Service public de la petite enfance : enfin un décret d'application !
Par Franck Lemarc

Depuis la loi pour le plein emploi du 18 décembre 2023, il a été créé un service public de la petite enfance (SPPE) dont les communes sont les autorités organisatrices. Ces dispositions sont entrées en vigueur au 1er janvier dernier, avec les obligations nouvelles qui y sont rattachées… mais sans que les décrets d’application prévus par la loi soient sortis.
Un premier décret d'application de l'article 17 est enfin sorti, vendredi dernier. Il concerne les schémas pluriannuels de maintien et de développement de l’offre d’accueil du jeune enfant, dont l’élaboration a été rendue obligatoire pour les communes de plus de 10 000 habitants.
Ce que dit la loi
Pour mémoire, la loi du 18 décembre 2023 a créé de nouvelles compétences obligatoires : pour toutes les communes, le recensement des besoins des enfants âgés de moins de trois ans et de leurs familles en matière de services aux familles, ainsi que l’information et l’accompagnement des familles. Pour les communes de plus de 3 500 habitants, la planification du développement des modes d’accueil et le soutien à la qualité des modes d’accueil.
Par ailleurs, dans les seules communes de plus de 10 000 habitants, la loi crée l’obligation d’établir et mettre en œuvre un schéma pluriannuel de maintien et de développement de l'offre d'accueil. Celui-ci doit être « établi et périodiquement actualisé » par l’autorité organisatrice, et son contenu doit être « compatible avec celui du schéma départemental des services aux familles ». Il doit notamment prévoir « les modalités de développement quantitatif et qualitatif ou de redéploiement des équipements et services d'accueil du jeune enfant ainsi que le calendrier de réalisation et le coût prévisionnel des opérations projetées ».
Pour le reste, la loi renvoyait à un décret le contenu de ce schéma et « les modalités de la concertation préalable ». C’est ce décret qui est paru vendredi 21 mars.
Retour aux dispositions initiales
Ce décret détaille en effet le contenu du schéma pluriannuel. Celui-ci doit répertorier « les équipements, les services et les modes d’accueil existants », préciser les besoins des enfants de moins de trois ans et de leurs familles, identifier les zones où l’offre est « insuffisante ». Par ailleurs, il définit des « orientations pluriannuelles de maintien et de développement de l'offre », tenant compte notamment des insuffisances d’offres identifiées. Il s’agira de clairement identifier les objectifs, les besoins humains, les actions à mener pour répondre aux « difficultés spécifiques », les investissements nécessaires, les coûts prévisionnels, ainsi qu’un calendrier prévisionnel. Les communes devront enfin définir des indicateurs permettant d’évaluer la réalisation des opérations prévues.
Il est à noter que ces orientations peuvent porter sur « l’ensemble des services aux familles », y compris « les services de soutien à la parentalité ». Le mot « peuvent » est important : le soutien à la parentalité n’est pas obligatoire, contrairement à ce que souhaitait initialement le gouvernement. L’AMF s’était alors élevée contre une disposition qui allait au-delà de la loi, celle-ci ne mentionnant que « l’offre d’accueil du jeune enfant » et n’incluant pas le soutien à la parentalité.
De même, l’AMF aura toutes les raisons de se féliciter de la disparition de toute mention aux conventions conclues entre les communes et la CAF ou la MSA (conventions territoriales globales ou CTG). En effet, dans la première version du projet de décret présenté aux élus en Conseil national d’évaluation des normes, plusieurs dispositions à ce sujet étaient prévues, dans le but, expliquait alors le gouvernement, « d’apporter des réponses sur certaines dispositions des CTG jugées insuffisamment précises ». Or la loi du 18 décembre 2023 est claire : les communes qui ont déjà conclu une convention avec la CAF ou la MSA sont « dispensées » d’élaborer le schéma pluriannuel prévu par la loi. L’AMF souhaitait que l’on s’en tienne là, et c’est ce qui semble être le cas.
Compensation insuffisante
Reste la question du financement de ces obligations nouvelles – point qui n’est pas abordé dans ce décret. L’AMF a relevé, lors de l’examen du projet de décret au Cnen, que l’enveloppe prévue par le gouvernement dans la loi de finances pour 2025 pour compenser les dépenses liées à cette compétence nouvelle (86 millions d’euros) sera largement insuffisante. D’abord, les communes de moins de 3 500 habitants ne feront l’objet d’aucune compensation – bien qu’elles récupèrent deux compétences nouvelles –, pas plus que les intercommunalités. Ensuite, l’AMF a calculé que la compensation moyenne, sur la base de cette enveloppe, qui sera octroyée aux communes de plus de 3 500 habitants s’élèvera à environ 26 000 euros en moyenne, ce qui paraît bien en-deçà des dépenses qui seront réellement engagées.
Pour en savoir plus, il faudra de toute façon attendre un prochain décret, qui devrait être publié en juin. Celui précisera les modalités de calcul de la compensation financière, et un arrêté de répartition entre toutes les communes concernées devrait suivre, en juillet.
Entretemps, sans doute dès ce début de semaine, va paraître un autre décret d’application, cette fois consacré à l’avis préalable que les gestionnaires privés doivent demander au maire avant d’ouvrir une structure nouvelle.
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