Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 10 février 2025
Outre-mer

Mayotte, Nouvelle-Calédonie : pour l'AMF, les communes doivent être au coeur du processus de reconstruction 

Mayotte et la Nouvelle-Calédonie, en 2024, ont toutes deux été ravagées, la première par le cyclone Chido, la seconde par les émeutes du printemps dernier. L'heure est à la reconstruction, et l'AMF, en association avec les associations locales de maires, pose un certain nombre de conditions.  

Par Franck Lemarc

De retour d’un déplacement de trois jours à Mayotte, le président de l’AMF, David Lisnard, a pu constater sur place les dégâts causés par le cyclone Chido et « recueillir les propositions des maires adressées aux pouvoirs publics », indique l’AMF dans un communiqué publié vendredi 7 février. 

Mayotte : procéder « enfin »  au recensement

Les difficultés de Mayotte n’ont pas été créées par le cyclone, mais celui-ci les a toutes « exacerbées », écrit l’AMF : qu’il s’agisse de l’accès à l’eau ou aux soins, de l’éducation, du traitement des déchets, de l’assainissement, le 101e département français était déjà extrêmement en retard sur le reste du territoire, mais se trouve aujourd’hui confronté à une situation où le cyclone a détruit l’essentiel des infrastructures. Si David Lisnard « salue le travail réalisé par l’État pour rétablir les infrastructures stratégiques », il relaye la « conviction profonde des maires de Mayotte »  que désormais, « la condition première du redressement (…) est la maîtrise de l’immigration, sans laquelle les efforts financiers consentis ne produiront pas d’effets sur l’amélioration des conditions de vie des habitants de Mayotte ». Pour l’AMF en effet, « toutes les politiques publiques essentielles à la vie quotidienne des habitants subissent les effets massifs, et sans équivalent sur le territoire national, d’un flux d’immigration incontrôlé et d’une sous-estimation de la population réelle qui sature les services publics ». L’AMF demande donc que « le recensement soit enfin effectué pour avoir une connaissance réelle de la démographie et pour ajuster les dotations des communes et intercommunalités en conséquence ». Les communes sont en effet « structurellement sous-dotées », commente David Lisnard, qui ajoute : « On ne peut pas mentir sur la démographie. Les maires la connaissent : ils la voient dans les rues, dans les logements, dans les besoins de scolarisation, dans la saturation des services de soins. » 

Au-delà de la question démographique, l’AMF demande que le gouvernement et le Parlement élaborent « une vraie loi de programmation »  budgétaire, avec « un calendrier et des objectifs précis à court et moyen terme », et que les dépenses faites par les collectivités pour réparer dans l’urgence fassent l’objet d’un « fonds d’aide spécial »  - ce qui à ce jour n’est pas prévu dans le projet de loi d’urgence pour Mayotte, qui va être débattu en commission mixte paritaire ce matin. 

L’association souhaite également que les élus soient « pleinement associés »  aux décisions sur l’avenir de Mayotte. 

L’AMF annonce qu’elle va mettre en place « un partenariat entre collectivités »  pour fournir aux communes et intercommunalités de Mayotte « les matériels nécessaires », en particulier les fournitures scolaires, ainsi qu’une « ingénierie technique, juridique et financière ». 

Nouvelle-Calédonie : garantir les emprunts des communes

Le même jour, l’association a publié un autre communiqué relatif à la situation en Nouvelle-Calédonie, co-signé par les deux associations locales de maires (Association française des maires de Nouvelle-Calédonie et Association des maires de Nouvelle-Calédonie). 

Le communiqué dresse le dramatique bilan des émeutes de mai et juin 2024, qui ont causé « presque un milliard d’euros »  de dégâts : 120 sociétés ont disparu, 25 000 salariés sont au chômage partiel, de nombreuses communes ont vu leurs bâtiments publics détruits. À Nouméa, 37 bâtiments publics sont « endommagés ou détruits »  (caisse des écoles, médiathèques, pôle de services publics) ; à Dumbéa, c’est « la station d’épuration, une partie de la mairie, une médiathèque, des écoles et des bureaux de police municipale »  qui ont été touchés. 

Dans ces circonstances, les associations d’élus estiment que « les communes sont les mieux placées pour relancer l’économie par l’investissement public ». Les innombrables travaux de réparation et de reconstruction qu’elles vont devoir engager pourraient « sauver entre 2 000 et 3 000 emplois dans le BTP ». À condition qu’elles en aient les moyens. 

En effet, les communes de Nouvelle-Calédonie dépendent de ce que leur verse le gouvernement local, qui était lui-même, à la fin de l’année 2024, proche de la banqueroute, et profondément dépendant des prêts d’urgence accordés par l’État. Pour engager des travaux nécessaires à la relance économique de l’île, les communes vont donc devoir  emprunter, et elles ne pourront le faire, au vu de la situation financière précaire, que si ces emprunts sont garantis par l’État. L’AMF demande donc à ce que l’État garantisse un montant de « 150 millions d’euros »  pour les emprunts des 33 communes de Nouvelle-Calédonie. 

Samedi, la ministre chargée du Budget, Amélie de Montachlin, a répondu favorablement à cette demande. Dans un discours prononcé en ouverture du Forum économique de Nouvelle-Calédonie, elle a en effet déclaré que le budget va permettre « de mobiliser la garantie de l'État pour des prêts AFD dans un enveloppe fixée à un milliard d'euros pour trois ans ». Et la ministre a conclu : « C’est un soutien massif, structurant, (qui) permettra de donner le temps aux autorités publiques locales pour conduire les réformes auxquelles vous aspirez et que vous estimez nécessaires pour la prospérité du territoire sur trois ans. » 

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