Vieillissement de la population : un défi pour l'accompagnement des personnes âgées dépendantesÂ
Par Marie Lavezzi
La population française vieillit, ce qui aura de lourdes charges sur la prise en charge de la dépendance dans les décennies à venir. Dans une étude récemment publiée, l’Insee estime que le pays pourrait compter « 700 000 seniors en perte d’autonomie supplémentaire » d’ici 2052, inégalement répartis sur le territoire.
Accentuation des conséquences du vieillissement de la population
En 2021, la France comptait 2 millions de seniors en perte d’autonomie parmi les 18 millions de personnes de plus de 60 ans. Parmi les personnes âgées dépendantes, 41,8 % d'entre elles avaient plus de 85 ans.
D’ici à 2052, si l’on se réfère au scénario médian envisagé par l’étude de l’Insee, les effectifs des seniors augmenteraient mécaniquement (+ 5 millions) tout comme leur âge moyen, qui basculerait de 72,4 à 75,1 ans. Ce phénomène s’explique par l’arrivée dans le grand âge des générations du baby boom (personnes nées entre 1946-1974).
De fait, en 2052, et malgré une espérance de vie en bonne santé qui devrait augmenter, le nombre de seniors subissant une perte d’autonomie augmenterait de 700 000 personnes (+ 36 %), tout comme ceux touchés par une perte d’autonomie sévère, c’est-à-dire une altération des facultés mentales nécessitant une surveillance constante. Leur nombre augmenterait de 45 %, soit 300 000 personnes supplémentaires.
Des différences entre les départements
Cependant, cette évolution démographique n’interviendra pas de manière linéaire en France. En effet, « le pic de seniors en perte d’autonomie ne serait pas atteint la même année selon les territoires », assure l’Insee. 55 départements l’atteindraient avant 2050 (essentiellement dans le nord-est et le centre du pays) quand d’autres l’atteindraient en 2060 (plutôt dans le sud, l’ouest et la région parisienne), voire 2070 (Mayotte, Guyane, Haute-Corse).
Cette projection hétérogène s’explique par plusieurs facteurs: des pyramides des âges différentes entre les départements, des catégories socioprofessionnelles plus ou moins représentées, ce qui induit une exposition plus ou moins importante à la pauvreté et aux risques. Comme le relève l’étude, « la part de seniors en perte d’autonomie est plus élevée en 2021 dans les départements ruraux [...] Néanmoins, ce sont certains départements du sud qui ont la population la plus âgée ».
Mais d’ici à 2052, « la hausse du nombre de personnes en perte d’autonomie serait plus forte sur le littoral atlantique, en Corse, en Ile-de-France sauf Paris, dans l’est de la région Auvergne-Rhône-Alpes et en Alsace ainsi que dans les Départements d’Outre-Mer. » Les migrations de populations à l’intérieur du pays pourront également accentuer ou diminuer ces évolutions.
Comment accompagner le vieillissement de la population ?
En 2021, « 30 % des seniors en perte d’autonomie vivaient en établissement, soit 600 000 personnes (62 % étaient en perte d’autonomie sévère) ». En fonction des départements, leur accompagnement variait, notamment en raison de différences de prise en charge (le maintien à domicile est plus ou moins développé en fonction des régions).
Mais l’augmentation des seniors en perte d’autonomie nécessitera des adaptations du modèle français : « Pour un taux d’accueil identique à âge et autonomie donnés, il faudrait accueillir un million de seniors en établissement au début des années 2050, dont 900 000 en perte d’autonomie et 100 000 autonomes. » Ce qui signifierait créer 56 % de places supplémentaires en établissement d’ici là.
Or, cette estimation intervient alors que le secteur connaît une crise sans précédent : en 2024, « 7 Ehpad publics sur 10 étaient en déficit, malgré des aides exceptionnelles et des taux d’occupation élevés (deux tiers des Ehpad qui présentent un taux d’occupation égal ou supérieur à 97 % sont en déficit) », selon la Fédération hospitalière de France. Cette crise du financement adossée aux besoins croissants liés au vieillissement de la population pose la question de la pérennité de ce modèle à moyen terme, mais aussi celle de sa capacité à investir. Un défi lancé à toute la société, mais aussi aux collectivités : pour mémoire, près de la moitié des Ehpad du pays sont publics (44 %, soit 3 300 établissements). Parmi eux, 823 sont communaux (gérés par un CCAS), 1 300 sont autonomes et 1 200 rattachés à un établissement public de santé.
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