Pannes d'ascenseurs : les députés se penchent sur les moyens permettant de réduire les délais de réparation
Par Franck Lemarc
Comment résorber le problème des pannes d’ascenseurs non réparées, qui peuvent rendre la vie impossible aux habitants des immeubles, en particulier les personnes âgées et les personnes en situation de handicap ? Les auteurs de la proposition de loi qui doit être débattue aujourd’hui à l’Assemblée nationale rappellent qu’un million et demi de pannes sont recensées en France chaque année, que certaines peuvent persister « jusqu’à 10 mois », durée « qui ne cesse d’augmenter ».
Il y a en France quelque 637 000 ascenseurs, dont 380 000 sont situés dans des logements (80 % en copropriété et 20 % dans les logements sociaux). Une trop grande partie de ce parc est vétuste – ce qui est la cause de 40 % des pannes – et les auteurs du texte dénoncent « les méthodes » des ascensoristes qui ne stockent pas suffisamment de pièces de rechange, pour des raisons d’économies, ce qui allonge d’autant les délais de réparation. Par ailleurs, toujours selon les députés socialistes, les ascensoristes tirent au maximum sur la corde pour améliorer la rentabilité des contrats, avec parfois « un seul technicien responsable de l’entretien de 180 cabines ».
Nouvelles obligations et lourdes amendes
Le texte proposé à l’Assemblée propose donc un certain nombre d’obligations nouvelles.
Premièrement, il dispose que les propriétaires de l’ascenseur ont un délai de deux jours ouvrables maximum pour prévenir la société de maintenance, sous peine d’astreinte. Ladite société de maintenance aurait, elle, deux jours ouvrés pour intervenir, sous peine d’une pénalité de 300 euros par jour de retard (ce montant a été diminué en commission, les auteurs du texte initial l’avaient fixé à 1 000 euros). Si la réparation ne peut être faite immédiatement, elle devrait l’être dans un délai maximal de huit jours ouvrés.
Par ailleurs, le texte propose d’imposer aux ascensoristes de « constituer et conserver un stock de pièces » suffisant pour faire face à la demande. Ce stock pourrait, éventuellement, être mutualisé entre plusieurs sociétés. Le non-respect de cette disposition donnerait lieu à une très forte amende, qui ne pourrait « être inférieure à 1 % du chiffre d’affaires mondial de la société », voire 3 % en cas de récidive. Cette amende, si la disposition est adoptée, pourrait s’avérer particulièrement dissuasive notamment pour les plus grands groupes : rappelons pour mémoire que le chiffre d’affaires du groupe Otis, par exemple, est de 14 milliards de dollars.
Autre obligation nouvelle prévue dans ce texte : l’obligation, pour les propriétaires de l’immeuble, de faire appel en cas de panne non résorbée au bout de deux jours à « une société tierce pour assurer le portage et l’accompagnement des occupants à mobilité réduite permettant d’assurer leur ravitaillement et l’accès aux soins ». Il s’agit là encore d’une modification du texte en commission : le texte initial demandait, non sans logique, que cette charge soit assumée aux frais de la société de maintenance.
En cas de carence de la société chargée du « portage », la commune pourrait se substituer à elle pour assurer le service « et recouvrer auprès de (la société) les frais engagés ».
Le texte propose également (ce qui est un ajout en commission ) la constitution d’un « répertoire national d’immatriculation » qui localiserait tous les ascenseurs en fonctionnement et permettrait de centraliser « la date de leur dernier contrôle technique ».
On notera que le gouvernement a déposé un amendement pour supprimer le dispositif d’amendes très lourdes en cas de non-respect de l’obligation de stocks par les sociétés de maintenance.
Les ascensoristes vent debout
Sans surprise, les professionnels du secteur, regroupés au sein de la Fédération des ascenseurs, ont exprimé leur total désaccord avec ce texte jugé « déconnecté de la réalité du terrain ». Sur la question des pannes, ils renvoient la balle à tous les autres acteurs en dehors d’eux : les propriétaires d’immeubles qui ne remplacent pas les machines, obligeant les professionnels à « réparer des ascenseurs des années 1970 avec les pièces disponibles en 2025 » ; les copropriétaires qui « ne payent pas leurs charges », notamment « dans les quartiers prioritaires » ; et une partie des usagers, qui « dégradent » les installations.
La Fédération estime qu’une telle loi, si elle était adoptée, entraînerait « mécaniquement une hausse considérable des coûts des contrats d'entretien », et que les amendes envisagées sont « absurdes » et « disproportionnées ». Des adjectifs qui seront peut-être difficilement entendables par cette femme âgée, montrée lors d’un récent reportage télévisé, contrainte depuis plus de six mois de monter 16 étages à pied pour rentrer chez elle.
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