Zones de revitalisation rurale : six mois de sursis pour 4 074 communes sortantes
Dans sa présentation du plan « Nos campagnes, territoires d’avenir », le 20 septembre à Eppe-Sauvage (Nord), le Premier ministre, Édouard Philippe, avait annoncé la prorogation du dispositif ZRR (Zones de revitalisation rurale) pour les 4 074 communes qui devaient en sortir au 30 juin 2020 (lire Maire info du 20 septembre). Mercredi 6 novembre, un amendement au projet de loi de finances pour 2020, porté par le député Daniel Labaronne (Indre-et-Loire, La République en marche), membre de la mission Agenda rural, et adopté par la commission des finances de l’Assemblée nationale, a validé l’engagement du chef du gouvernement. Pour ces 4 074 communes, comme les 14 000 autres classées en ZRR, la fin du dispositif prendra donc effet le 31 décembre 2020.
Et après ? Le scénario n’est pas encore écrit. Si le Premier ministre a promis que le zonage des ZRR serait totalement « redéfini » à partir de 2021, certains sénateurs s’inquiétaient, dans un rapport d’information présenté le mois dernier (lire Maire info du 17 octobre), de « l’extinction programmée du dispositif ». Créé en 1995, le classement en ZRR ouvre droit notamment à 17 mesures fiscales et deux mesures d’exonérations de charges sociales, pour un coût global de 313 millions d’euros en 2018, afin d’inciter les entreprises à s’implanter dans les territoires ruraux.
De quoi parle-t-on ?
Cet amendement anticipe une des conséquences de la réforme des modalités de classement en ZRR. Celle-ci prévoit que les deux critères clefs - une densité de population inférieure ou égale à 63 habitants / km² et un revenu fiscal par unité de consommation médian inférieur ou égal à 19 111 euros - ne seront plus analysés à l’échelon communal mais intercommunal « sans distinction entre les communes la composant, afin d’éviter les effets de concurrence au sein d’une même intercommunalité ».
Ce changement d’échelle, auquel Cécile Gallien, maire de Vorey (Haute-Loire) et vice-présidente de l’AMF est opposée (lire Maire info du 24 septembre 2018), a permis à 3 679 communes d’intégrer le dispositif. À l’inverse, 4 074 communes, parmi lesquelles 1 011 communes de montagne, se retrouvaient exclues du zonage. Et ce, alors que « 90 % de ces 4 074 communes sortantes remplissent le critère de densité actuellement en vigueur (63 hab/km2), soit plus de 3 700 communes », regrettaient, le mois dernier, les sénateurs Bernard Delcros (Cantal, Union centriste), Frédérique Espagnac (Pyrénées-Atlantiques, Parti socialiste) et Rémy Pointereau (Cher, Les Républicains).
Cette exclusion annoncée n’a, pour l’heure, jamais été suivie d’effet. Le législateur a mis en place, pour ces communes sortantes, « un dispositif de maintien des effets du classement en ZRR ». Celui-ci devait prendre fin le 30 juin 2020. Les députés ont finalement décidé de reporter l’échéance au 31 décembre 2020. « C’est logique et cohérent, favorable », a acquiescé Joël Giraud, député La République en marche des Hautes-Alpes et rapporteur général du PLF pour 2020. Lors d'un colloque organisé hier au Sénat, le président de la Chambre haute, Gérard Larcher, appelait à aller plus loin en prolongeant les mesures relatives aux ZRR « au moins jusqu'au 31 décembre 2021 ».
Flou artistique pour 2021
L’amendement aurait presque pu être voté sans débat. Avant que Thibault Bazin, député Les Républicains de Meurthe-et-Moselle, ne demande la parole. « C’est cohérent (…) Sauf que la question se pose après le 31 décembre 2020. Il va falloir que le gouvernement nous apporte des réponses assez rapidement parce qu’il y a plein d’interrogations sur un certain nombre de projets », a expliqué l’ancien maire de Rosières-aux-Salines. « L’idée étant ici de se laisser du temps (six mois supplémentaires, ndlr) pour engager une réflexion sur la géographie prioritaire, c’est-à-dire centrer les dispositifs vers les territoires ruraux qui en ont le plus besoin », lui a rétorqué Daniel Labaronne.
Invitée à réagir, Véronique Louwagie, députée Les Républicains de l’Orne et co-auteure en 2018 avec Anne Blanc (Aveyron, La République en marche) d’un rapport qui égratignait un dispositif « qui n’apportait pas satisfaction par rapport aux objectifs recherchés » (lire Maire info du 29 novembre 2018), a jugé « pertinent » le report de la sortie de ces 4 074 communes au 31 décembre 2020. « Il est important qu’en 2020, nous ayons une réflexion sur ces dispositifs ». Dans son rapport, la députée avait émis l’idée de « revoir les dispositifs de soutien des ZRR ». Mais devant le flot de « réactions » suscitées par ses conclusions, il lui paraissait « difficile de renoncer à l’ensemble des exonérations » parce qu’au « niveau des territoires, elles ont plus qu’un effet symbolique ».
Ludovic Galtier
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