Jugée inutile par les oppositions, la résolution défendant « l'accès de tous au logement » a été adoptée à l'Assemblée nationale
Par A.W.
Afin de tenter d’enrayer la crise du logement à laquelle est confronté le pays, les députés ont soutenu, hier, une proposition de résolution (PPR), dans le cadre de la niche du groupe Démocrate (MoDem et indépendants), dont le but est d’« accentuer les efforts pour favoriser l’accès de tous au logement ».
Alors que le gouvernement ne désignera pas son ministre du Logement en titre avant la fin du mois, ce texte a été adopté grâce aux voix des députés du camp présidentiel (MoDem, Renaissance et Horizons), des groupes Liot et communiste. Les élus LFI ayant voté contre, tandis que le RN, les LR, le PS et les écologistes se sont abstenus.
« Choc de l’offre » et « choc décentralisateur »
Il y a une « nécessité absolue de rebâtir une politique du logement cohérente et efficace, pour que l’année 2024 soit celle du sursaut », a défendu, dans l'hémicycle, le député des Pyrénées-Atlantiques Jean-Paul Mattei (MoDem), à l’initiative de cette proposition de résolution qui doit permettre de dresser « une feuille de route pour les différents chantiers qui nous semblent prioritaires ».
Rappelant que « les prix des logements ont été multipliés par 2,4 en 25 ans et ceux des loyers ont été multipliés par 2,6 en 30 ans », que les taux d’emprunt des ménages ont explosé et que le secteur de la construction menace désormais de détruire « des milliers d’emplois », l’ancien maire de Ger a invité le gouvernement à « poursuivre un choc de l’offre » et à « prendre des initiatives fiscales », en remettant « complètement à plat la fiscalité du logement ».
Le texte propose également à l’exécutif de « réviser les règles d’urbanisme afin de laisser les collectivités en charge encourager la construction et la rénovation de logements » et de « soutenir la construction de logements sociaux […] en territorialisant certains critères » de la loi SRU.
Jean-Paul Mattei a, en outre, demandé de faire preuve d’une « nécessaire adaptation au changement climatique et à ses conséquences néfastes », ainsi qu’aux « évolutions qui traversent notre société ». La résolution appelle ainsi le gouvernement et les collectivités territoriales à « favoriser le parcours résidentiel intergénérationnel ».
« Nous ne devons plus simplement mener une réflexion en termes de quantité ou de qualité, mais penser une offre qui corresponde à chacune des étapes de nos parcours de vie et qui soit adaptée à nos territoires », a estimé l’élu MoDem, en réclamant « un choc décentralisateur, qui doit permettre aux collectivités d’adapter au mieux la politique du logement aux besoins locaux ».
« La question de la territorialisation recouvr[ant] d’ailleurs celle des logements vacants », le député des Pyrénées-Atlantiques a souhaité également voir apparaître « des évolutions législatives » pour permettre de mobiliser ce parc inoccupé, alors que leur nombre n’a cessé de croître ces vingt dernières années pour atteindre les 3,1 millions d’habitations vides.
Sur la question des sans-abri, « plus présente que jamais ces derniers jours avec le retour du froid », l’élu a enjoint le gouvernement à rendre les lieux d’accueil « plus pérennes, plus dignes et plus économes [...] pour enfin arrêter cette machine infernale qui consiste à loger les populations les plus en difficulté ou les migrants dans des hôtels, générant souvent des situations indignes ».
Passoires énergétiques : le DPE bientôt « amélioré »
« Bien loger les Français, mieux les loger, simplifier la politique du logement représentent des priorités de notre gouvernement pour les prochaines semaines », a de son côté fait savoir la nouvelle ministre déléguée chargée des Relations avec le Parlement, Marie Lebec, alors que les derniers exécutifs nommés par Emmanuel Macron sont souvent accusés de ne pas avoir pris la mesure de la crise du logement.
Alors que la proposition de résolution invite le gouvernement à « rester vigilant s’agissant des logements qui sortiront du marché au 1er janvier 2025 » dans le cadre de la politique de lutte contre les passoires thermiques, l'ancienne députée des Yvelines a annoncé que la méthode de calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE) serait « améliorée », « dans les prochains jours », s’agissant des petites surfaces afin d’obtenir « un dispositif fin et adapté aux réalités locales ». L’objectif est d’éviter « qu’à caractéristiques égales, un petit logement soit classé F ou G alors qu’un logement plus grand serait mieux classé ».
« Le ministre qui sera chargé du logement fera prochainement des annonces relatives à l’accompagnement des propriétaires de passoires thermiques qui louent leur logement », a-t-elle d'ailleurs indiqué, alors que cette proposition avait déjà été évoquée, de manière évasive, par le ministre de l'Économie, Bruno le Maire, à l’automne.
Une annonce qui arrive au moment où le Conseil d'analyse économique (CAE) - qui dépend de Matignon - vient de publier une étude sur la performance énergétique du logement pointant un écart béant entre le DPE et les données réelles des habitats. L'écart de consommation d'énergie au mètre carré entre un habitat mal classé et un bien classé serait ainsi six fois moins fort que celui prédit par le DPE.
« En décalage complet avec les besoins »
« Voilà donc la réponse du groupe Dem à la situation dramatique de l’accès au logement dans notre pays : une proposition de résolution », a ironisé le député des Pyrénées-Atlantiques Iñaki Echaniz (PS), la qualifiant de « communiqué de presse ».
« Le choix de ce format et son contenu sont en décalage complet avec les besoins. Nous n’avons pas besoin d’une déclaration d’intention, mais de mesures législatives concrètes et opérationnelles », a raillé celui qui est à l’origine d’une proposition de loi visant à réguler les meublés de tourisme, dont l’examen final en séance a été fixé au 29 janvier, tout en pointant les « 14 millions de personnes fragilisées » et « la détention de logements hyperconcentrée » avec « 3,5 % des ménages (qui) détiennent 50 % des logements mis en location par des particuliers ».
Un sentiment largement partagé par les élus écologistes (une résolution qui « s’apparente un peu à des vœux au Père Noël » ), RN (« une résolution qui égrène des considérants qui sont autant de constats d’échecs de la politique macroniste et de ceux qui la soutiennent » ) et LR (une résolution qui « relève davantage d’une manœuvre politique que d’une tentative véritable de résoudre les problèmes cruciaux » ).
« La bombe sociale du logement a déjà explosé, avec son lot de victimes. En une semaine, une femme et trois hommes sont morts gelés dans l’indifférence gouvernementale », a de son côté déploré la députée de Paris Sophia Chikirou (LFI) pour qui « ce n’est pas à une crise du logement que nous assistons [mais] le résultat des politiques menées ».
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