Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 7 mai 2018
Collectivités locales

Monnaies locales : la justice rejette en appel les paiements de Bayonne en eusko

La justice administrative a donné raison vendredi à l'Etat, qui contestait à la ville de Bayonne la capacité de régler certaines dépenses dans une monnaie locale basque créée en 2013, l'eusko, estimant qu'une commune ne pouvait payer dans une autre monnaie que nationale.
La préfecture des Pyrénées-Atlantiques avait fait appel d'une décision fin mars du juge des référés du tribunal administratif de Pau, qui avait refusé de suspendre une convention de la ville de Bayonne lui permettant d'effectuer des paiements en eusko. La Cour administrative d'appel de Bordeaux « a annulé cette ordonnance, et suspendu la convention », dans l'attente de l'examen sur le fond, qui prendra des mois, a-t-on indiqué auprès des parties.
La commune estime, de son côté, que la loi Hamon de 2014 reconnaît officiellement les monnaies locales et complémentaires telles que l'eusko et que la convention avec Euskal Moneta ne fait courir aucun risque de double comptabilité publique, la conversion en eusko n'intervenant que dans un second temps.
Pour cette raison, le maire de Bayonne, Jean-René Etchegaray, réfléchit à un éventuel pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat : « La position de Bayonne c'est d'aller jusqu'au bout. Il faut que le droit soit dit sur le sujet puisque nous ne partageons pas la position de l’Etat ».
La mairie de Bayonne a adhéré en 2016 à l'association Euskal Moneta, à l'origine de l'eusko, et avait voté en juillet un texte prévoyant d'accepter les paiements dans cette monnaie locale de la part d'usagers et « de participer à la redistribution de la monnaie locale à des tiers qui seraient volontaires ».
Créée en 2013, l'eusko est une monnaie complémentaire associative qui compte quelque 3 000 adhérents particuliers et 700 professionnels ou associations. Quelque 750 000 euskos (1 eusko = 1 euro) en circulation génèrent, via un fonds de réserve, des prêts finançant des projets liés à l'économie solidaire, l'environnement, la langue basque, l'agriculture ou le commerce de proximité.
Dans une tribune dans le quotidien Le Monde publié la semaine dernière, 34 élus locaux (maires, vice-présidents de métropoles, adjoints, conseillers régionaux, départementaux, communautaires, municipaux…) plaidaient pour que les collectivités locales puissent « pouvoir payer en monnaie complémentaire »  et que le gouvernement leur reconnaisse ce droit.
Devant le flou juridique existant, ils demandent à l’Etat de « clarifier la situation en reconnaissant explicitement le droit des collectivités d’utiliser des titres de paiement complémentaires pour payer les acteurs qui ont choisi d’adhérer au réseau monétaire local ». « C’est en intégrant pleinement les collectivités à leur circulation que nous pourrons démontrer le potentiel des monnaies locales complémentaires », font-ils valoir.
Les 34 élus locaux rappellent que ce circuit monétaire complémentaire « ne vise nullement à se substituer à l’euro mais précisément à le complémenter, en organisant une partie des échanges au profit des emplois locaux et en mieux valorisant les ressources locales ».
« Améliorer l’accès des PME à la commande publique, soutenir l’agriculture de proximité ou revitaliser les centres-villes sont des mesures qui vont dans le bon sens, encore faut-il que la richesse créée sur un territoire serve durablement à développer ce territoire même, au lieu de s’enfuir ailleurs comme c’est souvent le cas », avancent-ils indiquant que les élus locaux ont « besoin d’outils décentralisés, innovants et surtout à la portée du citoyen »  pour notamment vitaliser le tissu économique local.
A.W. (avec AFP)

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