Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 23 mars 2016
Terrorisme

Sécurité dans les transports : la loi Savary est promulguée mais des questions restent en suspens

La promulgation de la loi sur la sécurité dans les transports collectifs a été si rapide qu’elle a pris de court même son instigateur, le député de la Gironde Gilles Savary : interrogé ce matin sur Europe 1, il disait espérer une promulgation « dans les tout prochains jours », alors que le texte était depuis quelques heures déjà publié au Journal officiel.
Il est possible que les attentats de Bruxelles, hier – dont le bilan dépasse ce matin les trente morts –, aient poussé le gouvernement à hâter la publication de cette loi, adoptée par le Parlement le 9 mars (lire Maire info du 10 mars). Mais hier, le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a annoncé des mesures – décrites comme d’application immédiate – allant déjà au-delà de ce qui est contenu dans la nouvelle loi. Résultat, il règne aujourd’hui un certain flou sur ce sujet.
Le ministre de l’Intérieur a déclaré hier, au sortir de la réunion de crise convoquée par François Hollande à l’Élysée : « Des mesures de quatre ordres ont été décidées dans les transports en commun. Premièrement, les accès aux zones publiques des infrastructures de transport sont désormais uniquement réservées aux personnes munies d’un titre de transport et ou d’une pièce d’identité. »  Or, l’article 11 de la nouvelle loi évoque en effet cette question de l’obligation de pouvoir présenter un titre de transport ou une pièce d’identité, mais ne mentionne à aucun endroit les « zones publiques des infrastructures ». Le texte est très précis : il dit que la possession d’un titre de transport ou d’une pièce d’identité est obligatoire « à bord des véhicules de transport ou dans les zones dont l’accès est réservé aux personnes munies d’un titre de transport ». Il faudra donc que le gouvernement précise les mesures annoncées hier, puisqu’ elles ne recoupent pas entièrement ce qui est prévu dans la nouvelle loi.
Et la question se pose avec acuité : c’est en effet précisément dans une de ces « zones publiques »  de l’aéroport de Bruxelles que l’un des attentats d’hier a eu lieu. Et ces zones, justement parce que n’importe qui peut y accéder sans aucun contrôle et que s’y concentrent des milliers de personnes, représentent un véritable cauchemar sécuritaire pour les forces de l’ordre et les exploitants des réseaux. Plusieurs pays frappés depuis longtemps par le terrorisme, comme la Russie ou Israël, ont déjà testé des solutions dont aucune n’est pleinement satisfaisante. En particulier, le fait de procéder à des contrôles à l’entrée des gares et aéroports ne fait – tous les experts le disent – que déplacer le problème : de tels contrôles créent d’inévitables files d’attentes à l’extérieur des infrastructures, files d’attentes qui peuvent elles-mêmes devenir des cibles potentielles pour les terroristes.
Invité hier soir au journal de 20 h sur France 2, le ministre de l’Intérieur a donné un début d’explication, en parlant de la volonté du gouvernement de renforcer les contrôles aléatoires dans ces zones publiques. « Il faut que nous parvenions à créer des conditions de contrôles aléatoires et permanents », a précisé le ministre. « La bonne doctrine, ce sont des patrouilles dynamiques de militaires et de policiers, de manière à ce que les terroristes soient dissuadés (d’attaquer) parce qu’ils sont confrontés au risque d’une rencontre avec des policiers et des militaires armés. »  C’est pour aller dans ce sens que le ministre a annoncé hier le déploiement de 1600 agents des forces de l’ordre supplémentaires.
Hier, la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, a annoncé qu’elle avait pris contact avec Bernard Cazeneuve pour faire « accélérer »  la mise en place d’équipements de sécurité dans les transports collectifs franciliens. Jugeant les portiques de sécurité « impraticables »  au vu du nombre de passagers transportés quotidiennement, Valérie Pécresse mise elle aussi sur « la présence humaine », mais également des moyens technologiques tels que « des détecteurs d’armes ». Elle s’est également félicitée de ce que la nouvelle loi Savary va permettre à présent « les contrôles d’identité dans les transports en commun ». Rappelons que cette loi donne également de nouvelles missions, si les maires et présidents d’EPCI le demandent, aux polices municipales, directement à l’intérieur des rames de transport en commun. Ce dernier point (article 20 de la loi) doit toutefois être précisé par un décret en Conseil d’État.
Franck Lemarc

Télécharger la loi du 22 mars relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs.

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