Édition du lundi 14 octobre 2002
Les avis négatifs du Conseil d'Etat sur le texte du gouvernement
Alors que le Conseil des ministres s'apprête, demain mercredi, à adopter le projet de loi de réforme constitutionnelle, Jean-Pierre Raffarin entend bien ne pas tenir compte de l'avis négatif du Conseil d'Etat sur le texte. C'est ce qu'il a dit à la presse, vendredi, juste avant une réunion sur la décentralisation avec les présidents de conseils régionaux et les préfets de région. "Le Conseil d'Etat est le Conseil d'Etat, ce n'est pas le conseil des collectivités locales", a déclaré le Premier ministre.
Il est vrai que l'avis de la haute juridiction administrative, pour être obligatoire, ne s'impose pour autant pas au gouvernement.
Le Conseil d'Etat ne fait que de prévenir d'éventuelles illégalités dans les textes qui lui sont soumis et seul le Parlement, puis le Conseil constitutionnel, ont barre sur la loi. Ainsi le gouvernement a-t-il toute latitude de ne tenir aucun compte de son point de vue.
Dans son avis, qui n'a pas été encore rendu public, le Conseil d'Etat suggère au gouvernement de supprimer plusieurs points clés de son projet de réforme.
Il souhaiterait tout d'abord la suppression de l'article 1er du texte qui entend inscrire dans l'article 1 de la Constitution - après "la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale" - que "son organisation est décentralisée", un élément déterminant du projet de loi gouvernemental. Il a estimé en effet que cette "organisation décentralisée" ne pouvait être mise sur le même plan que l'indivisibilité de la République ou que l'égalité devant la loi.
Dans un autre aspect du texte, le Conseil souhaiterait que soit ôté un alinéa de l'article 3 prévoyant que "les projets de loi ayant pour principal objet la libre administration des collectivités locales, leurs compétences ou leurs ressources sont soumis en premier lieu au Sénat". Pour la haute juridiction, l'Assemblée nationale, élue au suffrage universel direct, a une prééminence incontestable qui ne peut être remise en cause.
Le Conseil d'Etat critique également le principe de subsidiarité qu'entend, sans le citer formellement, introduire le gouvernement dans l'article 72 de la Constitution. Il préconise donc la suppression de l'article 4 du projet de loi qui dispose que les collectivités locales "ont vocation à exercer l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en uvre à l'échelle de leur ressort".
Le "droit à l'expérimentation" est lui aussi contesté par les "sages du Palais Royal" qui estiment que cette notion doit être précisée, afin que la Constitution dise explicitement que ce droit déroge au principe fondamental d'égalité.
Un autre avis négatif du Conseil d'Etat, enfin, concerne l'autonomie financière des collectivités. La juridiction propose de supprimer le passage du texte précisant que les recettes fiscales, les autres ressources propres des collectivités, et les dotations quelles reçoivent dautres collectivités territoriales devront représenter «une part déterminante» de leur budget. Le projet du gouvernement précise aussi, clairement, que «tout transfert de compétence entre lEtat et les collectivités territoriales saccompagne de lattribution des ressources équivalentes à celles qui leur étaient consacrées». Ainsi, les inégalités de ressources entre collectivités seraient corrigées «notamment» par la «péréquation» financière. Ce que n'a pas contesté le Conseil d'Etat.c=http:/
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