de gestion de cette nouvelle fréquentation avec une priorité: « mieux communiquer » les bonnes pratiques, comme porter de bonnes chaussures, ne pas s’approcher des chiens de protection de troupeau, ne pas faire de feu...
Pour porter le message, deux canaux : Instagram, là où nombre de néo-randonneurs dégottent leur prochaine idée de sortie, et sur place, où davantage de gardes seront présents pour faire de la « sensibilisation sur la réglementation » mais aussi des animations, comme des observation de chamois à la lunette.
Dans le Vercors, massif proche des métropoles de Lyon ou Grenoble, le site protégé de la Molière a subi à l’été 2020 « une très forte pression » des voitures garées : jusqu’à 294 pour 60 places de parking. « Quand on a passé une demi-heure à se garer, à se disputer avec un autre gars pour une place, on n’est plus dans la nature préservée; on est dans la consommation de masse », regrette Quentin Chabanne, chargé de mission au parc naturel régional du Vercors.
Pour « réduire l’emprise de la voiture », le parc a lancé consultations, études et réflexions avec une première solution qui sera testée quelques jours cet été : l’interdiction de l’accès du haut du site aux voitures, remplacées par des navettes. Une manière d’instaurer une jauge, comme l’a annoncé mardi l’île de Porquerolles, sur la Côte-d’Azur ? « Sans parler de quotas, il y aura forcément une limitation, par la capacité des navettes ou du stationnement », glisse Quentin Chabanne. « On a des pics de fréquentation sur certains secteurs bien identifiés » mais « pas de surfréquentation », tient à nuancer Yvan Chaix, le directeur de l’agence de développement des Hautes-Alpes. « Je crois qu’on va rentrer dans un cycle long d’un assez fort intérêt pour la montagne l’été », poursuit-il.
La tension entre tourisme et environnement n’en est « qu’à ses débuts », conclut Quentin Chabanne.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
Débat sur la vaccination obligatoire, alors que l'inquiétude grandit sur une reprise de l'épidémie
PLFR 2021 : Députés et sénateurs trouvent un accord en commission mixte paritaire
Négociations collectives dans la fonction publique : le décret est paru