La Cour des comptes propose de transformer les PETR en « EPCI élargis »
Par A.W.
Problèmes de gouvernance, absence de visibilité financière, mutualisations marginales… Dans un référé publié hier, la Cour des comptes fait un bilan assez sévère des pôles d’équilibre territorial et rural (PETR), créés en 2014 par la loi Maptam, après avoir fait l’analyse de 24 d’entre eux, présentant des caractéristiques de tailles et de missions différentes.
Des territoires « abusivement qualifiés de ruraux »
Avec l’objectif de « mieux prendre en compte le monde rural », cette catégorie d’établissement public devait permettre « une simplification » et « une plus grande efficacité dans la territorialisation des politiques publiques », ainsi qu’une meilleure « lisibilité de l'action publique » et de « la mutualisation des moyens ».
Huit ans après la création de ces établissements, leurs objectifs n’ont été que « très partiellement atteints », selon le Premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, pour qui ce dispositif n’apporterait que « peu » de choses « par rapport à celui des pays ».
Conçus initialement comme une contrepartie à la métropolisation, les PETR ont finalement bénéficié à des territoires qui ont été « abusivement qualifiés de ruraux », « les pôles recouvrant des réalités extrêmement hétérogènes et comprenant, pour la plupart, des villes moyennes et des territoires situés en périphérie d’agglomération ». L’Insee a d’ailleurs remis en cause, dans une étude récente, « la conception traditionnelle de la ruralité ayant présidé à la création des PETR », rappelle l’ancien commissaire européen.
En outre, si les 268 territoires de projet recensés en 2021 couvrent environ 60 % de l’aire métropolitaine et 45 % de la population française, leur répartition géographique est « très inégale » puisqu’ils se concentrent « dans le quart sud-ouest (Occitanie, Landes) et dans le quart nord-est (Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est) et, plus marginalement, dans les Hauts-de-France et en Bretagne ».
Nombreux défauts
Et le Premier président de la Cour d’énumérer toute une série de lacunes et de défauts.
De gouvernance, d’abord. Les innovations en la matière n’ont « pas atteint les objectifs escomptés » en terme de démocratie locale. Dans la moitié des PETR étudiés, la conférence des maires (en charge de l’expression démocratique) ne se réunit pas comme le prévoit la règlementation. Encore plus « défaillant », le conseil de développement (qui devait conférer un ancrage citoyen aux PETR) n’a pas été mis en place dans un quart des cas et, « quand il existe, il ne se réunit pas selon le rythme déterminé par les statuts ou le règlement intérieur » et n’est que « marginalement consulté ».
D’un point de vue financier, « l’absence de visibilité » est patente. Alors que les missions déléguées par les EPCI aux PETR doivent être définies par une convention territoriale, 23 des 24 PETR étudiés n’en ont signé aucune (à l’échelle nationale, l’ANPP confirme que seulement 10 % des PETR l’ont fait). Or, sans convention, « ni la durée, ni l’étendue, ni les conditions financières d’exercice des missions par le PETR ne sont clairement définies ». N’ayant « aucune visibilité » quant aux moyens dont ils disposeront au-delà de l’année en cours, deux PETR sur trois estiment que le niveau de contribution (de 4,1 euros par habitant en moyenne) est un « frein » au développement de leur action.
En ce qui concerne les mutualisations de service entre EPCI et PETR, celles-ci sont restées « marginales » et ces derniers n’ont « pas servi de cadre à l’élargissement du périmètre communal » escompté.
En outre, « sur les 24 PETR de l’échantillon, 13 ne disposaient d’aucun projet de territoire formalisé [et] quand il existe, il ne respecte généralement qu’imparfaitement les obligations de forme et de contenu », constatent les magistrats financiers, sans compter que « sur les 11 projets de territoires formalisés, seuls trois affichent des objectifs précis. Mais, aucun d’entre eux ne contient des indicateurs de suivi quantifiables ».
Vers des syndicats mixtes ouverts
Ce dispositif n’a, par ailleurs « pas permis la rationalisation des dispositifs contractuels », observe Pierre Moscovici qui regrette « un certain éclatement institutionnel ». Alors que « la faculté des PETR à faire vivre concrètement leur projet de territoire dépend de leur capacité à s’intégrer dans le maillage territorial existant », ils n’ont finalement été « qu’un acteur parmi d’autres dans le schéma de contractualisation » et « leur ancrage dépend aujourd’hui de la place que les autres acteurs territoriaux leur accordent ».
Les PETR n’ont ainsi « pas eu la place privilégiée qui leur était destinée » dans les contrats de ruralité, n’ont représenté qu’une part minime des contrats de relance et de transition écologique (CRTE) et n’ont été que faiblement associé dans les comités locaux de cohésion territoriale.
Devant ce constat, la Cour des comptes a formulé trois recommandations. Elle propose, d’abord, de « faire des PETR des syndicats mixtes ouverts permettant l’adhésion du département et de la région » et de les « transformer à moyen terme en EPCI élargis lorsque leur périmètre peut s’identifier à celui du bassin de vie ». Dans le cas contraire, « et lorsque le périmètre du PETR n’est pas pertinent », elle suggère d’« envisager le retour à une forme associative moins contraignante ».
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