Réforme de la taxe d'habitation : le Conseil constitutionnel revient sur la compensation au titre des contributions fiscalisées
Par A.W.
Le gouvernement va devoir revoir son mécanisme de compensation de la taxe d’habitation destiné aux collectivités. Au moins en partie. C’est ce qu’ont décidé, hier, les Sages de la rue de Montpensier après avoir été saisis, au mois de décembre dernier, d’une question de constitutionnalité (QPC) portant sur la compensation attribuée aux communes membres d’un syndicat de communes.
Environ 2 350 communes concernées
A l’origine de cette QPC, la commune de La Trinité, dans les Alpes-Maritimes, reprochait aux dispositions inscrites dans la loi de finances pour 2020, et instituant la suppression de la taxe d’habitation, de ne « pas compenser intégralement la perte de ressources induite » par la réforme dans le cas de certaines communes membres d'un syndicat de communes. En cause, l’absence de prise en compte dans le calcul de la compensation de « la part de taxe d’habitation directement perçu[e] » par ces syndicats.
Pour bien saisir l’argumentaire de la commune, il faut rappeler que le financement d’un syndicat de communes peut se faire de deux manières : soit via une dotation budgétaire de la commune associée, soit via l’affectation d’une part du produit des impôts locaux, la taxe d’habitation étant concernée.
Or, dans ce dernier cas, si le mécanisme de compensation prend bien en compte le produit de la taxe d'habitation perçu par les communes, ce n’est pas le cas de la part affectée directement au syndicat de communes, lorsqu’il en a été décidé ainsi (et non dans le cas d’une dotation).
Concrètement, ce sont environ 2 350 communes qui seraient concernées et sur le territoire desquelles un produit syndical de taxe d’habitation a été prélevé en 2017 (année sur laquelle se fonde le calcul de la compensation, pour ce qui est du taux), selon les chiffres communiqués hier soir par le gouvernement.
Le Conseil constitutionnel ajoute cependant que « les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans leur rédaction contestée, ne sont plus en vigueur » et que « la déclaration d'inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances introduites à la date de publication de la présente décision et non jugées définitivement ».
Méconnaissance du principe d'égalité
Pour la commune de La Trinité, il ne fait ainsi pas de doute qu’il y a « une différence de traitement injustifiée entre les communes [situées dans ce cas de figure] et les autres », celle-ci dénonçant notamment une méconnaissance du principe d’égalité devant la charge publique.
Les membres du Conseil constitutionnel ont suivi cette analyse et estimé que ces dispositions étaient bien « contraires au principe d’égalité devant les charges publiques » puisqu’elles privent les communes finançant leur syndicat à travers une part de taxe d’habitation d’une « compensation intégrale ».
D’autant plus que ces communes devaient jusqu’à présent financer leur syndicat soit en débloquant de nouvelles ressources (une dotation budgétaire), soit en augmentant leurs autres impôts locaux, « en méconnaissance pour ces communes et pour leurs contribuables de l’objectif poursuivi par le législateur », expliquent les Sages.
Le gouvernement en « tirera les conséquences »
Dans un communiqué publié hier soir, le gouvernement précise, en reprenant les conclusions du Conseil constitutionnel, que « cette déclaration d’inconstitutionnalité ne peut être invoquée que dans les instances introduites à la date de publication de la décision et non jugées définitivement ».
Il fait, par ailleurs, savoir qu’il « tirera les conséquences » de cette décision en proposant « des modalités de prise en compte de la compensation » pour les 2 350 communes concernées.
Dans un communiqué publié hier sur son site, la ville de La Trinité pointe le fait que « la session parlementaire est terminée » et estime qu’il faudra attendre « plusieurs mois pour obtenir cette correction impérative qui engage les futurs parlementaires ». Citant les « services du Premier ministre », le maire de la commune Ladislas Polski chiffre cette non-compensation à « 73,5 millions d’euros » à l’échelle nationale.
De leur côté, les services de la ville ont estimé « le manque à gagner » à « près de 800 000 euros dès 2021 et plus de 1,1 million d’euros à l’horizon 2023 », celui-ci ayant entraîné « une hausse automatique […] de la taxe foncière sur les propriétés bâties dès 2021 » pour les contribuables de la commune. Ce qui lui fait dire que « la suppression de la taxe d’habitation n’est donc pas compensée à l’euro près comme le président de la République s’y était engagé ».
Bien que le Conseil constitutionnel ait clairement affirmé le contraire dans sa décision, le gouvernement persiste et certifie, dans sa réponse, que la refonte de la fiscalité locale a bien été « neutre pour les collectivités territoriales », puisqu’elle reposerait sur... « une compensation intégrale, pérenne et dynamique pour chaque commune ».
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