Conseillers numériques : pourquoi le dispositif « peine à démarrer »
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Trente conseillers numériques « réservés » dans l’Allier et dans les Landes, 35 en Haute-Vienne… Depuis le début de l’année, départements, État et les différents partenaires (Banque des territoires, Agence nationale de la cohésion des territoires) signent des conventions à foison pour déployer d’ici fin 2022 les 4 000 conseillers censés contribuer à la résorption de la fracture numérique en France. Cédric O, le secrétaire d’État chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques, table dès la fin de cet été sur la prise de fonctions de 1 000 conseillers dans des structures publiques (mairies, centres sociaux, France services, médiathèques) ou privées (entreprises de l’économie sociale et solidaire, associations).
Sur le papier, le dispositif, financé par le plan de relance à hauteur de 200 millions d’euros, est pertinent du point de vue des collectivités. « L’aide de 50 000 euros pour les communes et EPCI (40 000 euros pour les associations) qui embauchent un conseiller pour deux ans est une bonne mesure, observe pour Maire info Patrick Molinoz, maire de Venarey-Les Laumes (Côte-d’Or) et co-président de la commission numérique de l’AMF. Elle témoigne d’un début de prise de conscience par l’État des difficultés rencontrées par les Français avec les outils numériques et confirme que seule une approche de proximité peut être efficace. » Pour mémoire, selon l’Insee, une personne sur six n’utilise pas Internet et plus d’un usager sur trois manque de compétences numériques de base.
Une mise en œuvre « très poussive »
Le vice-président de l’AMF critique néanmoins la « mise en œuvre très poussive » du dispositif. « En novembre, le gouvernement annonçait qu’il fallait recruter ces conseillers de toute urgence, sous quelques semaines… Six mois après son lancement, le dispositif peine à démarrer concrètement », déplore l’élu bourguignon. « L’initiative reste insuffisante, regrette, par ailleurs, Patrick Molinoz. Deux ans ne suffiront pas à réduire la fracture des usages numériques ». Cédric O en convient lui-même : en début d’année au Sénat, il estimait nécessaire de « structurer le secteur de la médiation numérique ». Pour l’heure, si le salaire des conseillers numériques sera pris en charge à 100 % par l’État à hauteur du smic sur deux ans et à 70 % sur trois ans, la poursuite du dispositif n’est pas garantie.
« Un engagement financier important des communes »
Déployer des conseillers numériques n’est, enfin, pas une opération neutre pour les collectivités. « L’aide impose un engagement financier important des communes alors qu’elles sont affaiblies par la crise covid, la baisse des dotations de fonctionnement et la suppression de la taxe d’habitation ». Elle « ne couvre [de plus] que 50 à 60 % du coût réel pour les collectivités alors que la numérisation « à marche forcée » des services publics nationaux est à 100 % le fruit de la volonté de l’Etat et de ses opérateurs. »
Autre grief formulé par Patrick Molinoz : « Le gouvernement a ignoré les règles classiques (budgéter le poste, créer le poste, mettre en place une procédure de recrutement, rédiger et signer un contrat…) qui s’imposent aux communes. Il ne suffit pas de mettre un lien pour que l’embauche se réalise en quelques jours ». Et de conclure : « Il me semble donc urgent de simplifier les procédures et de sécuriser les communes qui s’engagent au lieu de les menacer d’une perte de l’aide faute de recrutement rapide. »
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