Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 23 décembre 2016
Aménagement du territoire

Notre-Dame-des-Landes : Bernard Cazeneuve dit réfléchir à une évacuation « par étapes », mais rapide

À l’occasion de la séance de questions au gouvernement de mercredi dernier, à l’Assemblée nationale, le Premier ministre, Bernard Cazeneuve, a fait un point sur la situation à Notre-Dame-des-Landes.
Rappelons que depuis le référendum de juin dernier, qui a donné une large majorité aux partisans de l’aéroport, et la validation par la justice des arrêtés préfectoraux de lancement des travaux, le 14 novembre, rien ne s’est passé sur le terrain. Sauf que le gouvernement a évoqué un contentieux avec la Commission européenne (datant d’avril 2014) pour justifier ne pas avoir lancé l’évacuation de la ZAD, contrairement aux promesses faites par Manuel Valls en novembre. Il se dit beaucoup, depuis, que le gouvernement a fait le choix d’attendre les élections, et de laisser ensuite la prochaine majorité gérer ce dossier ultra-sensible.
C’est le député de la Mayenne Yannick Favennec qui a interpellé Bernard Cazeneuve à l’Assemblée mercredi, en affirmant qu’à très brève échéance, « le 18 janvier prochain », « la déclaration d’utilité publique du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes sera caduque et il ne sera donc plus possible de commencer le chantier ». Il a donc demandé au Premier ministre « quand »  le gouvernement comptait « agir sur ce dossier », c’est-à-dire procéder à l’évacuation de la ZAD.
La déclaration d’utilité publique (DUP), contrairement à ce qu’a affirmé le député, ne sera pas caduque « le 18 janvier prochain »  mais le 10 février 2018. Cette DUP a en effet été publiée, sous forme de décret, au Journal officiel du 10 février 2008, et elle dit en son article 3 : « Les expropriations nécessaires devront être réalisées dans un délai de dix ans à compter de la publication du présent décret. » 
En revanche – et c’est probablement ce à quoi faisait allusion Yannick Favennec – il y a bien des arrêtés d’expropriation qui ont été signés le 18 janvier 2012, et qui peuvent être contestables à partir du 18 janvier prochain. En effet, le Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dispose que si des biens expropriés « n’ont pas reçu la destination prévue »  cinq ans après l’ordonnance d’expropriation, « les anciens propriétaires peuvent en demander la rétrocession ». Rien d’impossible, donc, à ce que les quelques dizaines de propriétaires expropriés fassent valoir leur droit à rétrocession, les travaux n’ayant pas commencé.
Le Premier ministre n’a pas relevé cette erreur. Il a en revanche voulu se défendre de l’accusation d’inaction, et laissé entendre qu’une intervention pourrait avoir lieu avant la mi-janvier. « La question n’est pas de savoir si nous devons procéder à l’engagement des travaux et évacuer la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, elle est de savoir comment le faire le plus rapidement et le mieux possible, dans des conditions de maîtrise suffisantes dans un contexte particulier de menace terroriste élevée », a expliqué Bernard Cazeneuve. Il a rappelé que dans ce contexte sécuritaire tendu, les forces de l’ordre disponibles sont rares : « Sur les 103 unités de forces mobiles qui sont disponibles quotidiennement en France, près de 80 sont mobilisées dans la lutte antiterroriste », et réduire ces forces serait « totalement irresponsable ».
Concernant le contentieux avec l’Europe, qui avait pointé en 2014 l’absence d’évaluations suffisantes sur l’impact environnemental du projet, la situation serait en train d’évoluer, a indiqué le Premier ministre : la métropole Nantes-Saint-Nazaire vient en effet d’adopter, le 19 décembre, un avenant au SCoT intégrant une étude environnementale et tenant compte des recommandations de la Commission européenne. Ce nouveau SCoT a été « transmis à la Commission ».
Bernard Cazeneuve a donc indiqué qu’il avait demandé au ministre de l’Intérieur, Bruno Le Roux, de « définir les conditions d’une opération par étapes ». Une opération, a-t-il surtout ajouté à l’attention du député de la Mayenne, « qui permette de respecter le délai que vous avez rappelé ». Cela veut-il dire que le gouvernement envisage de démarrer l’évacuation avant le 18 janvier ? On le saura assez vite. Mais de toute façon, cela ne règlerait pas la question. Même si la ZAD était évacuée à temps, les biens expropriés n’auront pas pour autant « reçu leur destination »  d’ici au 18 janvier, et les anciens propriétaires resteront donc en droit de lancer une procédure en justice… ce qui bloquerait à nouveau en partie le processus.
L’imbroglio de ce dossier semble loin d’être dénoué.
F.L.

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