Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 14 septembre 2022
Télécommunications

Coupure de TF1 dans les zones blanches : l'AMF interpelle l'Arcom, qui dit son impuissance

Le litige entre Canal+ et TF1 a abouti à la coupure, dans les communes n'ayant accès à la télévision que par satellite, de la diffusion de TF1. Le président de l'AMF, David Lisnard, a demandé à l'autorité de régulation ce qu'elle pouvait faire. La réponse est : rien.

Par Franck Lemarc

Un certain nombre d’usagers se retrouvent directement victimes des conséquences du bras de fer qui oppose depuis plusieurs mois le groupe Canal+ et le groupe TF1. Le premier a en effet décidé, depuis le 31 août, de cesser de diffuser via le satellite TNT-Sat les cinq chaînes gratuites du groupe TF1 (TF1, TMC, TFX, TF1 Séries films et LCI). Résultat : dans les zones non desservies par la TNT (essentiellement des zones de montagne), où la réception n’est possible que par satellite, quelque deux millions d’usagers sont privés de ces chaînes. 

Le groupe TF1 s’adresse aux maires

Le conflit entre les deux groupes porte sur l’accord financier de leur contrat de distribution. Canal+ argue que TF1 demanderait, pour reconduire son contrat de distribution, un prix en augmentation de 50 %, ce que dément la chaîne. En guise de réponse, Canal+ a donc coupé la diffusion des chaînes de TF1 sur ses box. Derrière ce conflit, les grandes manœuvres actuellement en cours dans l’audiovisuel sur fond de fusion entre TF1 et M6 – le groupe Canal+ cherchant visiblement à dénoncer auprès de l’autorité de régulation de l’audiovisuel (l’Arcom), les pratiques commerciales de TF1, pour empêcher cette fusion. 

Les deux groupes se sont mutuellement attaqués devant le tribunal de commerce, et un jugement en référé devrait être rendu le 22 septembre. 

En attendant, Didier Casas, dirigeant du groupe TF1, s’est adressé à l’AMF le 10 septembre pour dénoncer les pratiques de Canal+. Dans un courrier adressé à David Lisnard, il explique que « tout à sa volonté de mettre à l’amende le groupe TF1, Canal+ a décidé de couper TF1 et les autres chaînes du groupe non seulement sur ses offres classiques, mais aussi sur l’offre satellite (…) qui concerne 2 millions de foyers, (…) situés dans des zones qui ne sont couvertes ni par la TNT ni par les opérateurs télécoms via l’ADSL ou la fibre. (…) Plusieurs millions de nos concitoyens sont ainsi placés dans une situation absolument inacceptable car ils n’ont pas de solution de repli. »  Didier Casas juge que cette situation « crée une rupture d’égalité aussi manifeste qu’injuste entre plusieurs catégories de citoyens ». Les usagers concernés « s’en sont bien souvent ouverts à leurs élus et en premier lieu à leur maire ». TF1 souhaite donc dire aux maires « combien (le groupe) est navré de cette situation devant laquelle (il est) totalement impuissant ». 

L’Arcom impuissante

À la réception de ce courrier, David Lisnard a écrit à son tour à l’Arcom, le 12 septembre, pour « l’alerter ». Le maire de Cannes précise naturellement qu’il « n’appartient pas à l’AMF d’interférer dans un litige commercial entre deux groupes audiovisuels ». Néanmoins, il y a bel et bien « une rupture d’égalité entre les communes dans l’accès aux chaînes de télévision ». L’AMF souhaite donc « connaître les dispositions engagées en la circonstance urgente par l’Arcom ». 

La réponse a été immédiate, mais elle décevra les usagers et les maires concernés. Roch-Olivier Maistre, le président de l’Arcom, a aussitôt répondu au président de l’AMF pour lui indiquer que l’Arcom ne pouvait pas résoudre le problème. L’autorité est certes « très soucieuse »  de la situation, et considère que « tous les Français, quel que soit leur lieu de résidence, doivent pouvoir accéder sans frais à toutes les chaînes de la TNT gratuite. »  Mais, poursuit le président de l’autorité, « la loi n’offre pas au régulateur de levier juridique pour contraindre les opérateurs à remédier à cette situation dommageable ». 

L’Arcom a bien proposé « une médiation »  aux deux groupes, mais celle-ci n’a, visiblement, pas abouti. 

Il reste donc à attendre le 22 septembre, date à laquelle le tribunal de commerce de Paris devrait rendre sa décision. TF1 a demandé au juge d’obliger Canal+ à rediffuser ses chaînes pendant une période provisoire de quatre mois, période qui permettrait ou bien de trouver un accord entre les deux groupes, ou bien aux usagers de basculer sur une autre offre satellite.  

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