Sécurité et chasse : un rapport du Sénat encourage le dialogue entre les élus et les chasseurs
Par Lucile Bonnin
Dix-neuf sénateurs se sont vu confier ce rapport – pour ne pas dire ce sujet épineux – à propos de la sécurisation de la chasse. Et ce n’est pas sans mal que ces derniers ont mené à bien cette enquête après 48 auditions et cinq déplacements. Dans l’avant-propos du rapport, on apprend que pendant son élaboration « un climat parfois pesant et bloquant les échanges » régnait.
Le sujet est indéniablement sensible. Fin 2021, une pétition intitulée « Morts, violences et abus liés à la chasse : plus jamais ça ! » , initiée par le collectif « un jour un chasseur » obtenait plus de 122 000 signatures sur la plateforme dédiée du Sénat. Un ras-le-bol qui s’exprime notamment à la suite d’accidents jugés répétitifs en 2021.
La mission d’information, dont le sénateur Patrick Chaize est le rapporteur, avait donc pour but de « trouver des solutions équilibrées, concrètes et adaptées à la diversité des situations ». Des pistes ont été détaillées dans le rapport publié par le Sénat.
Des précautions concernant les chasseurs
Les sénateurs arguent avant tout que la législation nationale est « déjà renforcée » sur le sujet. Il est rappelé que le permis de chasser a été créé par la loi de 1844 et était à l’époque délivré par les maires. Aujourd’hui, et ce depuis 2014, « l’examen pratique du permis de chasser est axé sur la sécurité. Toute faute est éliminatoire. Environ 30 % des candidats échouent. »
La législation est relativement stricte mais des améliorations peuvent être apportées, selon la mission, au niveau de la formation des chasseurs. Elle préconise un examen particulier pour le grand gibier, l’intégration d’une épreuve vérifiant l’habileté au tir et un tutorat pour les jeunes permis – on se rappelle notamment d’une jeune chasseuse de 17 ans ayant tué accidentellement une randonneuse dans le Cantal en février dernier.
La mission estime aussi qu’il convient « d’exiger un certificat médical annuel » , comme pour tous les sports qui se pratiquent avec une arme. Autre proposition qui semble de bon sens : l’interdiction de la pratique en état d’ébriété ou après la prise de stupéfiants. « De nombreux chasseurs ne veulent plus être stigmatisés en raison de l’attitude d’une petite minorité » , est-il précisé dans le rapport.
Régulation locale
C’était une demande de la part des signataires de la pétition mais elle a été écartée par les sénateurs : instaurer des distances de sécurité autour des habitations ou des routes. Ces derniers expliquent que, « compte tenu de la portée des armes », cela reviendrait à interdire la chasse dans une grande partie de la France. De la même manière, l’interdiction de la chasse les mercredis et dimanches n’est pas recommandée.
En revanche, si la loi exige que les battues au grand gibier soient signalées par des panneaux, cette mesure est jugée insuffisante. Les élus demandent en effet « à savoir où l’on chasse sur leur commune. » La mission propose donc la déclaration préalable et systématique des battues notamment via des applications mobiles. « En contrepartie, les maires pourraient prendre plus souvent des arrêtés d’interdiction des zones de chasse lorsque la sécurité le justifie » , peut-on lire dans le rapport.
Cette recommandation s’accompagne d’une autre proposition qui éviterait tout blocage abusif de la pratique : la création d’un délit d’entrave. L’entrave à la chasse, définie comme « le fait, par des actes d’obstruction concertés, d’empêcher le déroulement d’un ou plusieurs actes de chasse », est aujourd’hui sanctionnée par une contravention de la cinquième classe, soit 1 500 euros. Cette contravention devrait se transformer en délit pour les sénateurs.
Pour résumer, et ce sans trop s’engager, la mission n’a donc pas retenu de « règle nationale uniforme » . Elle encourage plutôt, et cela se fera donc à la bonne volonté des acteurs des territoires ( élus, chasseurs et non-chasseurs) à trouver un moyen de « cohabiter » grâce à « un cadre de dialogue pour qu’émergent les solutions adaptées. » En Moselle par exemple, la Fédération départementale des chasseurs a prévu de diffuser une fiche juridique et pratique auprès des maires, notamment lorsque des actions de chasse ont lieu dans des zones de forte fréquentation (tourisme, parcours de santé, proximité d’habitations ou de zones d’activité).
Renforcer la police de la chasse
Il est rappelé que l’article L. 428-20 du Code de l’environnement, qui comporte la liste des personnes habilitées à exercer un pouvoir de police de la chasse, ne prévoit pas que les policiers municipaux puissent rechercher et constater ce type d’infractions.
Les auteurs indiquent que, pourtant, « les policiers municipaux sont d’ores et déjà compétents dans certaines matières de police environnementale » et que cette extension de leurs prérogatives pourrait être largement bénéfique pour renforcer la sécurité de la chasse.
Cette extension « permettrait en outre aux maires, au regard du nombre relativement peu important de gardes champêtres à l’échelle nationale (701 en 2020), de s’approprier plus aisément le sujet de la police de la chasse. »
Par ailleurs, les sénateurs proposent de donner au préfet la possibilité de provoquer la révision des Schémas départementaux de gestion cynégétiques (SDGC) pour des raisons de sécurité et de leur permettre « de limiter les jours et horaires de chasse pour assurer la sécurité des personnes. »
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