Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 4 novembre 2021
Crise sanitaire

Projet de loi Vigilance sanitaire : les personnels administratifs des crèches seront exclus de l'obligation vaccinale

Le projet de loi Vigilance sanitaire est revenu, hier, devant l'Assemblée nationale, qui a presque entièrement gommé les modifications apportées par le Sénat, pour adopter un texte quasi similaire à celui présenté, à l'origine, par le gouvernement. À l'exception de l'importante question de l'obligation vaccinale dans les établissements d'accueil du jeune enfant.

Par Franck Lemarc

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Retour à la case départ. C’est ce qui peut se produire lorsque le Sénat et l’Assemblée nationale échouent à trouver un compromis : le travail d’amélioration du Sénat est alors réduit à néant, puisque c’est l’Assemblée qui a le dernier mot. 

C’est ce qui est arrivé hier, après l’échec de la CMP (commission mixte paritaire) sur le texte permettant de prolonger l’usage du pass sanitaire au-delà du 15 novembre (lire Maire info d’hier). Dès la réunion de la commission des lois, qui a planché sur le dernier texte voté par le Sénat, la messe était dite : les articles ajoutés par le Sénat qui mettaient en place une territorialisation du pass sanitaire et limitait la prorogation de son usage au 28 février ont été supprimés.

Retour aux mesures initiales

Les députés sont donc revenus, en commission puis en séance, à la volonté initiale du gouvernement : « l’arsenal sanitaire », c’est-à-dire la possibilité pour le gouvernement de prendre des mesures telles que le couvre-feu, le confinement, ou de subordonner l’accès à certains lieux publics à la présentation d’un pass sanitaire, sera prolongé jusqu’au 31 juillet, c’est-à-dire bien au-delà des élections présidentielle et législatives. Les députés ont conservé la seule concession faite, dès la première lecture : écrire dans le texte que la prolongation ou le retour du pass sanitaire serait apprécié « en tenant compte des indicateurs sanitaires tels que le taux de vaccination, le taux de positivité des tests de dépistage, le taux d’incidence ou le taux de saturation des lits de réanimation ». Mais sans préciser lesquels. 

Autre concession, assez formelle : le gouvernement devra remettre au Parlement, « au plus tard le 15 février 2022 », un rapport « exposant les mesures prises et précisant leur impact sur les indicateurs sanitaires ». Ce rapport devra indiquer « les raisons du maintien, le cas échéant, de certaines des mesures prises sur tout ou partie du territoire national ». Un second rapport du même type devra être rendu avant le 15 mai 2022. 

Les députés ont également rétabli le très contesté article 4 ter, qui permet aux directeurs d’écoles d’avoir accès « aux informations relatives au statut virologique des élèves, à l’existence de contacts avec des personnes contaminées et à leur statut vaccinal ». Regardée par beaucoup comme une grave atteinte au secret médical, cette disposition avait provoqué d’âpres débats à l’Assemblée comme au Sénat. 

Concernant le retour des règles dérogatoires en matière de réunions des organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs groupements, le Sénat avait entièrement récrit le texte, d’une part en mettant fin à ces règles dérogatoires le 28 février 2022, mais d’autre part en écrivant les règles de façon beaucoup plus précise. Les députés ont supprimé ces ajouts, et sont revenus à la rédaction d’origine : l’ordonnance du 1er avril 2020 visant à assurer la continuité du fonctionnement des institutions locales et de l’exercice des compétences des collectivités territoriales et des établissements publics locaux afin de faire face à l’épidémie reprendra effet à compter de la promulgation de la loi et jusqu’au 31 juillet 2022.

Obligation vaccinale dans les EAJE

En revanche, une disposition issue du Sénat a été, en partie, sauvegardée, et elle est d’une grande importance pour les élus locaux. Elle a trait à l’obligation vaccinale dans les crèches et en général dans les EAJE (établissements d’accueil du jeune enfant). 

Rappelons que la semaine dernière, le Conseil d’État a finalement décidé que l’obligation vaccinale, contrairement à ce que défendait jusqu’ici le gouvernement et les administrations centrales, était applicable aux crèches, non seulement pour les professionnels de santé mais également pour « les personnes travaillant à leurs côtés » (lire Maire info du 28 octobre). Cette décision s’apparentait à une petite bombe, dans la mesure où, depuis le mois d’août, la DGCS et la DGCL avaient constamment soutenu le contraire. 

Le Sénat avait demandé à ce que ce point soit éclairci dans la loi. Finalement, les députés, en commission des lois, l’ont accepté, mais ont choisi une solution de compromis : oui à l’obligation pour les personnels de santé, non à celle-ci pour les autres personnels. 

L’amendement présenté par le rapporteur du texte, Jean-Pierre Pont (LaREM, Pas-de-Calais) est ainsi rédigé : « L’obligation vaccinale (…) n’est applicable, dans les établissements d’accueil du jeune enfant, les établissements et services de soutien à la parentalité et les établissements et services de protection de l’enfance situés hors des [établissements de santé], qu’aux professionnels et personnes dont l’activité comprend l’exercice effectif d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins attachés à leur statut ou à leur titre. » 

D’une part, l’amendement étend donc la disposition, au-delà des crèches, aux lieux de soutien à la parentalité et de protection de l’enfance. D’autre part, il précise que l’obligation vaccinale ne s’applique pas non seulement aux personnels qui ne sont pas des professionnels de santé, mais également aux professionnels de santé « qui ne réalisent aucune activité médicale », explique Jean-Pierre Pont en annexe de son amendement. 

Le texte ainsi modifié a été adopté par l’Assemblée nationale dans la nuit, par 147 voix contre 125. Il va maintenant formellement revenir dans le Sénat et, une dernière fois, à l’Assemblée demain, pour être définitivement adopté. Il n’est pas impossible, vu l’opposition frontale du Sénat, que les sénateurs demandent ensuite l’arbitrage du Conseil constitutionnel, ce qui retarderait sa promulgation. Quoi qu’il en soit, le gouvernement souhaite que le texte soit promulgué avant le 15 novembre, date à laquelle le pass sanitaire ne pourra légalement plus être exigé, si un nouveau texte n’est pas publié d’ici là. 

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