Proposition de loi sur la maltraitance animale : des mesures qui pourraient être coûteuses pour les communes
Une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale le 14 décembre, examinée en séance publique le 26 janvier. Ce délai a de quoi surprendre, quand on connaît l’extrême embouteillage législatif – et quand on sait que la probabilité de voir débattu le projet de loi 4D sur la décentralisation avant la fin du quinquennat approche aujourd’hui de zéro. Si le gouvernement a bien dû « caser » cette semaine son projet de loi sur la prorogation de l’état d’urgence sanitaire, il n’était pas forcément attendu que la proposition de loi sur la maltraitance animale soit considérée comme une telle priorité. C’est pourtant le cas : le texte sera examiné demain en commission des affaires économiques, et sera débattu en séance publique mardi prochain.
« Préoccupation majeure des Français »
Ce texte, signé par une grande partie des députés LaREM, MoDem et Agir ensemble, part du constat que « la question de la condition animale est devenue une préoccupation majeure des Français ». Il s’agit, d’une part, d’inscrire dans les lois les décisions annoncées en septembre par le gouvernement sur les cirques avec animaux et les delphinariums (lire Maire info du 29 septembre) ; et, d’autre part, de prendre un certain nombre de mesures concernant les animaux domestiques ou errants, l’adoption et la détention d’animaux, ainsi que les trafics.
Stérilisation obligatoire des chats errants aux frais des communes
Plusieurs mesures, notamment dans le premier chapitre de la proposition de loi, concernent directement les maires. Premièrement, l’article 2 étend aux policiers municipaux et aux gardes champêtres un certain nombre de prérogatives prévues par le Code rural et de la pêche maritime : pour améliorer l’identification des animaux domestiques, la compétence de contrôle de l’identification des animaux domestiques serait étendue aux policiers municipaux et gardes champêtres.
L’article 3 vise à réformer le régime applicable aux fourrières et refuges pour chiens et chats errants. Jusqu’à présent, le Code rural et de la pêche maritime dispose que chaque commune doit disposer d’une telle fourrière ou « du service d'une fourrière établie sur le territoire d'une autre commune » (article L211-24). Le texte propose de supprimer cette dernière nuance : la fourrière (ou le refuge) deviendrait donc obligatoire dans chaque commune « ou chaque EPCI ». La façon dont s’entendra ce « ou » sera certainement débattue en commission. Un amendement a d’ores et déjà été déposé pour proposer d’ajouter qu’il reviendrait aux EPCI d’abriter une fourrière « lorsqu’ils exercent cette compétence en lieu et place de la commune ».
Un autre article de la proposition de loi va certainement susciter encore plus de débats : l’article 4 rendrait obligatoire la stérilisation des chats errants par les communes, alors que jusqu’à présent, celle-ci n’était qu’une possibilité, décidée par arrêté du maire (article L211-27 du CRPM). La stérilisation d’un chat ayant un coût moyen de 70 euros pour un mâle et 130 euros pour une femelle, cette nouvelle obligation pourrait représenter une charge importante pour les communes, que le projet de loi ne prévoit nullement de compenser. Là encore, un amendement a été déposé pour adoucir le dispositif, prévoyant que « des dérogations soient accordées aux communes qui le demandent, en considération de la taille et des moyens financiers » de celles-ci. Un autre amendement demande que la généralisation de cette mesure fasse l'objet de « précisions par décret » : « Afin que l'obligation de stérilisation des chats errants par les communes puisse être appliquée efficacement, il convient de préciser la fréquence à laquelle les maires devront l'honorer, si les communes de toutes tailles sont également concernées, quel indicateurs permettront de mesurer le respect de l'obligation, etc. ».
Fin programmée pour les cirques itinérants avec animaux
Le reste du texte concerne moins directement les élus. Il concerne les ventes d’animaux ou le durcissement des sanctions pour maltraitance. Le troisième chapitre du texte met en musique les annonces de Barbara Pompili sur les animaux détenus en captivité « à des fins de divertissement », en particulier les animaux des cirques itinérants. Comme prévu, les mesures vont être installées de façon progressive : pour commencer, il sera interdit – avant la fin programmée, à terme, des cirques avec animaux – de « détenir, d’acquérir et de faire se reproduire », « en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants », les animaux figurant sur une liste déterminée par le ministère de la Transition écologique. Les autorisations d’ouvertures ne seraient plus délivrées aux établissements qui ne respecteraient pas ces mesures.
De même, la détention en captivité des cétacés serait désormais interdite en dehors des établissements « ayant pour finalité de prodiguer des soins aux animaux blessés (…) ou affaiblis ». Cette dernière disposition entrerait en vigueur « sept ans » après la promulgation de la loi (donc a priori en 2028), sauf pour les orques (2023).
Le texte prévoit aussi l’interdiction de « présenter » les animaux figurant sur une liste établie par le ministère, « en discothèque ou lors d’événements festifs » ou encore lors d’émissions de télévision. L’utilisation de loups et d’ours dans des spectacles itinérants serait également interdite, d’ici 2026.
Franck Lemarc
Télécharger la proposition de loi.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
Brutal clap de fin pour les cirques avec animaux et les delphinariums (29/09/2020)