Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 15 juin 2017
Outre-mer

Situation alarmante dans les prisons d'outre-mer

Si la situation dans les prisons en métropole n’est pas brillante (surpopulation carcérale, conditions de détention indignes, manque d’accès aux droits fondamentaux comme le droit à la santé ou l’accès au travail), elle est encore plus critique en outre-mer. Dans un avis publié au Journal officiel d’hier, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) dresse ainsi un « constat alarmant »  de la surpopulation pénale dans les 15 établissements des collectivités ou départements d’outre-mer. 5 204 personnes y étaient détenues pour un nombre total de 4 065 places, soit un taux de surpopulation moyen de 128 %. « De façon générale, la surpopulation pénale est saisissante et, à la différence de la métropole, touche les maisons d’arrêt et les établissements pour moyenne et longue peine à l’exception de La Réunion », écrit la CNCDH dans son avis. La Guyane et les Antilles sont les territoires les plus touchés par le phénomène. Le taux de surpopulation carcérale est respectivement de 174 % et de 150 % pour les deux établissements de Guadeloupe et de 127 % pour celui de la Martinique. Il est de 150 % pour le centre pénitentiaire de Guyane. En Nouvelle-Calédonie, dans le centre pénitentiaire de Nouméa (127 %), la surface disponible par personne varie entre 2,4 m2 quand les cellules (12 m2) sont occupées par cinq personnes et 2 m2 quand ce sont six personnes qui les occupent.
Mais c’est en Polynésie française où le record est (tristement) battu avec un taux de 230 % pour le centre pénitentiaire de Faa’a Nuutania. La situation devrait cependant s’améliorer avec l’ouverture le mois dernier d’un nouveau centre pénitentiaire prévu pour accueillir 200 condamnés détenus à Faa’a Nuutania.
Cette surpopulation s’explique en partie par le très faible nombre de personnes bénéficiant d’un aménagement de peine. « Les aménagements de peine sont beaucoup plus difficiles à mettre en place qu’en métropole », souligne la CNCDH. A cela plusieurs raisons : absence de toute délocalisation du centre national d’évaluation, manque de juges de l’application de peines, de moyens des services d’insertion et de probation (SPIP) et de structures publiques ou associatives d’accueil, d’insertion et de réinsertion. Sans oublier la mauvaise couverture téléphonique pouvant faire « radicalement obstacle à la surveillance électronique », souligne aussi l’avis.
« La promiscuité créée par la surpopulation carcérale est lourde de conséquences à tous égards et favorise les violences entre détenus ou entre détenus et surveillants », note la CNCDH qui indique que la Guyane et les Antilles sont les « territoires les plus touchés par cette problématique ». En Guadeloupe, un détenu sur deux posséderait une pique artisanale.
Si la surpopulation pénale est « le plus sérieux problème commun aux établissements pénitentiaires d’outre-mer, l’accès au travail et à la formation professionnelle le suit de près », constate également la commission. « La prison est un miroir grossissant des dysfonctionnements d’une société ; rien d’étonnant à ce que l’accès au travail et à la formation professionnelle pose des problèmes d’une acuité particulière dans les établissements pénitentiaires ultra-marins en raison de la situation économique et donc de l’emploi hors les murs de la prison », écrit-elle dans son avis. Les graves problèmes d’accès au travail ou à la formation constatés en métropole se trouvent ainsi décuplés en outre-mer.
En 2016, sur plus de 5 000 détenus, le nombre d’emplois équivalent temps plein en concession (détenus travaillant pour le compte d’entreprises privées ayant installé un atelier en prison) était de 56,8 et de 739 pour le service général (détenus participant à l’entretien et au fonctionnement de la prison).
Dans son avis, la CNCDH pointe enfin le problème posé par la décentralisation de la formation professionnelle. Un problème commun aux établissements pénitentiaires de métropole et d’outre-mer. « Dès lors que l’administration pénitentiaire est une compétence régalienne relevant de la République, les conseils régionaux de métropole et dans les outre-mer rechignent à s’investir dans la formation professionnelle des détenus », constate la commission.
C.N.
Télécharger l’avis sur la question pénitentiaire dans les outre-mer.

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