Nouvelle-Calédonie : le référendum sur l'indépendance maintenu au 12 décembre
Par Lucile Bonnin
Pour la troisième fois, les électeurs de Nouvelle-Calédonie doivent se prononcer sur la question suivante : « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? »
Par le passé, lors des deux premiers référendums, en 2018 et 2020, le "non" l'avait emporté d’abord avec 56,7 % puis 53,26 %. L'accord de Nouméa prévoyant l'organisation d'un troisième scrutin en cas de deux victoires successives du « non », un décret avait alors été pris par le gouvernement qui fixait la date du référendum au 12 décembre 2021.
Mais le contexte ayant évolué depuis, notamment avec la crise sanitaire qui touche particulièrement le territoire, certains électeurs souhaitent voir la date du scrutin reportée. Pour rappel, en 2020, la date du deuxième référendum d’autodétermination avait été reportée officiellement presque un mois plus tard. Cette fois-ci, le gouvernement maintient la date initialement prévue.
Une décision gouvernementale qui suscite la controverse
Le 20 octobre 2021, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) avait demandé le report de ce troisième référendum à septembre 2022 pour « des raisons sanitaires et sociales liées au Covid-19 ». Face au refus du gouvernement, les indépendantistes appellent à la « non-participation » et déclarent qu’ils ne respecteraient pas le résultat du scrutin.
« Cette décision inique relève de la provocation politique. Elle nous ramène à la case départ d'avant les accords de Matignon (1988) et de Nouméa (1998) et met à mal toute possibilité de dialogue sur l'avenir du pays », a déclaré dans un communiqué le Palika, une branche du parti indépendantiste FLNKS. Ce même groupe affirme également qu'il « saisira l'instance internationale de décolonisation de l'ONU pour dénoncer l'absurdité d'une consultation d'autodétermination sans le peuple colonisé ».
Cette même branche indépendantiste estime qu’en prenant en compte le contexte actuel de confinement en Nouvelle-Calédonie, « l'attitude de l'État va priver les Calédoniens d'une consultation qui devrait se dérouler avec au préalable une campagne électorale équitable », ce qui semble compliqué avec les mesures de restriction qui s’imposent aujourd’hui. « Le FLNKS s'inquiète des lendemains d'une consultation qui, si elle est contestée, n'apportera pas la sérénité nécessaire pour la poursuite de discussions consensuelles sur l'avenir institutionnel du pays. »
De l’autre côté de l’échiquier, ce choix est salué par les électeurs favorables au maintien de la Nouvelle-Calédonie dans le giron français. Dans un communiqué publié le 12 novembre, le groupe « Les Voix du non » remercie « l’État d’assumer ses responsabilités et ainsi d’offrir des perspectives d’avenir aux Calédoniens en nous donnant la possibilité de clôturer la période de l’Accord de Nouméa ».
Des enjeux plus complexes
Interrogé au micro d’Europe 1, Sébastien Lecornu, ministre des Outre-Mer, rappelle que « la non-participation est un droit en démocratie. Est-ce que je me réjouis de cette situation ? La réponse est non. Est-ce qu'il y aura un impact juridique ? La réponse est non. Dans notre droit, il n'y a pas de vote obligatoire, donc le fait de ne pas participer n'emportera pas de toute (façon) sur la sincérité juridique du vote ».
Le ministre insiste aussi sur l’objectivité de cette décision : « Ce n’est pas parce que l’une des deux parties demande un report d’une date qui a été fixée que l’on peut le faire. Ce n’est pas le choix d’un camp contre un autre. Si les loyalistes, ceux qui sont pour le maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la France, avaient demandé le report, il y aurait eu vote quand même ».
Toutefois, et ce malgré le boycott des indépendantistes, les implications politiques de ce scrutin seront particulièrement fortes dans ce contexte particulier. « Vous avez un corps électoral qui est pratiquement à 50/50, explique le ministre. Le 13 au matin vous aurez d’un côté 50% de la population, un peu plus un peu moins, qui dira « l’affaire n’est pas terminée, l’autodétermination doit prospérer », et vous aurez une autre partie de la population, loyaliste, militant pour la République, qui dira « trois fois de suite on a eu notre Non, désormais nous avons acquis notre droit à rester dans la République ». Pour l’Etat et le gouvernement, l’enjeu va être de trouver un chemin commun. »
Le ministre a également rappelé que des discussions auront lieu après cet ultime scrutin. Philippe Dunoyer, député de la Nouvelle-Calédonie insiste de son côté sur la place du dialogue en période post-référendum. « Plus que jamais, cette dernière consultation sous l’égide de l’accord de Nouméa nous oblige tous. Elle nous impose d’initier dès le lendemain des discussions afin de construire les bases d’un nouvel avenir en commun. Elle nous engage à transcender nos différences pour exalter ce qui nous rassemble et fait de nous une communauté unique. »
Le scrutin du 12 décembre 2021 sera par conséquent ouvert à 8 heures jusqu’à 18 heures. La question posée aux électeurs sera la même qu'en 2020.
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