Sport : les collectivités en première ligne sur l'investissement, mais aussi sur le front de l'inflation
Par Lucile Bonnin
En mars 2022, l’enquête Les collectivités locales, premiers financeurs du sport en France avait été présentée par l'Observatoire du groupe BPCE (lire Maire info du 31 mars). Un peu moins d’un an après, une nouvelle édition de BPCE L’Observatoire sur l'économie du sport a été publiée la semaine dernière.
Si de nombreux chiffres restent stables par rapport à l’année dernière, c’est notamment parce que les collectivités locales ont gardé le cap malgré les différentes crises en matière d’investissements pour le sport local. Le sport s’est imposé comme un enjeu de premier plan des politiques territoriales, surtout à l’échelle communale.
12,5 milliards d’euros par année
Comme l’année dernière, les résultats de l’étude montrent que, sur l’ensemble du soutien public évalué à 20 milliards d’euros, la contribution émanant des budgets locaux est de l’ordre de 60 % et s’élève à environ 12,5 milliards d’euros par an. Un chiffre notable puisque ce montant correspond presque au double du budget de l’État en la matière.
Cet investissement estimé à 12,5 milliards d’euros représente « près de deux fois le budget des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. » À ce montant s’ajoute une pratique non négligeable : la mise à disposition de locaux administratifs et équipements à des associations « soit gratuitement, soit pour des loyers symboliques. » « Ces renoncements totaux ou partiels à des loyers de la part des collectivités concernent plus de 180 000 associations sportives. »
Deuxième poste de dépenses des communes
La contribution annuelle des communes est de 64 % plus élevée que celle des autres collectivités. Selon l’Observatoire, 8 milliards d’euros sont distribuées par les communes. « Construction, gestion et mise à disposition des équipements sportifs, liens et soutien des associations sportives et des clubs professionnels (subventions, mise à disposition de moyens…), gestion et organisation de manifestations sportives, relations avec le monde scolaire » : la commune est un acteur central de proximité pour le sport.
C’est d’ailleurs le « deuxième poste de dépenses des communes, après l’enseignement, et le quatrième pour les intercommunalités, après la voirie et les routes, les déchets et la propreté ainsi que les aménagements et les services urbains. »
L’étude estime également que le sport « représente environ 10 % du budget du bloc communal (hors services communs et opérations non ventilées), et plus spécifiquement, 15 % de l’investissement total des communes. »
Gestion du parc d’équipements
Les auteurs du rapport rappellent très justement que « les collectivités territoriales, et notamment les communes, sont de loin les acteurs les plus impliqués dans le développement et la gestion du parc d’équipements français » (318 000 équipements en 2020). Plus précisément, le bloc communal est propriétaire de 80 % du parc sportif français.
Qui dit gestion dit entretien des équipements, et c’est un sujet qui préoccupe de plus en plus d’élus actuellement. À l’heure où « 30 % du parc actuel qui a été mis en service avant 1985 n’a jamais fait l’objet de travaux de réhabilitation », « le tournant de la rénovation ou de la réhabilitation » est à prendre. Les élus de l’AMF rejoignent ce constat et demandent un plan majeur de rénovation et réhabilitation du parc sportif existant, pour l’adapter aux contraintes de sobriété énergétique et de changement climatique.
Dans le cadre de cette étude, les élus interrogés ont manifesté « des attentes assez homogènes » selon leurs territoires en matière d’entretien du parc sportif. « Cinq types de projets émergent dont la majorité porte sur la mise à niveau du parc ancien » qui sont : la construction de nouveaux équipements lourds, la mise en service de petits équipements de proximité, la reconstruction d’un équipement datant des années 1940 à 1970, la transformation ou l’agrandissement d’un équipement existant et la modernisation d’un équipement à des fins fonctionnelles, sécuritaires ou énergétiques sans changement d’usage.
Disparités territoriales
Si les collectivités sont incontestablement investies dans le développement du sport à l’échelle locale, des disparités « géographiques concernant le niveau et les modalités de la dépense sportive » sont observables.
Les auteurs pointent notamment que « la dépense sportive moyenne est très élevée dans les départements alpins et, de façon générale, dans les zones géographiques où les activités sportives jouent un rôle important dans l’attractivité touristique. » D’autres territoires investissent particulièrement dans le sport dans le cadre d’une politique de développement économique par le sport. C’est le cas par exemple pour les départements de l’Indre, de la Mayenne ou de la Haute-Marne.
Autre point : « la densité de population de l’aire géographique semble peu influer sur la dépense moyenne par habitant en faveur du sport. » En effet, les dépenses sportives moyennes ne sont pas forcément plus élevées dans les grandes métropoles régionales.
L’étude met aussi en lumière le fait que la densité d’équipements n’est pas synonyme de diversité et que, par conséquent, la faible densité d’équipements sportifs observée dans les grandes métropoles par exemple est compensée par leur grande taille et une offre très diversifiée.
Inflation
Une partie de cette étude est consacrée à démontrer que cette forte implication financière des collectivités risque de leur coûter particulièrement cher dans ce contexte d'inflation que l'on connaît actuellement. BPCE L’Observatoire estime le surcoût sur les dépenses des collectivités territoriales en faveur du sport à environ 12 %, soit 1,5 milliard d’euros en 2022. Sans surprise, c’est avant tout l’énergie qui représente un surcoût de 56 % du surcoût total, soit 840 millions d’euros.
Et comme les communes sont les plus impliquées dans le financement du sport, elles sont aussi celles qui souffrent le plus de l’inflation. « Dans le sport, la hausse des prix coûterait près de 1 milliard d’euros aux communes et 400 millions d’euros à l’intercommunalité sur la seule année 2022, soit un surcoût de 13 % à 14 % contre 8 % pour les départements et les régions. »
Les auteurs alertent enfin sur le fait que ce « surcoût inflationniste » est une « menace pour le service public dans le sport » . L’inflation « vient s’ajouter aux contraintes financières plus structurelles des collectivités territoriales (perte progressive d’autonomie budgétaire, impopularité de la hausse des impôts locaux, montée des dépenses sociales et liées à l’âge), peut-on lire dans le rapport. En conséquence, la dégradation du service public dans le sport constitue davantage une réalité qu’un risque eu égard à la multiplication des fermetures de piscines au cours de l’été 2022 (lire Maire info du 6 septembre). »
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