Édition du lundi 13 septembre 2004
Suppression des fonds structurels aux pays membres qui encourageraient des délocalisations : l'idée de Nicolas Sarkozy rencontre de vives oppositions
Les ministres européens des Finances n'ont pas paru enthousiasmés samedi par la proposition de leur collègue français Nicolas Sarkozy de supprimer les aides des fonds structurels européens aux « jeunes » pays membres qui encourageraient des délocalisations avec des carottes fiscales aux entreprises (nos éditions «Maire-Info» des 7 et 10 septembre 2004).
« Je crois que ça n'a aucune chance de se réaliser »", a commenté le ministre autrichien Karl-Heinz Grasser au dernier jour de la réunion de l'ECOFIN dans la station balnéaire néerlandaise de Scheveningen. « Nous n'en sommes qu'au début et comme pour tout problème, il est difficile de trouver un consensus en Europe », a voulu tempérer M. Sarkozy.
Face à ce thème social brûlant en France, en Allemagne et d'autres pays d'Europe occidentale, la Commission de Bruxelles a mis en garde contre toute idée de lier la fiscalité d'entreprise aux milliards d'euros de fonds structurels déversés dans les régions qui en ont le plus besoin.
On redoute une levée de bouclier des dix nouveaux membres qui ont rejoint l'UE en mai dernier avec la promesse de bénéficier des subventions européennes. « Il est très important pour nous de rattraper le reste de l'Europe », a estimé le ministre hongrois Tibor Draskovics. « Ils doivent accepter nos politiques, en baissant par exemple l'impôt sur les sociétés ».
Nicolas Sarkozy répond que les électeurs ne comprendraient pas pourquoi des pays seraient « à la fois assez riches pour pouvoir baisser leurs impôts (...) et assez pauvres pour pouvoir mériter les fonds structurels ». Pour lui, ignorer cette question des délocalisations pourrait risquer d'avoir des conséquences négatives sur les référendums sur le traité constitutionnel.
Mais les nouveaux pays membres répondent que le faible impôt sur les sociétés vient compenser des infrastructures insuffisantes et d'autres désavantages. Ils citent ainsi l'exemple de l'Eire qui a connu une forte croissance dans les années 90 en séduisant fiscalement les entreprises, tout en percevant les fonds structurels.
Selon la Commission, le taux moyen dans l'UE de l'impôt sur les sociétés est de 21,5%, avec une moyenne de 31,4% chez les Quinze. Une moyenne dans le camp occidental qui aurait pu être encore plus haute s'il n'y avait pas l'Irlande et ses 12,5%, le plus bas taux de toute l'UE.
Sans surprise, Dublin ne veut pas entendre parler de la proposition Sarkozy. "Il est désormais temps pour les autres de jouir de nos bénéfices", a expliqué Dermot Ryan, porte-parole du ministre Charlie McCreevy.
Même si le chancelier allemand Gerhard Schröder avait fait pareille proposition en avril dernier, Berlin a finalement rejeté l'idée de M. Sarkozy. Si son homologue Hans Eichel a soigneusement évité le sujet cette semaine, il s'est dit favorable à une proposition de la Commission visant à harmoniser les taux d'imposition sur les bénéfices pour les sociétés présentes dans au moins deux pays de l'UE.
Mais la Grande-Bretagne l'a rejetée derechef. "Nous ne soutiendrons aucune décision en vue d'harmoniser l'impôt sur les sociétés", a assuré Gordon Brown. Le chancelier de l'Echiquier a ainsi relevé que les Etats-Unis ont un marché intérieur unique avec des taux d'imposition différents dans les 50 Etats. Un taux commun dans l'UE "n'est certainement pas une priorité. Les réformes économiques, si".
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