Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 25 septembre 2024
Logement

Crise du logement : fustigeant l'inaction de l'État, le monde HLM réclame des « mesures concrètes »

Face à la profonde crise immobilière qui frappe le pays, l'Union sociale pour l'habitat réclame au nouveau gouvernement la fin de la ponction de l'État sur les bailleurs sociaux, à l'occasion de son congrès qui se tient à Montpellier.

Par A.W à Montpellier

« Depuis des mois, nous réclamons le retour de la puissance publique pour éviter la crise. Depuis des mois, l’État se dérobe. Il constate la crise mais s’en arrête là. »  Particulièrement exaspérée, la présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH), Emmanuelle Cosse, a fait part, hier, de sa « colère », en ouverture de la 84e édition du congrès HLM, qui se déroule à Montpellier jusqu’à demain.

Alors que le pays traverse une crise majeure, elle a donc réclamé des « mesures concrètes »  et rapides.

Le « laisser-faire », une « doctrine de fainéants » 

Les attentes du secteur envers le gouvernement Barnier sont, en effet, considérables et l’ancienne ministre du Logement de François Hollande a, une nouvelle fois, pointé les « atermoiements institutionnels »  qui « pèsent déjà lourd sur les résultats 2024 et assombrissent les objectifs 2025 ».

Alors que « toute la chaîne du logement est en crise », « rien n’a été fait pour soutenir le secteur, bien au contraire », a-t-elle déploré, pointant « la réduction du PTZ, la suppression de l’APL accession, la hausse des coûts normatifs, l’envolée du prix des matériaux, sans compter cette scandaleuse mesure que reste la RLS… », une ponction de 1,3 milliard d’euros sur les recettes des bailleurs HLM. 

D’autant que le principal problème reste entier : la hausse des demandes de logements sociaux conjuguée à la baisse de la construction. Et la situation se dégrade encore avec désormais plus de 2,7 millions de demandeurs de logements sociaux, en hausse de 100 000 par rapport à la fin d’année 2023.

S'ajoute à cela le défi de la rénovation énergétique du parc social qui va entraîner des travaux d'ampleur particulièrement coûteux. Or les aides à la rénovation du parc social ont été « gelées »  cet été par le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal, alors qu’une enveloppe de 1,2 milliard d'euros sur trois ans, avait été promise par l'ancien ministre du Logement Patrice Vergriete… lors du congrès HLM de 2023. 

« Le laisser-faire est une doctrine de fainéants ou de grands privilégiés », a ainsi tancé Emmanuelle Cosse, en faisant clairement savoir qu’elle attendait au tournant, avec tous les acteurs du logement, la nouvelle ministre du Logement et de la Rénovation urbaine, Valérie Létard, qui a pris ses fonctions lundi et dont la venue est annoncée demain pour la séance de clôture du congrès.

Le logement est « au coeur des priorités »  de l’exécutif

Fait notable, toutefois, la nomination de l'ancienne vice-présidente centriste du Sénat au sein du gouvernement Barnier a été plutôt bien accueillie par les associations du secteur. « Valérie est une femme politique de grande qualité, experte du logement et de la rénovation urbaine », s’est notamment réjouie la présidente de l’USH, indiquant, toutefois, « ignorer encore ses marges de manœuvre ».

Le fait qu’elle soit à la tête d’un ministère de plein exercice a également été salué et perçu comme « un signe très fort »  après des années « d’invisibilisation du logement ». « On donne une force à la parole de Valérie Létard (qui) ne parlera pas en étant subordonnée à quelqu’un d’autre », s’est félicitée Emmanuelle Cosse.

Si ses premières déclarations de la nouvelle ministre n'ont pas donné d’indications sur sa feuille de route, celle-ci a voulu rassurer le secteur, lundi, lors de son discours de passation de pouvoir : « Il faut dire au monde du logement l'attention particulière qu'on (lui) porte », celle-ci assurant que « le Premier ministre considère que le logement est au coeur des priorités et des préoccupations ».

Et comme elle l’a reconnu elle-même, « si la crise du logement ne trouve pas d'aboutissement à court-terme, (...) nous aurons des difficultés à sortir de la crise ».

Fin de la RLS, dégel des crédits rénovation…

Pas de quoi rassurer les acteurs du logement social au regard des désaveux passés ainsi que des premières dissonances et tensions qui agitent, depuis hier, les membres de l’exécutif.

Dans ce contexte, ils mettent déjà la pression sur Valérie Létard en lui demandant d’agir rapidement et d’annoncer des « mesures concrètes »  dès le budget pour l’année 2025, afin de relancer la production et la rénovation de logements sociaux.

Tout le secteur s’accorde, toutefois, sur le fait qu’il n’y a pas de recette miracle. Il n'y aura pas de « solution unique », ont ainsi répété au fil des débats de la journée d’hier les différents acteurs présents au congrès. Si leurs remèdes divergent parfois, ils estiment tous que la solution ne pourra venir que de la mise en place d’une multitude de mesures.

De manière relativement unanime, ils réclament d’abord la fin de la réduction de loyer de solidarité (RLS), qui prive chaque année les bailleurs sociaux de recettes importantes, mais aussi le dégel de l'enveloppe dédiée à la rénovation. 

La baisse du taux du livret A est également « un enjeu vital », selon Emmanuel Cosse, quand d’autres préconisent la réduction des temps de procédures, le développement plus dynamique du bail réel solidaire (BRS), le retour d’une aide aux maires bâtisseurs ou encore de faire des métropoles des « autorités organisatrices du logement ».

Autre sujet défendu par les promoteurs cette fois : le prolongement du Pinel +, qui permet une réduction d'impôt sur le prix d'achat d'un logement mis en location, mais qui doit s’arrêter en fin d’année. « Il ne faut surtout pas le supprimer et le remettre dans son ancienne version pendant un, deux ou trois ans », a expliqué Pascal Boulanger, le président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), qui se félicite d'avoir d’ores et déjà été entendu par Valérie Létard. Elle « va monter au créneau »  pour défendre cette position, a-t-il assuré.

« Il faut défendre le logement social et la loi SRU n'a pas besoin de coups de boutoir », a répété, de son côté, le maire socialiste de Montpellier, Michaël Delafosse. À ses yeux, « la question du logement est centrale car c’est la dignité de la personne, c’est le pouvoir d’achat… Cette question traverse l’ensemble des pays européens. Et quand les gouvernements et les pouvoirs locaux ne la relèvent pas, ils sont balayés, souvent par des forces populistes ».

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2