Second tour : les leçons des résultats dans les communes de plus de 3 500 habitants
À partir du fichier de données ouvertes publié ce matin par le ministère de l’Intérieur, Maire info a déterminé les grandes tendances du second tour dans les communes de plus de 3 500 habitants. Avec toujours le même constat : une abstention exceptionnellement forte, en particulier dans les villes et, au-delà des résultats spectaculaires dans certaines grandes villes, une polarisation classique des voix vers les tendances traditionnelles, gauche et droite.
Méthodologie
Pourquoi avoir retenu uniquement les communes de plus de 3 500 habitants ? Parce que – après bien des débats l’hiver dernier – c’est le seuil que le gouvernement a retenu pour procéder au « nuançage » systématique des listes. C’est donc seulement dans les communes de plus de 3 500 habitants que chaque liste est étiquetée politiquement par les services des préfectures. Le ministère de l’Intérieur a recensé 23 nuances politiques regroupées en six tendances (extrême gauche, gauche, divers, centre, droite, extrême droite).
Le ministère a fourni ce matin deux fichiers, l’un donnant les résultats de tous les candidats du second tour dans les communes de moins de 1000 habitants, l’autre dans les communes de plus de 1000 habitants (au nombre de 1385). Nous avons extrait de ce fichier les 995 communes comptant plus de 3 500 habitants – elles représentent, en tout, quelque 14,6 millions d’électeurs –puis calculé les résultats globaux de chaque tendance.
Abstention massive surtout dans les grandes villes
Le taux d’abstention dans ces communes de plus 3 500 habitants, lors de ce second tour, est un peu inférieur à celui qui a été constaté dans l’ensemble des communes : 5,28 millions d’électeurs se sont rendus aux urnes dans ces communes, soit 39,8 % des électeurs (60,2 % d’abstention). Nationalement, le taux de participation a été de 41,6 %.
C’est globalement dans les plus grandes villes et dans les agglomérations de celles-ci que l’on a le moins voté : l’abstention dépasse par exemple les 75 % à Vitry-sur-Seine, Créteil, Roubaix, Mulhouse, Vaulx-en-Velin, Villeurbanne…
Il y a une corrélation très nette entre la taille des communes et le taux d’abstention : en résumé, plus la commune est grande, moins l’on vote. Le taux d’abstention est ainsi de 47 % dans les communes entre 3 500 et 5 000 habitants ; 51 % dans les communes de 5 000 à 9 500 habitants ; 56 % dans celles de 9 500 à 20 000 habitants ; 61 % dans celles entre 20 000 et 40 000 habitants ; et 63 % dans les villes de plus de 40 000 habitants.
Dans les villes de plus de 100 000 habitants, les exceptions sont Saint-Paul (La Réunion), où l’abstention n’a été « que » de 43 %, Perpignan (52,7 %) et Toulouse (55,15%). Les trois plus grandes villes du pays, Paris, Lyon et Marseille, se sont abstenues entre 62 et 64 %.
Dans les grandes villes toujours, c’est à Mulhouse, Villeurbanne, Nice et Saint-Étienne qu’on a le moins voté (abstention comprise entre 72 et 75 %).
Les forces politiques
Côté tendances politiques, maintenant, il ressort de notre analyse du second tour que sur les 5,6 millions de suffrages valablement exprimés dans les communes de plus de 3 500 habitants, ce sont bien les tendances traditionnelles « droite » et « gauche » qui raflent la mise, avec à elles deux 70 % des voix. La gauche a emporté 2,2 millions de suffrages, la droite, 1,73 million. En troisième position, le centre recueille environ 950 000 voix.
La tendance « droite », selon les critères du ministère, regroupe Les Républicains, Debout la France, les listes divers droite et union de la droite. Ce sont, parmi ces tendances, les listes divers droite qui raflent la mise au second tour, avec 1,1 million de voix à elles seules sur les 1,73 million de la droite. Les listes Les Républicains seules remportent environ 311 000 voix.
Au centre sont comptabilisés le Modem, La République en marche et l’UDI, ainsi que des listes d’union du centre et divers centre. Ce sont ces listes « divers centre » qui remportent le plus de voix au centre (646 000 sur 950 000). Rappelons que, par décision gouvernementale, cette tendance a été attribuée à des listes non investies officiellement mais soutenues par un parti. Appartiennent donc à ces catégories les listes soutenues par LaREM ou le MoDem… comme celle de Nicolas Florian à Bordeaux, pourtant lui-même Républicain – ce qui, évidemment, ne facilite pas la lecture des résultats. Il est à noter que les listes officielles LaREM n’ont recueilli qu’à peine un peu plus de 104 000 voix.
Enfin, la tendance « gauche » va du Parti communiste à Europe-Écologie Les Verts, en passant par La France insoumise, le Parti radical de gauche et diverses listes « union de la gauche » et « divers gauche ». Les chiffres permettent de relativiser quelque peu la « vague écologiste » partout commentée depuis dimanche soir : en effet, le parti EELV n’a présenté que peu de listes en solo, lesquelles n’ont recueilli que 127 000 voix sur les 2,2 millions qu’a recueilli la gauche. Comme à droite, ce sont essentiellement les listes « divers gauche » qui se sont taillées la part du lion, avec un peu plus d’un million de voix, suivies par les listes d’union de la gauche (844 000 voix). Les autres partis de gauche qui se sont présentés seuls ne font pas mieux qu’EELV : le PS, là où il s’est présenté seul, a recueilli 118 000 voix et le PCF 56 000.
L’extrême droite (dont le Rassemblement national) a quant à elle recueilli quelque 164 000 voix dans ce deuxième tour. Les listes étiquetées « divers » (autres écologistes que EELV, régionalistes, Gilets jaunes, listes citoyennes, etc.) ont emporté environ 560 000 voix.
Il apparaît donc assez clairement que aucun parti ne peut, aujourd’hui, réellement crier victoire, tant les listes du second tour se sont constituées autour d’unions parfois hétéroclites. Le temps des grands partis régnant sans partage – et seuls – sur certains territoires semble bel et bien, pour l’instant, révolu. De quoi alimenter la réflexion des états-majors politiques, à vingt mois de l’élection présidentielle.
Franck Lemarc
Télécharger le fichier du ministère pour les communes de plus de 1000 habitants et de moins de 1000 habitants.
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