Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 8 février 2023
Fiscalité locale

Résidences secondaires : l'extension de la majoration de taxe d'habitation reportée en 2024

Environ 4 000 nouvelles communes devaient profiter de cette extension dès cette année. Le gouvernement invoque, notamment, un nouveau zonage inadéquat et des effets pervers pour celles ayant institué la taxe d'habitation sur les logements vacants.

Par A.W.

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Les 4 000 communes supplémentaires censées pouvoir majorer la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, dès cette année, devront finalement encore patienter. « Lasse », l'Association nationale des élus du littoral (Anel) a fait part, hier, de son agacement sur Twitter, après l’annonce du gouvernement de reporter la publication du décret d’application visant à instaurer cette mesure inscrite dans la loi de finances pour 2023. Une disposition particulièrement attendue par les élus des communes touristiques, confrontés aux difficultés croissantes de leurs habitants à se loger. 

Décalage en 2024, sans « mesure transitoire » 

Conséquence, et contrairement à ce qui était prévu initialement, les communes bénéficiaires de ce dispositif – dont la liste doit être établie par décret – devront encore attendre une année de plus.

« Nous avons lancé les travaux d’élaboration du décret dès le mois de décembre et les concertations sont en cours avec les associations d’élus », s’est justifié, hier, dans l’hémicycle, le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, en réponse à une question du député de Charente-Maritime Christophe Plassard (Horizons). 

Dans ce contexte, le décret ne sera pris que « d’ici à la fin du printemps », les communes concernées ne pourront ainsi délibérer sur cette surtaxe – pouvant aller jusqu’à 60 % – qu’« à compter des impositions de l’année prochaine ». Celles de 2024 donc, puisque la loi de finances pour 2023 ne permet pas de délibérer au-delà de la date-butoir du 28 février, à titre dérogatoire, pour les impôts de l’année 2023. Les communes bénéficiaires qui souhaitent appliquer cette surtaxe en 2024 devront finalement délibérer « avant le 1er octobre »  prochain.

Pour rappel, ce sont les communes touristiques situées principalement sur les façades atlantique et méditerranéenne, mais aussi celles situées en Corse et dans les zones de montagne qui profiteront de l'extension du dispositif. 

Pour cela, les députés de la majorité avaient élargi, lors de la discussion budgétaire, le périmètre des « zones tendues »  aux communes qui, sans appartenir à une zone d’agglomération continue de plus de 50 000 habitants (comme c’était le cas jusqu’à présent), sont confrontées à « une attrition »  des logements disponibles pour l’habitation principale. Cela « en appréciant la tension immobilière à partir des prix élevés à l’achat et à la location, ainsi que de la proportion élevée de résidences secondaires par rapport à l’ensemble du parc de logements », expliquaient-ils dans leur amendement

Aucune « mesure transitoire »  d’aide à ces communes, réclamée par le député de la Charente-Maritime, n’a été évoquée par le ministre.

Zonage « pas adéquat »  et « délai de prévenance » 

Pourquoi un tel délai alors que les élus locaux estiment qu’il y a « urgence »  à agir au vu des importantes tensions qui existent sur le marché local du logement ?

Le ministre des Comptes publics argue, d’abord, de la nécessité de « poursuivre les échanges »  sur le périmètre du zonage retenu par le gouvernement, « plusieurs élus »  ayant fait part de leurs « inquiétudes fortes »  en jugeant que ce zonage « ne traite pas de façon adéquate certaines parties du territoire ». « Mais nul ne dispose d’études ou d’évaluation sur les scenarii sinon les services de l’État eux-mêmes », lui oppose le président de l’Anel, Yannick Moreau, dans un communiqué. 

« C’est aussi parce que l’établissement de ce zonage a des conséquences », a également expliqué Gabriel Attal, soulignant qu’« une partie des communes perdront la taxe d’habitation sur les locaux vacants car le zonage est ainsi fait que les deux taxes ne peuvent être perçues simultanément sur une même zone – c’est l’une ou l’autre –, et nous voulons éviter qu’il y ait finalement des communes perdantes ». « Mais qui a prévu cette disposition de non-cumul des taxes, sinon le gouvernement ? », rétorque le maire DVD des Sables d’Olonne.

De son côté, l’AMF a évalué que « certaines communes, en particulier celles d’outre-mer, où la vacance est très importante, [aurait] perd[u] plus d’un voire deux millions d’euros de ressources pour l’année 2023 », si le décret était resté en l’état. Dans ce cadre, et contrairement à l’Anel, elle juge donc « nécessaire »  cette « période de concertation »  supplémentaire pour réécrire le décret et l’article de la loi de finances pour 2023, afin de « désolidariser la fiscalité sur la vacance et la taxe d’habitation sur les résidences secondaires ».

Pour rappel, en 2012, lors du premier élargissement du zonage de tension, les parlementaires avaient anticipé les effets de bord et avaient voté une compensation pour les communes et EPCI perdants de la réforme. Cette compensation n’a pas été votée pour l’élargissement décidé en 2023.

Le ministre des Comptes publics a, par ailleurs, estimé qu’« une sorte de délai de prévenance »  devait être accordée aux propriétaires avant que cette imposition s’applique, l'objectif étant de « créer un effet incitatif ». 

« Seul levier fiscal »  pour financer les logements permanents

« Majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires est le seul levier de fiscalité locale qui reste aux communes pour financer une politique volontariste en faveur des résidents permanents »  et « créer davantage de logements »  dédiés, explique ainsi le président de l’Anel qui dénonce un « rétropédalage »  de l’exécutif.

« L'Etat et le gouvernement doivent nous aider à réduire les écarts de rentabilité et de fiscalité entre locations touristiques et locations à l'année. C'est un enjeu majeur pour nos communes littorales », affirme Yannick Moreau, qui appelle ainsi ce dernier à « respecter et à appliquer la loi de finances pour 2023 »  et à « prendre le décret nécessaire », qui porterait « a minima sur une liste consensuelle de communes en attente de la liberté de voter une taxe d’habitation majorée ».

De son côté, Christophe Plassard a rappelé que l’extension du dispositif offrirait « une marge de manœuvre pour équilibrer les comptes »  des communes concernées, « mais aussi et surtout [elle permettrait de] faciliter l’offre de logements saisonniers ».
 

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