Maire-info
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Édition du mercredi 22 mai 2024
Logement

Évacuation des squatteurs : le gouvernement détaille les nouvelles règles

Le gouvernement a diffusé le 16 mai une circulaire « relative à la procédure administrative d'évacuation forcée en cas de squat ». Ce texte détaille les nouvelles procédures issues de la loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite. 

Par Franck Lemarc

Les règles relatives à l’évacuation des squats ont été fixées dans la loi Dalo du 2007, puis complétées par la loi Asap (accélération et simplification de l’action publique) de 2020 et la loi du 27 juillet 2023 : le champ d’application de ces procédures a été « élargi »  et leur mise en œuvre a été « simplifiée », afin de ne pas laisser perdurer « des situations particulièrement précaires et inacceptables »,  expliquent les trois ministres signataires de cette circulaire (Intérieur, Justice et Logement).

Conditions cumulatives

La principale évolution apportée par la loi Dalo de 2007 avait été de permettre aux préfets (sous certaines conditions) d’exiger et de mettre en œuvre l’évacuation de squatteurs, alors qu’auparavant, une telle évacuation ne pouvait s’effectuer qu’après une décision de justice. Les textes successifs votés par la suite ont modifié et précisé cette procédure. 

L’évacuation par décision préfectorale ne peut se faire que sous deux conditions cumulatives : le local occupé doit être « un domicile ou un local d’habitation », et il faut prouver que l’introduction et le maintien dans les lieux  se sont faits « à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ».

La loi Dalo avait déjà fixé que la notion de « domicile »  ne suppose pas que le plaignant y habite effectivement : il suffit que le local « contienne des biens meubles lui appartenant ». La loi Asap a précisé que la procédure d’évacuation pouvait être mise en œuvre dans « une résidence secondaire ou occasionnelle ». La loi du 27 juillet 2023 a étendu le champ d’application de la procédure à « tout local à usage d’habitation », y compris les « logements vides, bien inclus dans une succession en cours, bien en cours de vente ou entre deux locations ». Seuls les locaux destinés à un autre usage que l’habitation (les hangars, par exemple) ne sont pas concernés. 

La circulaire précise également les notions de « manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ». Attention, la loi est précise : l’évacuation n’est possible qu’en cas d’introduction frauduleuse et de maintien dans les lieux, ces conditions étant cumulatives. Un maintien frauduleux dans les lieux sans introduction frauduleuse ne permet pas le déclenchement de la procédure (c’est le cas, par exemple, des locataires dont le bail a été résilié, qui ne sont pas introduits frauduleusement dans les locaux). 

Constat par le maire

Lorsque le local occupé est un domicile, la demande peut être formée par le propriétaire ou le locataire ou par « toute personne agissant dans l’intérêt et pour le compte »  de ceux-ci. Ce dernier cas permet par exemple d’agir au nom d’un parent hospitalisé en ehpad. 

En revanche, une telle procédure effectuée par un tiers n’est pas possible lorsque le local ne constitue pas un domicile. 

Trois conditions préalables doivent être remplies pour faire la demande d’évacuation. D’abord, une plainte doit obligatoirement avoir été déposée. Deuxièmement, il faut apporter la preuve que le local occupé est bien le domicile du demandeur ou de la personne pour laquelle il agit. Les services préfectoraux sont appelés, dans la circulaire, à ne pas faire preuve « d’un formalisme excessif »  en la matière, en tenant notamment compte du fait que les pièces à fournir peuvent être inaccessibles, si elles se trouvent dans le local occupé. Dans ce cas, les préfets ont la possibilité de saisir l’administration fiscale pour apporter les preuves nécessaires. 

Enfin, la troisième condition est le constat de l’occupation illicite, par « un officier de police judiciaire, un maire ou un commissaire de justice ». « Un tel constat peut notamment résulter des éléments recueillis par les officiers de police judiciaire dans le cadre de l’enquête pénale qui a fait suite à la plainte déposée par le demandeur, ou des éléments constatés en dehors de tout cadre d’enquête par le maire ou un commissaire de justice ». 

Délais et procédure

À compter de la réception de la demande, les préfets doivent agir vite : ils ont 48 h pour instruire la demande. Il faut également savoir que cette procédure spécifique n’est pas concernée par la trêve hivernale : il n’est donc pas sursis à l’évacuation pendant les mois d’hiver, contrairement aux expulsions de locataires obtenues par décision de justice. 

Il est en revanche obligatoire, pour le préfet, de « prendre en compte la situation personnelle et familiale de l’occupant », comme l’a exigé le Conseil constitutionnel (décision QPC 2023-1038).

Une fois la décision d’évacuation prise par le préfet, une mise en demeure doit être adressée aux occupants, mentionnant le délai d’exécution de l’évacuation des lieux : au minimum 24 heures quand le local constitue le domicile du plaignant, au minimum 7 jours lorsqu’il ne s’agit pas de son domicile. La mise en demeure doit être affichée « en mairie et sur les lieux ». 

Sauf circonstances exceptionnelles, l’évacuation doit avoir lieu « dès la fin du délai d’exécution fixé par la mise en demeure, sans délai complémentaire ». 

Enfin, il faut retenir que le préfet, à la suite de l’examen de « la situation personnelle et familiale »  des occupants,  peut être conduit à procéder au relogement de ceux-ci, notamment lorsqu’il s’agit de publics vulnérables, en particulier des mineurs. 

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