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Édition du jeudi 6 juin 2024
Santé publique

Explosion inquiétante du nombre de cas de coqueluche, notamment en collectivité

Santé publique France avait alerté, mi-avril, sur une hausse notable du nombre de cas de coqueluche en France au premier trimestre. Depuis, les chiffres ont « explosé », avec dix fois plus de cas sur les cinq premiers mois de l'année que sur toute l'année précédente. Les crèches et écoles maternelles et primaires sont particulièrement concernées. 

Par Franck Lemarc

C’est le 18 avril que Santé publique France, dans un communiqué, a fait mention pour la première fois d’une « recrudescence de la coqueluche »  en Europe et en France. À ce moment, SpF mentionnait 70 cas sur le premier trimestre, et une quinzaine de « clusters », « majoritairement en collectivités (écoles maternelles, primaires, haltes-garderies et maisons maternelles) ». Depuis, la situation a gravement empiré : selon l’Institut Pasteur, ce sont près de 6 000 cas qui ont été repérés depuis le début de l’année ! Pour mesurer la situation, il faut comparer ce chiffre aux 45 cas déclarés en 2022 et 9 en 2023. 

Le Centre national de référence (CNR) coqueluche confirme ces chiffres, en annonçant dans une communication que 1 400 cas ont été confirmés par test PCR en avril et plus de 3 000 en mai. Il annonce par ailleurs que deux souches résistantes aux antibiotiques classiques ont été identifiées. 

« Jamais vu depuis 40 ans » 

Rappelons que la coqueluche, contrairement à la grippe ou au covid-19, n’est pas due à un virus mais à une bactérie, et se traite donc par antibiotiques. La maladie est extrêmement contagieuse, environ dix fois plus que le covid-19. Il s’agit d’une maladie respiratoire se traduisant par de très fortes quintes de toux, et qui peut, en particulier chez les nourrissons, s’avérer très grave, voire mortelle. La maladie, jusqu’à l’arrivée du vaccin dans les années 1960, faisait plusieurs centaines de morts par an (1 100 morts par an à la fin de années 1940). La systématisation du vaccin a fait très fortement chuter la mortalité, sans toutefois la faire totalement disparaître : lors des récents pics de coqueluche, une dizaine d’enfants de moins d’un an sont décédés à chaque pic.

Cette maladie connaît en effet des pics réguliers qui surviennent tous les trois à cinq ans. Mais les précédents pics (1997, 2000, 2005, 2009…) n’ont jamais atteint le niveau de celui-ci : selon les données d’une étude du CHU de Montpellier, les précédents pics ont varié entre 300 et 450 cas par an… très en-dessous donc des plus de 6 000 cas repérés en seulement cinq mois en France cette année. Selon les chercheurs de l’Institut Pasteur, l’épidémie actuelle est « jamais vue depuis 40 ans ». 

Conséquences du covid-19

Reste à expliquer cette recrudescence soudaine. Pour les chercheurs, il semble que la cause principale soit à classer… parmi les conséquences de l’épidémie de covid-19. En effet, les mesures prises à cette époque (mesures barrière, port du masque, usage du gel hydro-alcoolique) ont fait reculer non seulement le covid-19 mais toutes les maladies respiratoires, provoquant, entre autres, une diminution très marquée des cas de coqueluche. Conséquence, l’immunité générale dans la population a diminué. 

On peut également se demander si une forme de méfiance vis-à-vis des vaccins, née là encore pendant l’épidémie de covid-19, n’a pas conduit à une diminution de la vaccination. Sans doute pas chez les enfants, puisque celle-ci est obligatoire à l’âge de 2, 4 et 11 mois – et cette obligation conditionne l’entrée dans des structures collectives comme les crèches. Mais davantage peut-être chez les parents. Il est en effet « préconisé », mais non obligatoire, pour les femmes enceintes, de se faire vacciner entre les 20e et 36e semaine de grossesse, afin de fabriquer des anticorps et de les transmettre au fœtus avant même la naissance. C’est en effet avant 2 mois, c’est-à-dire avant leur première vaccination, que les nourrissons sont les plus vulnérables. 

Recommandations

Les autorités sanitaires ne sont pas extrêmement inquiètes de la poussée des cas de coqueluche, dans la mesure où cette maladie se soigne bien grâce aux antibiotiques, mais rappellent que malgré ceux-ci, des nourrissons peuvent en mourir. Elles s’inquiètent également de la concomitance de cette épidémie avec l’arrivée des Jeux olympiques et paralympiques qui seront, forcément, marqués par de grandes concentrations de personnes. 

Dans un document rediffusé récemment par le CNR Coqueluche, élaboré en 2022 par le Haut conseil de la santé publique, il est rappelé que les « clusters »  doivent impérativement être signalés à l’Agence régionale de santé. Le document rappelle également les préconisations des ARS pour les « cas groupés »  de coqueluche. Dans les écoles, « un traitement curatif et une éviction scolaire ou professionnelle des cas, ainsi que l’identification de tous les sujets contacts des cas, soit l’ensemble des élèves des écoles et des adultes y travaillant ». Chez les assistantes maternelles, « l’exclusion temporaire des enfants symptomatiques et un arrêt des activités collectives ». 

Même si le gouvernement n’a pas encore réagi à cette situation, le CNR Coqueluche préconise qu’une campagne soit menée rapidement pour rappeler aux femmes enceintes la recommandation de se faire vacciner pour protéger leur futur enfant. 
 

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