Santé mentale des étudiants : les collectivités ont aussi un rôle à jouer
Par Lucile Bonnin
Selon les chiffres de Campus France, la France compte plus de 3 500 établissements, publics et privés, d’enseignement supérieur : 72 universités, 25 communautés d’universités et d’établissements, 271 écoles doctorales, 227 écoles d’ingénieurs, 220 écoles de commerce et de management, 45 écoles supérieures d’art publiques, 22 écoles d’architecture et 3 000 écoles et instituts privés. Au total, 2,5 millions d’étudiants suivent un cursus dans l’enseignement supérieur et 12 % d’entre eux sont étrangers.
Même si certaines villes concentrent davantage d’étudiants que d’autres, les étudiants vivent dans des territoires qui ne peuvent pas se circonscrire aux grandes villes. Ainsi, beaucoup de communes sont concernées, de près ou de loin, par la santé étudiante, « dans la mesure où de très nombreuses compétences qu’elles exercent jouent sur l’environnement et le cadre de vie, et donc sur la santé globale des habitants, dont étudiants et autres apprenants ».
Il y a quelques semaines, l’association des villes universitaires de France (Avuf) a publié un guide pratique intitulé « Prendre soin de nos étudiants » . Ce dernier constitue « une boîte à outils qui offre des solutions aux spécificités de chaque ville et intercommunalité » , comme l’indique Michaël Delafosse, maire de Montpellier et vice-président de l'Avuf, dans l’éditorial du guide.
Sur une cinquantaine de pages, des démarches et méthodes d’intervention de promotion de la santé en direction de la population étudiante sont présentées, ainsi que des exemples de dynamiques partenariales à mettre en place ou encore des actions concrètes menées par certaines collectivités.
Un enjeu local
43 % des étudiants présentaient des signes de détresse psychologique en 2021, selon l’Observatoire de la vie étudiante. Dans ce contexte, l’action des élus est « légitime » et « pertinente ». En effet, « l’élu local est en première ligne. (…) En réponse aux besoins repérés, l’élu local – le maire, ses adjoints, les conseillers municipaux – fort de cette connaissance des modes de vie, des équipements et services communaux, des actions de proximité, occupe une place privilégiée et dispose d’atouts pour agir » .
Les collectivités disposent de compétences et de leviers notamment au niveau des municipalités (culture, loisirs, développement économique, transports, aménagement du territoire, élaboration de politiques…). Elles peuvent aussi, comme le rappellent les auteurs du guide, « adapter l’offre de services aux besoins des étudiants, soutenir un mode de vie actif et soutenir la sécurité alimentaire ».
Les étudiants représentent en effet une population à part entière que les élus doivent prendre en compte. Il faut savoir notamment que « la précarité financière est une raison souvent invoquée par les étudiants pour expliquer l’adoption d’habitudes délétères pour la santé » et que 6 étudiants sur 10 déclarent s’être déjà sentis submergés par leur quotidien. « Parmi les particularités locales, la population estudiantine, la jeunesse en général, est une composante qui demande par sa force mais aussi ses fragilités, une attention particulière » , peut-on lire dans le guide.
Contrat local de santé
Le contrat local de santé (CLS) est la principale méthode d’intervention de promotion de la santé en direction de la population étudiante. C’est un outil qui, pour rappel, est prévu par la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) du 21 juillet 2009 et réaffirmé par la loi de Modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016. Ce contrat permet « la rencontre du projet porté par l'ARS et des aspirations des collectivités territoriales pour mettre en œuvre des actions, au plus près des populations ». Comme le souligne l’Avuf, son objectif principal est de répondre aux enjeux de santé sur les territoires.
Ainsi, « certains CLS peuvent être entièrement construits autour d’une population spécifique étudiante ou comporter un volet étudiant important » . La communauté d’agglomération Paris Saclay a par exemple élaboré un CLS « Jeunes et étudiants » afin notamment de créer un atelier de santé intercommunal dans les 4 quartiers prioritaires de l’agglomération et de faciliter plus largement le recours aux soins des étudiants et jeunes. La ville de Saint-Quentin a, elle, opté pour ajouter un volet « Étudiant » dans son CLS. Plusieurs actions ont été menées sur le campus universitaire mais aussi dans la ville avec un volet sport-santé et nutrition important.
Il est aussi conseillé dans le guide de mettre en place des actions avec une communication sur les réseaux sociaux importante avec, par exemple, le développement de campagnes de sensibilisation en ligne. Certaines idées très innovantes sont aussi à retrouver dans ce guide : à Bordeaux par exemple, un escape game virtuel a été développé pour aider les étudiants à mieux gérer leurs émotions.
Enfin, comme le souligne Catherine Vautrin, présidente de l’Avuf et désormais ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, « les villes jouent le rôle d’un véritable ministère de la proximité » . « Les événements spécifiquement étudiants, organisés par les établissements ou leurs associations font parfois l’objet de demande de soutien aux collectivités, qui sont autant d’occasions de proposer aux organisateurs des temps ou des espaces ciblés sur la santé. Mais les villes peuvent aussi organiser leurs propres démarches « aller vers », en déclinant des dispositifs conçus pour toute la population, à l’image de l’unité mobile de prévention à Montpellier, ou dans le cadre de leurs actions phare sur la vie étudiante » .
Le défi du renoncement aux soins
« Face au défi du renoncement aux soins de plus d’un tiers des étudiants, essentiellement pour des raisons financières » , les collectivités locales peuvent également agir.
Les centres de santé municipaux « lorsqu’ils existent, ou d’autres centres de santé, associatifs, mutualistes ou universitaires que les communes ou intercommunalités soutiennent, le plus souvent sur l’immobilier » peuvent être un levier pour les collectivités qui souhaitent remédier à ce problème qui ne touche pas uniquement les étudiants mais aussi de nombreuses personnes précaires ou vivant dans des déserts médicaux. Le document rappelle que « les centres de santé peuvent être choisis comme « médecin traitant » par les étudiants éloignés de leur domicile habituel ».
L’Atelier santé ville est aussi un outil « souple qui peut être directement géré par un service de la commune ou une structure permettant la coopération avec des partenaires tels qu’une association » à destination des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Autre possibilité : « les collectivités peuvent faciliter l’accès des étudiants aux soins de ville (après des médecins libéraux) dans le cadre d’interventions en soutien à des CPTS (Communautés professionnelles territoires de santé) en lien avec les ARS, ou à des réseaux de généralistes engagés. Ces réseaux créés jusqu’à présent par quelques universités permettent à leurs étudiants d’être mis en contact avec des médecins généralistes du territoire volontaires, acceptant de les recevoir dans les 48h de la demande, sans dépassement d’honoraire » .
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