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Édition du mercredi 18 décembre 2024
Numérique

Les actions de médiation numérique se mènent de plus en plus à l'échelle infra-départementale

La Mednum publie sa deuxième édition de l'Observatoire de l'inclusion numérique. Les collectivités territoriales restent les principales structures qui agissent en faveur de l'inclusion numérique. Ces politiques se déploient dans les communes au plus près des populations vulnérables.

Par Lucile Bonnin

Cette grande enquête réalisée par la MedNum (1), avec près de 400 contributions des acteurs engagés dans l’inclusion numérique, donne à voir comment les politiques d’inclusion numérique se déploient au sein des territoires.

« Alors que le numérique prend une place toujours plus importante dans notre société en général et dans nos vies en particulier, plus personne ne peut nier que chaque individu, indépendamment de son âge, de sa situation géographique ou de son niveau socio-économique, doit pouvoir accéder aux outils et aux compétences numériques, peut-on lire dans cette étude. Une variété grandissante d'acteurs se mobilise depuis plusieurs années pour répondre à cet enjeu »  et les stratégies d'intervention des acteurs évoluent pour toucher un plus grand nombre de personnes fragiles.

Des actions localisées en 2024 pour atteindre les publics isolés

« Le périmètre d’intervention des structures semble avoir évolué en deux ans » , observe la MedNum. Les répondants à cette enquête indiquent intervenir principalement à l’échelle locale, c’est-à-dire infra-départementale. 68 % déclarent intervenir dans des zones ciblées d’un département en 2024 contre 58 % en 2022. 24 % des acteurs interviennent à l’échelle départementale, 5 % à l’échelle régionale et 3 % à l'échelle nationale (3 %). D’ailleurs, les interventions régionales et nationales « ont largement diminué entre 2024 et 2022, où elles étaient de respectivement 9 % et 12 %. » 

La MedNum observe donc « un recentrage des efforts sur les mailles départementales et infra-départementales, répondant à des politiques publiques influencées par la concrétisation des feuilles de route France Numérique Ensemble (FNE) et orientées vers une action de proximité plus prononcée ». Les auteurs supposent aussi qu’il existe « une évolution dans les stratégies d'intervention des acteurs, cherchant à maximiser leur impact en s’investissant plus profondément sur des zones restreintes et ciblées. » 

Cette évolution se confirme aussi lorsqu’on observe les lieux accueillant les activités de médiation numérique qui sont à 19 % des locaux communaux, à 17 % des bibliothèques ou médiathèques et à 12 % des centres sociaux. 

Concernant les zones d’intervention, les répondants qui interviennent « en territoire rural sont en légère augmentation avec 66 % en 2024 contre 61 % en 2022, ce qui suggère un signal de l’effort à mener pour mieux répondre aux besoins des publics sur ces zones ». La MedNum souligne au passage que le « soutien des politiques publiques est essentiel pour favoriser ces actions, à travers notamment des dispositifs d’aller-vers » . De même, « la baisse significative des interventions en zone périurbaine, de 41 % à 29 %, pourrait s'expliquer par un recentrage des actions vers les territoires ruraux ou les petites villes, où les besoins sont jugés plus importants ».

Si l’étude ne quantifie pas précisément « les dispositifs d’aller-vers qui permettent d’atteindre les publics isolés et précaires en déplaçant les actions de médiation numérique au plus près des publics » , elle recense quelques initiatives comme les bus numériques itinérants, les ateliers délocalisés dans des lieux de vie comme les centres sociaux, les marchés ou encore les lieux d'accueil temporaire. Mais la prochaine étape, selon les acteurs sondés par la MedNum, sera de réussir à atteindre « les publics les plus éloignés du numérique qui ne formulent pas spontanément de besoin d’accompagnement ». « Par exemple, les structures d'insertion par l'activité économique interviennent directement sur les chantiers d'insertion ou au sein d’associations intermédiaires. » 

Besoins et accompagnement 

Selon l’Insee, en deux ans, l'illectronisme avait diminué en 2021 de manière plus prononcée pour les personnes les plus âgées (environ - 8 points pour les 75 ans et plus, et - 6 points pour les 60-74 ans), tandis que la baisse n’avait été que d’un point chez les 15-24 ans. 

La MedNum rappelle cependant que la fracture numérique persiste entre les plus et les moins aisés. « En 2021, à niveau de vie égal, les 20 % les plus modestes avaient 6,6 fois plus de risques d'être en situation d'illectronisme que les 20 % les plus aisés. » 

Il est aussi souligné que l’illectronisme n’est pas forcément une question d’âge. L’enquête révèle si 31 % de seniors sont accompagnés en 2024, 22 % de publics jeunes le sont aussi et 13 % d’enfants.

Selon l’observatoire, la maîtrise des outils numériques du quotidien est l’offre la plus proposée dans les territoires. « 94 % des structures répondantes indiquent proposer cette activité, dont la moitié sont des collectivités ». En 2024, 90 % des structures interrogées indiquent proposer des accompagnements individuels et 32 % des structures misent sur l’apprentissage en autonomie, en mettant simplement leur matériel à disposition comme dans les mairies par exemple. 

Enfin, concernant les professionnels de la médiation, sans qui ces politiques ne pourraient exister, 80 % des structures répondantes embauchent au moins un médiateur ou conseiller numérique dont 57 % ont recours au CDI. Cependant, la rémunération de ces derniers reste faible puisque la moyenne se situe à 1484 euros par mois. Face à ce constat, « il faut se donner les moyens de rendre ces métiers attractifs », souligne Thomas Bureau, responsable développement chez Familles Rurales.

Et les moyens dédiés à l’inclusion numérique sont régulièrement mis sur la sellette ces dernières années. « La fragilité financière des structures du secteur a été récemment illustrée par la fermeture de structures emblématiques, par ailleurs sociétaires de la Mednum, comme Hubikoop, Le Chaudron, POP Café et APTIC »  et cette « disparition d’acteurs de référence reste un signal préoccupant pour l’écosystème, mettant en lumière les difficultés à pérenniser les initiatives ». Plus récemment encore, dans le cadre des débats sur le plan de loi de finances 2025, les crédits consacrés aux conseillers numériques France services (CNFS) devaient faire l’objet d’une réduction drastique. Nul doute que les acteurs du numérique seront attentifs à cette ligne budgétaire lorsqu’un nouveau budget sera présenté l’année prochaine pour 2025. 

(1) La Mednum est une société coopérative d’intérêt collectif née en 2017 qui rassemble les acteurs de la médiation numérique sur tout le territoire, impulsée par le secrétariat d'État chargé du numérique. 

Notre interview sur le sujet de l'inclusion numérique pendant le Congrès des maires :

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