Pénurie des maîtres-nageurs sauveteurs : un décret élargit les conditions d'exercice des titulaires du BNSSA
Par Lucile Bonnin
Face à la pénurie de maîtres-nageurs sauveteurs (MNS) qui sévit en France depuis des années, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra annonçait en février dernier, lors des États généraux de l'encadrement et de la surveillance dans la filière aquatique, le lancement d’un plan en quatre volets. Le but : agir sur « la réglementation, la formation, les conditions de travail, et la valorisation du métier. »
Ce week-end, une première mesure a été mise en place avec la publication d’un décret « qui va permettre de soutenir les collectivités locales, en première ligne face à la pénurie de surveillants, contraignant régulièrement à fermer leur complexe aquatique ou leur base de loisir alors qu’ils représentent un fort enjeu d’animation de leur territoire » , comme l’explique le président de l’Andes (Association nationale des élus en charge du sport) Patrick Apperé.
Contexte tendu
Pour mémoire, cette carence en MNS a commencé à prendre de l’ampleur à partir de l’année 2004, lorsque le ministère chargé des Sports a modifié par un arrêté le contenu des titres, diplômes et attestations des MNS (lire Maire info du 20 mai 2022). Très vite le nombre de MNS en formation a été divisé par deux. L’AMF avait alors obtenu qu’un titulaire du Brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique (BNSSA) puisse être recruté pour une durée de 4 mois maximum par une collectivité sous réserve d’acceptation du préfet.
Mais le nombre de MNS n’a fait que décroître ces dernières années, faisant peser un risque d’augmentation du nombre de noyades, qui sont déjà la cause, chaque année, d’environ 1 000 décès en France. L’AMF demandait alors l’allongement de la durée de dérogation accordée aux collectivités, qui est actuellement de 4 mois, afin de permettre de pallier le manque de MNS en recourant à des BNSSA.
Ce samedi, le ministère des Sports a publié un décret autorisant les personnels titulaires du Brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique (BNSSA) à surveiller, de manière autonome et sans caractère dérogatoire, les baignades d’accès payant ou gratuit.
Simplification des normes
Ce décret renforce « les capacités de surveillance des baignades sur tout le territoire national, en octroyant l’autonomie nécessaire aux titulaires d’un Brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique » , comme l’indique dans un communiqué la ministre Amélie Oudéa-Castéra. « Cette évolution règlementaire, attendue par nombre de collectivités et de gestionnaires de piscines, permet de renforcer la capacité à recruter des personnels de surveillance et la sécurité des baignades dès cet été. »
Concrètement, auparavant, les titulaires du BNSSA « ne pouvaient exercer la surveillance en autonomie, hors du cadre de l’assistance à un MNS, que dans certaines conditions (au titre de l’accroissement saisonnier de l’activité et de l’impossibilité de recruter des MNS), sur dérogation accordée par chaque préfet et pour une durée limitée (4 mois maximum) ». Désormais, « les titulaires du BNSSA, régulièrement déclarés, ont vocation à assurer en autonomie, la surveillance des baignades d'accès payant ».
Il est précisé dans le décret que « toute personne désirant assurer la surveillance d'un tel établissement doit en faire la déclaration au préfet du lieu de sa principale activité. Le contenu de cette déclaration est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité civile et des sports. »
Si cette disposition s’applique dans le strict cadre de la baignade d’accès payant, il faut tout de même relevé une contradiction cachée dans le communiqué de presse. On peut lire dans le communiqué que les titulaires du BNSSA pourront surveiller dans tous les contextes de baignade, qu'elle soit gratuite ou payante. Or, il n’est pas fait mention de la baignade gratuite dans le décret, dont le titre indique, au contraire, qu’il n’est consacré qu’aux baignades payantes.
Un arrêté a également été publié pour abroger deux dispositions dans le code du sport ; l’une indique que les BNSSA peuvent « assister » les MNS ; l’autre concerne le caractère dérogatoire de l’exercice de surveillance d’un BNSSA qui n’est plus valable aujourd’hui.
Le Conseil national d’évaluation des normes avait rendu un avis favorable sur ce projet de décret et d’arrêté… en avril 2020 ! On ne sait pas pour quelle raison la publication du décret a autant tardé.
En revanche, le Cnen estimait déjà que cette réforme était de « nature à permettre aux collectivités territoriales de faire des économies substantielles, d’accroître l’amplitude horaire d’ouverture des piscines et de permettre une meilleure adéquation des moyens humains et des besoins au niveau de chaque structure aquatique entre les activités de surveillance et d’apprentissage (en particulier de la natation assurée par les MNS) » . En 2020, le ministère des Sports prévoyait une économie de 565 000 euros par an pour les collectivités territoriales.
Compétences MNS
Le communiqué insiste enfin sur le fait que « les MNS restent quant à eux seuls compétents pour exercer à la fois des missions de surveillance et des missions pédagogiques liées aux activités d’enseignement du savoir-nager » . Or, le manque de MNS est donc particulièrement problématique pour l’apprentissage de la natation.
En la matière, le gouvernement annonce que « dans le cadre de travaux en cours sur la promotion du métier dans la fonction publique territoriale (80 % des piscines), un volet d’offre de formation continue et d’accompagnement de la carrière de MNS fera l’objet d’une convention signée entre le MSJOP et le CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale) d’ici la fin de l’année ».
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