Loi SRU : un rapport préconise de prolonger le dispositif et d'alourdir les sanctions
Prolonger la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain) en l’adaptant et en renforçant les sanctions en cas de non-respect. Des recommandations qui pourraient ne pas plaire à de nombreux maires. Il y a deux mois, la ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, a demandé au président de la Commission nationale SRU, Thierry Repentin, de faire des propositions pour relancer la politique de construction de logements sociaux inscrite dans la loi SRU dont l’échéance arrive en 2025. Adoptée en 2000, celle-ci impose aux principales communes françaises d'arriver d'ici cette date butoir à un taux de 20 ou 25 % de logements sociaux dans les villes de plus de 3 500 habitants (1 500 en Île-de-France).
Plus de 600 000 logements manquants
Or, explique le maire de Chambéry, en préambule de son rapport, « une majorité des communes soumises à ces obligations ne sera pas en capacité, à l’échéance de 2025 fixée par la loi, d’atteindre le taux légal de logements sociaux qui leur est applicable ».
Pourtant, selon lui, « son bilan est reconnu par tous comme un succès par le nombre de logements construits sous son impulsion », celle-ci ayant « incontestablement favorisé la mixité sociale dans des territoires qui en étaient dépourvus ». Si Thierry Repentin juge que la loi SRU a eu un rôle « accélérateur » de la production de logements sociaux, « il n’en demeure pas moins que les résultats obtenus demeurent hétérogènes sur le territoire, avec une commune sur deux en situation de non atteinte de ses objectifs légaux de production ».
Selon le rapport, « le nombre de logements sociaux manquants pour que les communes déficitaires remplissent leurs obligations légales s'élève à plus de 600 000 logements, dont 90 % concernent les communes soumises à l'objectif de 25 % ». Ainsi, seules 80 communes (8 %) atteindraient le taux légal à l’horizon 2025, selon un scénario de production « moyen », et 315 selon un scénario « haut » (32%). « Il faudrait 5 à 14 ans en moyenne aux communes soumises à 20 % et 11 à 30 ans en moyenne pour les communes soumises à 25 % », estime le rapport.
Prolonger la loi SRU
Dans ce contexte, écrit le président de la Commission nationale SRU, s’il apparaît « nécessaire » de préserver les effets vertueux du dispositif, « l’objectif de la période triennale 2023-2025 doit être adapté pour être rendu plus cohérent avec la réalité des territoires ».
Pour cela, deux scénarios - « glissant » ou « à échéance fixe » - sont proposés pour que les communes concernées puissent atteindre les objectifs de 20 % ou 25 % de construction de logements sociaux.
L’auteur du rapport suggère ainsi soit de mettre en place « un rythme de rattrapage de référence qui serait fixé à 33 % du nombre de logements sociaux locatifs manquant » et accompagné d’un mécanisme d’ajustement. Soit prolonger le système actuel en reportant la date butoir à une nouvelle échéance qui pourrait aller jusqu’à 2037, selon leur état d'avancement.
Alourdir les sanctions
Quel que soit le scénario retenu, le maire de Chambéry estime qu’il devrait s’accompagner d’une « contractualisation renforcée » et d’une « fermeté accrue ». Il préconise ainsi que « le recours aux contrats de mixité sociale (soit) systématisé, à la fois pour les communes carencées, mais également pour tous les communes déficitaires éprouvant des difficultés à atteindre leurs objectifs de rattrapage de logements sociaux ». Et que les EPCI soient « étroitement et systématiquement » associés « en étant signataire des contrats de mixité sociale aux côtés de l’Etat ».
Il réclame également des sanctions « plus systématiques et alourdies » en cas de résultats « très insuffisants ». « En contrepartie des adaptations significatives du rythme de rattrapage, la commission estime qu’il doit être répondu avec fermeté à la non-atteinte des objectifs, en particulier lorsque celle-ci ne résulte pas objectivement de facteurs sur lesquels la collectivité n’a pas de moyen d’action », assure-t-il en proposant notamment des sanctions avec des taux plancher qui pourraient être majorées en cas de récidive.
250 000 logements sociaux en deux ans
Une proposition reprise, vendredi dans Le Parisien, par la ministre du Logement qui estime qu’il « faut accepter de sanctionner les communes qui ne jouent pas le jeu », tout en se disant « prête à être pragmatique » avec les communes qui le jouent. Et si « aucune décision n'est bien sûr prise à ce stade », elle s’est réjouie que le rapport de Thierry Repentin ait « conclu sur un consensus en faveur d'une poursuite des efforts de construction des logements sociaux ».
Emmanuelle Wargon a par ailleurs souhaité, hier, lors d’un entretien à BFM TV, un objectif de 250 000 constructions de logements sociaux en deux ans pour « rattraper notre retard » (90 000 logements sociaux ont été construits en France l'an passé, soit « moins que les objectifs du gouvernement » ).
Ce « défi » sera financé « avec de l'argent de l'Etat » et, « avec l'accord des partenaires sociaux, nous allons mettre ensemble 1,5 milliard d'euros avec Action logement », a-t-elle précisé. Elle a également lancé un appel « aux organismes HLM pour qu'ils se remettent à construire » mais aussi aux « élus locaux » pour qu'ils délivrent des permis de construire.
Sur le millier de communes françaises soumises à des obligations de créations de HLM, environ la moitié n'avaient pas atteint leurs objectifs entre 2017 et 2019, estimait il y a une dizaine de jours le gouvernement. 280 d'entre elles étaient « carencées ».
A.W.
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