Les territoires connectés : une solution pour améliorer la sécurité, selon un rapport sénatorial
Par Lucile Bonnin
Cinq années après le rapport sénatorial sur « les nouvelles technologies au service de la modernisation des territoires » , un nouveau rapport élaboré par les sénateurs Antoine Lefèvre (Aisne), Anne-Catherine Loisier (Côte-d’Or), et Jean-Yves Roux (Alpes-de-Haute-Provence) a été présenté hier.
Sous le titre « Territoires connectés et protection des populations, les élus inventeurs de solutions » , ce travail répertorie les diverses pratiques d’utilisation des nouvelles technologies pour agir sur la sécurité d’un territoire. Le rapport met en avant l’existence de bonnes pratiques locales. « La pédagogie par l’exemple pourra inspirer des décideurs politiques locaux » , explique Antoine Lefèvre.
Françoise Gatel, sénatrice d’Ille-et-Vilaine et présidente de la délégation aux collectivités territoriales, insiste sur l’importance de l’innovation technologique au service des collectivités territoriales : « Les territoires connectés sont une solution pour améliorer les services, la capacité d’agir des territoires et protéger les habitants. »
Protection de l’ordre public
La première partie de ce rapport met en évidence trois dispositifs concrets dont les maires peuvent se saisir afin d’assurer leur rôle « de protection de l’ordre public et de prévention de la délinquance ».
Le centre de supervision urbain (CSU), salle équipée d’écrans affichant en direct les images des caméras de vidéo protection, sont, selon les rapporteurs, des outils essentiels pour « prévenir les atteintes aux biens et aux personnes, identifier les auteurs, réguler la circulation urbaine et sécuriser les bâtiments et les sites communaux ». La mission a par exemple salué le CSU de Charleville-Mézières, qui bénéficie d’une unité vidéo et d’un poste de commandement.
Les drones peuvent être utilisés pour la protection de l’ordre public. La ville d’Istres en a acquis deux et est devenue la première commune de France à doter sa police municipale de tels outils. Dépôts sauvages, surveillance des forêts en cas de risque incendie, identification de contrevenants, respect des règles d’urbanisme… Les champs d’actions peuvent être variés mais doivent protéger le droit au respect de la vie privée. Il faut rappeler toutefois que cette expérimentation prévue dans la loi relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, à la demande de l'AMF, vient d’être invalidée par le Conseil constitutionnel (lire article Maire info ci-dessus).
Autre solution listée : le dispositif « voisins vigilants » ou « participation citoyenne » pour sa version étatique. Loin d’être une nouveauté puisqu’environ 5 6000 communes l’ont déjà officiellement adoptée, cette démarche participative avait été définie précisément dans une circulaire en 2019. Cette mise en relation virtuelle entre les habitants d’un quartier ne semble pas, selon le rapport, être dénuée d'efficacité.
Prévenir les risques
Un autre avantage apporté par les nouvelles technologies a été souligné : la capacité de s’adapter aux changements climatiques, ce qui constitue « un enjeu à la fois urgent et majeur » .
La gestion du risque d’inondation peut être encadrée comme le fait la ville de Nîmes avec le dispositif d’évaluation et suivi des pluies en agglomération pour devancer l’alerte (ESPADA). « Il permet la surveillance de l’évolution des précipitations et du ruissellement par réseau de stations de mesures hydrométéorologiques et des caméras de surveillance ».
Même principe pour le risque incendie ou avalanche : ces incidents peuvent être prévenus grâce à l’utilisation de drones par exemple. Le rapport précise néanmoins que ces derniers « n’ont pas vocation à se substituer aux interventions humaines, mais constituent un précieux moyen de soutien. »
Enfin, la commune d’Ajaccio a été citée pour sa mise en place d’un dispositif numérique « multirisques » . Au-delà de l’utilisation d’outils d’observations et de contrôle pour les incendies et inondations, la commune a développé une plateforme multicanale de télé-alerte pour prévenir la population en cas de crises. « Cette bonne pratique locale semble transposable dans d’autres communes » , précisent les rapporteurs.
Françoise Gatel insiste sur l’importance de ce type d’outils qui renforce la communication avec les citoyens. « Recevoir un message sur son téléphone en cas d’alerte, c’est un principe de prévention et de précaution, comme autrefois pouvait l’être la sirène. On doit pouvoir avoir accès à ces nouveaux outils compatibles avec un État de droit. »
Une réponse à la fracture territoriale
Cinq recommandations sont donc directement formulées dans le cadre de ce rapport. Les sénateurs encouragent les élus à recourir aux nouvelles technologies de manière rigoureuse en procédant à un bilan coût/avantages, de faire de la sensibilisation aux enjeux de cybersécurité auprès du personnel et de suivre l’expérimentation du recours aux drones.
Il apparaît également important de développer des usages numériques en respectant le principe de subsidiarité. Concrètement, « les élus doivent réfléchir à la mise en commun d’agents de police municipale dans le cadre de CSU mutualisés. Ces derniers permettent en effet d’amortir le coût de réalisation de ces centres et de suivre des images dans une zone géographique aussi étendue que possible, la délinquance ne s’arrêtant pas au niveau des frontières de la commune. » Cette argumentation rappelle beaucoup celle du rapport Fauvergue-Thourot en septembre 2020, qui prônait une intercommunalisation à marche forcée de la sécurité.
La dernière recommandation porte sur le renforcement de la coopération entre les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l’État dans le domaine de la protection des populations. Car, comme le rappelle Anne-Catherine Loisier, ce rapport qui vise à « attiser une culture du numérique après des élus et de l’État », met aussi en lumière « des freins à ces initiatives » et le fait qu’il n’y ait « pas toujours une bonne synchronisation. »
Ce point est d’autant plus important à la veille du déploiement en juin 2022 du système d’alerte dit « cell broadcast » (ou « diffusion cellulaire » ). Ce dernier « reposera sur une communication efficace et hyper-réactive entre les maires et les services préfectoraux. »
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
Les collectivités territoriales au coeur de la transition numérique (22/11/2021)
Le numérique : un levier pour revivifier la démocratie locale (03/12/2021)
Cybersécurité des communes : une préoccupation majeure pour les scrutins 2022 (13/01/2022)
Jean Castex annonce une levée progressive des restrictions sanitaires entre le 2 et le 16 février
La situation à l'hôpital sera « tendue » jusqu'à la mi-mars, selon le Conseil scientifique
Parrainages : vive passe d'armes entre François Bayrou et l'AMF