Sécurité routière : des recommandations en faveur d'un meilleur partage de la route
Par Lucile Bonnin
En octobre 2024, un jeune cycliste était écrasé par un automobiliste après une altercation à Paris. Loin d’être un cas isolé, cet évènement tragique avait mis en lumière la nécessité – dans le contexte d’une diversification des modes de mobilités – de briser le tabou autour du sujet des comportements agressifs des usagers des routes.
François Durovray, alors ministre délégué chargé des Transports, avait annoncé dans la foulée le lancement d’une mission « contre les violences, (pour) protéger tous les usagers de la route », menée par Emmanuel Barbe, inspecteur général de l'administration, ancien délégué interministériel à la sécurité routière. Son rapport a été présenté officiellement hier et 40 recommandations y sont formulées.
L’auteur observe une « incompréhension mutuelle » entre les différents usagers des routes et préconise la mise en place de « véritables stratégies territoriales pour le développement de la voirie cyclable », l’adaptation et la simplification des règles, et l’accroissement de la formation et de la communication autour de la sécurité routière.
Les collectivités appelées à agir
Pour Emmanuel Barbe, « le développement d’infrastructures continues et de qualité est la clé d’un espace apaisé ». Ainsi, plusieurs recommandations du rapport visent à intensifier « les efforts de développement d’itinéraires cyclables doivent se poursuivre afin de permettre un partage sûr et apaisé de l’espace public ».
Pour aller dans ce sens, l’auteur de la mission indique qu’il faut redonner les moyens aux collectivités d’agir. Par conséquent, il recommande de « rétablir les montants prévus dans le deuxième plan vélo » dans les prochaines lois de finance. Pour mémoire, ce plan, lancé en mai 2023 par Élisabeth Borne, alors Première ministre, prévoyait 2 milliards d’euros sur 5 ans « pour les infrastructures, la sécurité et la formation à la pratique du vélo », avec l’objectif de « doubler le réseau cyclable d’ici 2030 » (lire Maire info du 9 mai 2023) mais a été, avec la crise budgétaire, « jeté aux oubliettes » (lire Maire info du 4 novembre 2024).
Le rapport encourage surtout les collectivités à être proactives, et dans certains cas à faire mieux. Par exemple, l’auteur recommande au ministère de l’Intérieur de rappeler l’obligation faite aux collectivités (loi d'orientation des mobilités dite LOM) de mettre au point des itinéraires cyclables lors de l’élaboration des documents de planification (plans locaux d’urbanisme, schémas de cohérence territoriale, etc.) et de faire « des délibérations qui prescrivent les réalisations et rénovations de voirie un acte transmissible au préfet et en contrôler la légalité ».
L’ancien délégué interministériel à la sécurité routière recommande même « d’introduire dans le Code de l’environnement une obligation de mettre au point un aménagement cyclable en cas de création ou de rénovation d’une voie interurbaine, en permettant, le cas échéant, au gestionnaire de prévoir des itinéraires alternatifs ou de prendre en compte ceux qui existent ».
Emmanuel Barbe identifie également comme une priorité d’assurer un suivi de la mise en œuvre des plans de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics (PAVE) par les collectivités territoriales. Pour rappel, les communes de plus de 1 000 habitants doivent adopter un plan de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics (PAVE) qui recense les obstacles existants, définit les actions correctives à mettre en place et fixe un calendrier de réalisation des travaux. L’auteur du rapport déplore le manque de suivi et de données concernant le respect de cette obligation.
Rappelons que l'AMF a tenu la semaine dernière une conférence de presse alertant sur la nécessité de repenser les financements consacrés à l’entretien du réseau routier (lire Maire info du 23 avril). Les élus locaux ont rappelé « avoir pleinement conscience de leur responsabilité en matière de sécurité routière, mais qu’ils doivent faire face à une absence de financement dédié pour entretenir correctement les quelque 700 000 km de routes dont ils ont la charge » et que cette situation fragilise leur capacité à garantir un réseau sûr et durable.
Former et communiquer
Au-delà des aménagements, le rapport insiste sur l’importance de la formation. Il préconise d’ailleurs en premier lieu de rendre les formations à l’apprentissage du vélo ou à la remise en selle éligibles au compte personnel de formation (CPF).
Sur le fameux dispositif Savoir rouler à vélo, Emmanuel Barbe pointe qu’il « rencontre des difficultés dans sa mise en œuvre » et « est encore loin de toucher chaque année l’entière classe d’âge ». Une évaluation est donc nécessaire selon lui, « pour mieux l’intégrer à l’ensemble du système d’éducation routière, qui devrait commencer dès le plus jeune âge ».
Côté communication, il est recommandé que l’État (DSR) puisse mettre à disposition des collectivités territoriales ou des associations sa production de communication sans le logo « sécurité routière, vivre ensemble » afin de permettre une meilleure diffusion de ses messages.
« La technologie est également un levier pour favoriser une meilleure cohabitation entre usagers dans l'espace public », pointe le rapporteur de la mission, qui préconise un « auto-signalement volontaire par les cyclistes roulant en pleine campagne aux applications de guidage routier pourrait faciliter la cohabitation sur la route et augmenter la sécurité ». De plus, « il est proposé que soit soutenue, au niveau européen, l’obligation pour les véhicules neufs vendus dans le futur de disposer d’une sonnette spéciale pour les piétons et les cyclistes ».
Plan pour le renforcement de la sécurité routière du transport scolaire
Cette même semaine, plusieurs annonces vont être formulées par le ministre auprès du ministre de l'Intérieur, François-Noël Buffet, et le ministre des Transports, Philippe Tabarot, concernant la sécurité routière. Les ministres vont présenter demain un plan pour le renforcement de la sécurité routière du transport scolaire.
Ces nouvelles mesures seront présentées quelques mois après un accident qui a eu lieu à Châteaudun en janvier, ayant coûté la vie à une lycéenne. « Les contrôles qui s’en sont suivis, ont notamment mis en évidence des cas préoccupants de conduite après usage de stupéfiants parmi les conducteurs de transports scolaires, peut-on lire dans le communiqué. Les enseignements tirés du terrain révèlent la nécessité de renforcer les actions existantes, notamment en matière de prévention, de formation, de suivi et de contrôle » pour protéger les 1,9 million d’élèves qui empruntent les transports scolaires chaque jour.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2

Douze importantes mesures de « simplification concrète » annoncées pour les collectivités
Blackout en Espagne et au Portugal : le revers de la médaille du « tout électrique »
La progression du bénévolat chez les plus jeunes se confirme
