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Édition du lundi 3 juin 2024
Social

Réinstallation des réfugiés : l'État donne les règles pour 2024

Le ministère de l'Intérieur a publié une instruction relative aux modalités de l'accueil des « réfugiés réinstallés » pour l'année 2024, confirmant que la région ÃŽle-de-France, Jeux olympiques oblige, n'en accueillera aucun. Des associations dénoncent un « nettoyage social ».

Par Franck Lemarc

La France, rappellent les services de l’État dans une instruction publiée au Bulletin officiel du ministère de l’Intérieur, est engagée auprès de l’Onu dans un programme de « réinstallation de réfugiés vulnérables ». Elle a accueilli quelque 22 000 réfugiés depuis 2014, et près de 3 000 sur la seule année 2023. Les engagements pour 2024 sont un peu inférieurs – autour de 2 000 réfugiés – compte tenu de « la mobilisation des services de l’État pour assurer le bon déroulement des Jeux olympiques et paralympiques ». L’instruction précise que ces 2 000 personnes seront réparties « sur l’ensemble du territoire métropolitain à l’exception de l’Île-de-France ».  En annexe, un tableau présentant la clé de répartition des réinstallations région par région le confirme : la région capitale ne recevra aucun réfugié. Les 11 autres régions métropolitaines en recevront entre 121 (Hauts-de-France) et 278 (Auvergne-Rhône-Alpes), la clé de répartition étant calculée selon plusieurs critères : population de la région, tension sur le logement, PIB de la région, effort déjà fourni, etc. 

Localités proches des structures hospitalières

Ce sont les régions qui seront le pilote de ce programme, même si les préfets de département doivent veiller à « maintenir un pilotage de proximité du dispositif d’arrivée et d’accompagnement ». Le programme prévoit une mesure d’accompagnement financier de l’État de 7 000 euros par personne accueillie, finançant « l’ensemble des missions qui incombent aux opérateurs, y compris l’hébergement temporaire ».

Pour cette campagne 2024, les services de l’État insistent sur plusieurs points. Il est notamment jugé « capital »  que les opérateurs « concentrent une partie de leurs efforts de captation de logement dans des localités proches des structures hospitalières ou de soins », dans la mesure où une large partie des personnes réfugiées présente des problèmes de santé. Par ailleurs, « afin d’éviter une concurrence accrue des publics dans l’accès au logement social, l’objectif de captation de 40 % de logement privé pourra utilement être maintenu ». 

Il est également demandé de veiller à une ouverture rapide des droits sociaux, notamment la Sécurité sociale, dès lors qu’ils sont officiellement considérés comme réfugiés par l’Ofpra. Par ailleurs, « afin de garantir un accès rapide au parcours d’intégration républicaine proposé par l’État », il est demandé de faire signer aux personnes concernées le Contrat d’intégration républicaine « dès la remise du récépissé ». 

« Nettoyage social »  ou « répartition démographique » ?

Sur le sujet des réfugiés toujours, le collectif Le Revers de la médaille, qui regroupe 80 associations de solidarité (dont Emmaüs, la Cimade, ATD Quart monde, Médecins du monde, le Diocèse de Paris ou la Ligue des droits de l’homme) s’apprête à publier des chiffres préoccupants sur ce qu’il appelle « le nettoyage social »  précédant les JOP de Paris. Selon Franceinfo, qui a eu accès à ce rapport en avant-première, ce sont « 12 545 personnes en situation de précarité »  qui auraient été « expulsées de leurs squats, bidonvilles ou campements »  en Île-de-France entre le 1er mai 2023 et le 30 avril 2024. 

Selon Le Revers de la médaille, ce type d’opération n’a pas seulement eu lieu en Île-de-France, mais également aux alentours d’autres lieux destinés à accueillir des épreuves pendant les JOP : fin mars, un bidonville proche du stade Matmut Atlantique de Bordeaux a ainsi été évacué.

Franceinfo révèle également que, selon les chiffres de la préfecture de la région capitale, « plus de 5 200 migrants ont été déplacés de Paris en direction d'autres régions de France », où des « accueils temporaires »  ont été installés. 

Plusieurs maires, ces derniers mois, ont dénoncé cette politique qui, selon eux, se déroule dans la plus totale « opacité », comme l’a dénoncé en mars dernier le maire d’Orléans, Serge Grouard, qui affirme que quelque 500 migrants ont été déplacés de Paris vers sa commune « sans qu’il en ait été informé par les services de l’État ». D’autres élus (à Strasbourg, à Lavaur près d’Albi…) ont également dénoncé cette pratique. 

Du côté de l’État, on ne nie pas celle-ci, mais on réfute tout lien avec les JOP et une volonté de rendre Paris « plus présentable » . On rappelle que cette pratique répond à la volonté du chef de l’État, dans un discours de septembre 2022, de mieux répartir les réfugiés et demandeurs d’asile sur le territoire, afin de ne pas les « concentrer dans les zones à faibles revenus des grandes villes »  et d’aider les communes rurales à faire face « à la pénurie de main-d’œuvre ». 

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