Obligations aux abords du domaine public ferroviaire : les règles changent
Par Franck Lemarc
À qui appartiennent les abords d’une voie de chemin de fer ? Sur quelle emprise le gestionnaire de la voie a-t-il des droits ? À qui revient la responsabilité d’élaguer les arbres en bordure de voie ? Toutes ces questions concrètes étaient, jusqu’à présent, réglées par une partie du Code des transports définie par la loi du 15 juillet… 1845. Rien de surprenant, donc, à ce que la loi d’orientation des mobilités (LOM) ait prévu, à l’article 169, que le gouvernement prenne par ordonnance « toute mesure ayant pour objet de compléter et moderniser les dispositions relatives à la conservation du domaine public ferroviaire, afin notamment de redéfinir les servitudes actuellement applicables, d'autoriser le gestionnaire d'infrastructures à imposer des prescriptions pour préserver la sécurité des installations ferroviaires et des propriétés riveraines, de renforcer certaines interdictions et de permettre au gestionnaire d'infrastructures d'intervenir en cas de défaillance des riverains ».
Domaine public ferroviaire
L’ordonnance a été présentée hier en Conseil des ministres et publiée dès ce matin au Journal officiel. Le rapport qui accompagne l’ordonnance souligne que les servitudes existant aujourd’hui dans le Code des transports « ne permettent pas, en raison de leur ancienneté, d’appréhender certaines problématiques auxquelles le domaine public ferroviaire est aujourd'hui confronté ». D’où la nécessité de dépoussiérer ce texte. L’ordonnance récrit donc tout le chapitre du Code des transports consacré à ce sujet (chapitre 1er du titre III du livre II de la deuxième partie du Code).
Premier changement : alors que les limites du domaine public ferroviaire étaient auparavant fixées de façon absolue (à une distance fixe des voies, du remblai, etc.), il est maintenant admis que « la fixation des limites du domaine public ferroviaire au droit des propriétés riveraines peut être effectuée, à la demande des propriétaires riverains ou du gestionnaire d'infrastructure, dans le cadre d'une procédure amiable ».
« L’alignement », c’est-à-dire la détermination de la délimitation du domaine public ferroviaire au droit des propriétés riveraines, peut être réalisé soit à la demande du gestionnaire d’infrastructure, soit à celle des propriétaires riverains. C’est en l’absence d’accord qu’une procédure amiable peut avoir lieu. Il revient ensuite au préfet de déterminer et de signifier aux parties la limite entre le domaine public ferroviaire et les propriétés riveraines, « après enquête publique ». « La publication d'un plan d'alignement transfère de plein droit la propriété du sol des propriétés non bâties, dans les limites qu'il détermine, au propriétaire du domaine public ferroviaire », avec versement d’une indemnité au propriétaire exproprié.
Règles diverses
L’ordonnance fixe de nouvelles règles, plus précises, sur plusieurs sujets. D’abord sur l’écoulement des eaux : « Tout déversement, écoulement ou rejet direct ou indirect, qu'il soit diffus ou non, d'eaux usées, d'eaux industrielles ou de toute autre substance, notamment polluante ou portant atteinte au domaine public ferroviaire, est interdit sur le domaine public ferroviaire. » Mais aussi, pour répondre à un problème récurrent, aux questions d’élagage : « Il est interdit d'avoir des arbres, branches, haies ou racines qui empiètent sur le domaine public ferroviaire, compromettent la sécurité des circulations ou gênent la visibilité de la signalisation ferroviaire. Leurs propriétaires sont tenus de les élaguer, de les tailler ou de les abattre afin de respecter cette interdiction. » En cas de constat d’une infraction à cette règle, l’élagage, la taille ou l’abattage peuvent être effectués par le gestionnaire d’infrastructure, mais aux frais du propriétaire du terrain sur lequel se trouvent les arbres ou haies gênantes.
En matière de construction, l’ordonnance prévoit qu’aucune autre construction qu’un « mur de clôture » ne peut être bâtie à proximité d’une voie ferrée, au-delà d’une distance qu’il reste à définir par décret. Idem pour les « terrassements, excavations ou fondations » : un décret va fixer la distance de la voie ferrée à partir de laquelle il sera interdit d’y procéder. Le décret fixe aussi la distance maximale pour « tout dépôt de quelque matière que ce soit ». Les personnes qui contreviennent à ces règles seront contraintes par le juge administratif à supprimer les constructions, excavations, dépôts, etc., « faits contrairement à ces dispositions ».
En cas de « construction, aménagement ou installation pérenne ou temporaire, y compris les installations de travaux routiers », à proximité d’une voie de chemin de fer ou d’un ouvrage d’art ferroviaire (là encore à une distance qui sera fixée par décret), il sera nécessaire de procéder à une « information préalable du gestionnaire d’infrastructure », et le préfet pourra imposer « des prescriptions à respecter pour préserver la sécurité de l’infrastructure ferroviaire ».
La plupart de ces dispositions entreront en vigueur au 1er janvier 2022.
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