Les sénateurs redirigent 225 millions d'euros pour la rénovation des voiries, des ponts et des réseaux d'eau
Par A.W.
100 millions d’euros pour la rénovation des réseaux d’eau, autant pour la voirie locale ou encore 25 millions d’euros pour la sécurisation des ponts. Les sénateurs ont amendé, hier, le projet de loi de fin de gestion (PLFG) pour 2023, en première lecture, en réorientant des crédits vers les collectivités, contre l’avis du gouvernement.
Nouvel outil budgétaire, ce texte d’un nouveau genre qui permet des ajustements de crédits pour l'exercice en cours (mais aucune disposition fiscale nouvelle) a été adopté par 242 voix contre 18. Seul texte budgétaire n’étant pas frappé de l’article 49.3 cet automne, il doit désormais faire l’objet d’un accord entre députés et sénateurs lors d’une commission mixte paritaire dans la soirée, avant son adoption définitive par le Parlement.
Réduire les fuites du réseau d’eau
Opposé à la redirection des crédits vers les collectivités, le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave a jugé les montants « excessifs » ou estimé que les délais étaient « trop courts » pour les mettre en place avant la fin de l’exercice 2023.
Sous l’impulsion du rapporteur général de la commission des finances, Jean-François Husson, les sénateurs ont donc ouvert des crédits pour rénover le réseau d'eau et y réduire le taux de fuite, à hauteur de 100 millions d’euros
Alors que « les sécheresses de 2022 et 2023 ont endommagé les infrastructures du réseau d’eau » et que « les sécheresses deviendront de plus en plus fréquentes [avec] le changement climatique », Jean-François Husson a rappelé dans son amendement que « moins de 1 % des 878 000 kilomètres de canalisation d’eau est changé chaque année, ce qui conduit à un vieillissement du réseau d’eau français, qui est particulièrement préoccupant pour les communes rurales », d’autant que l’on « estime que chaque année, 20 % du volume d’eau potable distribué chez les usagers est perdu, ce qui représente 1 milliard de mètres cubes d’eau ».
Aide à la voirie locale : des besoins « toujours criants »
Le rapporteur général de la commission des finances a également redirigé 100 millions d'euros de crédits aux collectivités territoriales pour l'entretien des réseaux routiers qu'elles gèrent.
Alors que les 50 millions d’euros qui devaient être alloués en 2022 à l’entretien du réseau routier géré par les collectivités ont été finalement « réorientés » sur l'entretien du réseau routier national, Jean-François Husson estime, dans son amendement, que « les besoins des collectivités en la matière sont toujours criants » et qu’il est « plus que jamais nécessaire de leur apporter un soutien effectif ». Celui-ci faisant, au passage, part de son étonnement s’agissant « d’un gouvernement qui pense pouvoir s’exonérer de l’application de la loi ».
A noter également, s’agissant des transports, l’attribution de 70 millions d’euros pour la ligne de train Lyon-Nancy, suspendue depuis 2018 pour travaux, afin que « l’État puisse honorer son engagement financier et que la convention d’exploitation puisse être finalisée avant la fin de l’année ».
Réparer les ponts les plus dégradés
De la même manière, les ponts routiers des collectivités territoriales – qui représentent 90 % des ponts routiers en France - sont « dans un état préoccupant ». Une situation « exacerbée pour les ponts des plus petites communes », déplore le rapporteur général qui rappelle que « 23 % des ponts routiers du bloc communal seraient en mauvais état structurel ». Or, « bien souvent, les plus petites communes n’ont pas les moyens, non seulement de les entretenir et de les réparer mais également de mener les études et expertises nécessaires pour diagnostiquer leur état », explique-t-il.
Pour cette raison, il a décidé de proposer un abondement de 25 millions d'euros supplémentaires sur le programme « ponts » du gouvernement (pour le porter à 60 millions d’euros), dont l’enveloppe n’était pas jugée « à la hauteur des besoins des collectivités », afin d’accompagner les collectivités à réaliser les travaux de réparations de leurs ouvrages « les plus dégradés » et notamment « ceux présentant un enjeu majeur vis-à-vis de la sécurité des usagers et de la continuité des dessertes locales ». Ce nouveau programme national doit permettre de subventionner « jusqu’à 60 % des travaux de reconstruction, de réparation, de restauration, ainsi que les études techniques et réglementaires nécessaires à leur bonne réalisation ».
Deux aides exceptionnelles pour Mayotte
Le gouvernement a, en revanche, soutenu deux aides exceptionnelles débloquées à destination de Mayotte. La première, de 63 millions d’euros, doit aider à financer la distribution de bouteilles d’eau à la population mahoraise privée d'eau pour « répondre à l’urgence de ces dépenses liées à l’achat, à l’acheminement et à la distribution d’eau en bouteille, mais également à l’achat, l’acheminement d’autres matériels comme des congélateurs, des pastilles de potabilisation de l’eau, des camions pour faciliter la distribution des bouteilles ».
La seconde, de 50 millions d’euros, a été fléchée vers le Conseil départemental afin de faire face, en cette fin d’année 2023, à « d’importantes difficultés pour financer les besoins » en termes d’aide sociale à l’enfance, de protection maternelle et infantile, et de transport scolaire en soutenant notamment les associations et entreprises de l’économie sociale et solidaire.
30 millions d’euros pour les banques alimentaires
Le Sénat a également adopté l’ouverture d’une enveloppe de 30 millions d’euros supplémentaires en faveur de l’aide alimentaire (portant le soutien de l’État aux associations à 50 millions d’euros), en réponse à la situation difficile des réseaux associatifs et d’une situation de précarité alimentaire « inquiétante » dans le pays.
Les sénateurs constatent, notamment, que « le nombre de personnes demandant à bénéficier de l’aide alimentaire a considérablement augmenté en 2023 (+ 200 000 personnes) » et que « les associations sont prises en étau entre l’augmentation du nombre de bénéficiaires, la hausse des prix des denrées qu’elles distribuent et la baisse des dons ». Les Restos du Cœur sont notamment « particulièrement affaiblis » et, pour la première fois de son histoire, l’association doit refuser des demandes et se voit « même menacée de disparition en l’absence de mesures énergiques ».
Une enveloppe d’urgence de 20 millions d’euros a également été votée pour soutenir « le gouvernement arménien et les ONG qui œuvrent pour la prise en charge des réfugiés du Haut-Karabagh ».
Sur ce texte budgétaire, le gouvernement avait trouvé des compromis avec certains groupes d’opposition à l’Assemblée nationale, lui permettant un vote favorable sans passer par l’article 49.3 de la Constitution. Une allocation exceptionnelle de 115 à 200 euros pour les familles monoparentales précaires, complétant la prime de Noël 2023, avait ainsi été votée en accord avec le gouvernement (mais contre l’avis du ministre de l’Économie), pour une enveloppe estimée à 70 millions d’euros.
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