Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 9 février 2023
Social

Lutte contre la pauvreté : les maires veulent plus qu'un nouveau « Pacte des solidarités »

Annoncé pour le début d'année, le « Pacte des solidarités » ne devrait être bouclé que fin avril. Le ministère continue la concertation avec les différents acteurs. Mercredi, c'était au tour des élus locaux d'être reçus. 

Par Emmanuelle Stroesser

Ce que l'on sait de ce pacte, c'est qu'il doit prendre le relais de la stratégie de lutte contre la pauvreté, mise en œuvre lors du précédent mandat. Plus précisément, il s'agit de la « prolonger, compléter et amplifier »  indiquait la Première ministre au ministre des Solidarités Christophe Combe en novembre 2022. Ce pacte va tourner autour de quatre axes, que la nouvelle déléguée interministérielle à la pauvreté, Cécile Tagliana, a détaillé aux élus : lutte contre les inégalités dès le plus jeune âge, accès à l'emploi pour tous, prévention de la bascule dans la très grande pauvreté, et « organisation solidaire de la transition écologique ». 

Des avancées insuffisantes

L'idée n'est donc pas de faire table rase de ce qui a déjà été mis en place (comme les petits déjeuners à l’école, la cantine à 1 euro, les points conseils budgets) mais « de faire le tri entre ce qui a marché et ce qui a moins bien marché, car visiblement la mise en place n'a pas donné toute satisfaction », résume Élisabeth Blanchet, maire de Chappes, bourg rural de l'Allier, qui représentait l'AMF lors de cette réunion. Sur le papier, les maires signent et adhèrent à beaucoup d'idées évoquées. « Mais nous avons besoin de dépasser le stade des incantations », poursuit l'élue, perplexe. Elle s'en est expliquée lors de la réunion de mercredi : « Nous comprenons la stratégie qui est d'aller vers un maillage fin et des synergies. Et nous adhérons bien sûr au besoin de coordination. Le problème, c’est l'équilibre du partenariat entre l’État et le bloc communal, avec des exigences de l’État mais sans moyens supplémentaires. » 

Or sur le terrain, les réponses restent morcelées, compliquées (avec « le secret professionnel derrière lequel certains s'abritent », « le renvoi de bureau en bureau », etc.). « Nous avons une déperdition phénoménale qui renforce l'impression de déclassement des personnes fragiles et vulnérables. Cette lassitude est telle que certains abandonnent. Certes, nous aidons avec le CCAS, nous avons mis en place la cantine à 1 euro, il y a le guichet unique départemental. Mais cela reste insuffisant. Au niveau local, on continue à tirer des bouts de ficelle. Or les freins des personnes sont multiples, des problèmes de logement, d'accès au numérique... » 

Expérimentations, pactes et alliances en chantiers

Le ministère souhaite lancer une nouvelle expérimentation, « territoires zéro non-recours »  pour aller plus loin dans l'accès aux droits. « Une idée intéressante », estime l'élue. 

Des nouveaux « pactes locaux de solidarité »  seront proposés sous convention avec l’État. Cela ne devrait concerner que les conseils départementaux, les métropoles et éventuellement quelques communes connaissant des difficultés sociales importantes. Un point qui fait réagir Élisabeth Blanchet, qui veut attirer l'attention sur les risques d'inégalité accrus entre territoires et notamment entre territoires ruraux. Et craint que « l’État se désengage de missions pour les redonner aux collectivités », sans que celles-ci soient davantage outillées, notamment en ressources humaines.

Il est également prévu que les « commissaires à la pauvreté »  animent des « alliances locales de lutte contre la pauvreté »  avec tous les acteurs, publics, associatifs, privés… « Ce sera une bonne occasion de connaître ces commissaires », ironise Élisabeth Blanchet. La maire espère surtout qu'un acteur déjà bien identifié, l'Éducation nationale, sera, lui, réellement impliqué dans ce pacte. Un point sur lequel elle a insisté auprès du ministre. Mais sans véritable réponse qui indiquerait un changement profond.  

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