Maire-info
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Édition du jeudi 20 mai 2021
Petite enfance

Accueil du jeune enfant : une ordonnance qui impacte l'organisation et la gouvernance des structures

Baptisée ordonnance « relative aux services aux familles », c'est une ordonnance importante en matière de petite enfance qui a été publiée ce matin au Journal officiel.

Par Franck Lemarc

C’est la loi d’accélération et de simplification de l’action publique du 7 décembre 2020 qui prévoyait, à l’article 99, de permettre au gouvernement de prendre une ordonnance pour « faciliter l'implantation, le maintien et le développement de services aux familles, notamment en matière d'accueil du jeune enfant et de soutien à la parentalité ». Alors que la crise épidémique a rendu « encore plus nécessaires et urgents »  la préservation et le renforcement des modes d’accueil pour les enfants de moins de trois ans, explique le ministre de la Santé dans le rapport qui accompagne l’ordonnance, l’ordonnance répond à plusieurs objectifs. Au premier rang desquels, la « clarification du cadre normatif ». Comme les représentants du ministre l’avaient souligné devant le Conseil national d’évaluation des normes, le 14 janvier dernier, « le constat a été dressé d’une trop grande complexité des règles applicables à l’accueil du jeune enfant pour les destinataires de la norme, que ce soit pour les parents ou pour les gestionnaires, et notamment les collectivités territoriales, mais également pour les porteurs de projets. » 

« Unité »  des modes d’accueil

L’article 1er de l’ordonnance permet de reconnaître légalement la place des « services aux familles », au côté des aides financières. Il est donc intégré au Code de l’action sociale et des familles le fait de « proposer des aides aux familles visant à répondre à leurs besoins », aides « qui comprennent notamment les modes d’accueil du jeune enfant et les services de soutien à la parentalité ».
Le texte permet aussi « d’unifier »  les services aux familles, qualifiés aujourd’hui par le ministre « d’ensemble divers et sans unité ». L’ordonnance dispose que les établissements, les assistants maternels et la garde d’enfants à domicile (dont les règles sont dispersées dans trois Codes différents) sont « trois modalités d’un même service aux familles ». Tous ces services auront désormais des objectifs communs, qui seront définis dans une « charte nationale pour l’accueil du jeune enfant », qui s’appliquera à « l’ensemble des professionnels et bénévoles assurant l’accueil du jeune enfant ». 
L’article 2 du texte précise que les personnes responsables de l’accueil scolaire et périscolaire de jeunes enfants doivent « veiller à garantir, notamment dans le cadre du projet éducatif territorial (…), l'organisation des transitions de l'enfant entre les différents services conformément à l'intérêt de celui-ci ». 
L’ordonnance remplace également les relais assistants maternels, créés par la loi de 2005, par des « relais petite enfance », dont l’activité sera ouverte aux professionnels de la garde d’enfants à domicile. Ces relais seront « des points de référence et sources d'information pour les parents et les professionnels sur l'ensemble des modes d'accueil, y compris la garde d'enfants à domicile », est-il détaillé dans le rapport, et permettront de « décliner localement le principe d’unité des différents modes d’accueil ». 
L’ordonnance modifie également en profondeur le cadre législatif applicable aux assistants maternels (articles 3 à 5). 


Gouvernance des politiques locales

L’un des points essentiels de l’ordonnance, du point de vue des collectivités, est, à l’article 2 toujours, la profonde révision de la gouvernance des politiques locales d’accueil du jeune enfant. Les commissions départementales de l’accueil du jeune enfant sont supprimées, et remplacées par des « comités départementaux des services aux familles », qui s’appuieront sur « l’analyse des besoins pluriels des familles et des territoires », dixit le rapport. Comme les commissions précédentes, ces instances seront pilotées par les préfets et co-présidées par les présidents du conseil départemental et les associations départementales de maires. Signalons que l’ordonnance prévoit que chaque comité départemental de l’accueil du jeune enfant aura pour vice-présidents le président du conseil départemental, « un représentant des communes et intercommunalités »  et le président du conseil d’administration de la CAF. Les modalités et compétences de ces comités seront fixées par décret. 
Associée aux travaux, l’AMF a insisté sur la nécessité de mieux associer les élus à la gouvernance des politiques d’accueil du jeune enfant compte tenu du fait que les communes et intercommunalités sont les principaux gestionnaires des structures dédiées à la petite enfance. De manière plus large, lors de la concertation, l’AMF a fait valoir le fort besoin de simplifier le cadre normatif existant tout en respectant l’intérêt supérieur de l’enfant. À titre d’exemple, l’AMF n’a pas souhaité que la pénurie de professionnels formés pour travailler en EAJE se traduise par une baisse des exigences de qualification.

Expérimentation

Enfin, parmi d’autres dispositions, l’ordonnance permet le lancement d’une expérimentation intéressant directement les collectivités. Pendant les cinq prochaines années, les départements, les communes, les intercommunalités et la CAF pourront signer des « conventions de coopération »  en matière de services aux familles. Cette disposition vise, souligne le rapport, à « favoriser le maintien et le développement local des services aux familles ». L’ordonnance prévoit la possibilité d’une délégation de la compétence d’autorisation ou d’agrément – qui appartient au président du conseil départemental – vers un autre acteur, « en particulier la CAF ». 
Les représentants des élus au Cnen se sont également inquiétés de cette possibilité ouverte « pour la CAF, d’organiser un guichet administratif unique, lui permettant ainsi de prendre au nom des autorités compétentes en matière de services aux familles tout ou partie des actes relatifs à des services aux familles en matière d’agrément, d’autorisation ou de financement. » 
Cette expérimentation fera l’objet d’un rapport dans quatre ans. 


Télécharger le rapport et l’ordonnance.

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