Le Sénat veut réhabiliter l'école rurale
Les sénateurs Laurent Lafon (Val-de-Marne) et Jean-Yves Roux (Alpes-de-Haute-Provence) ont rendu le 18 octobre leur rapport concernant l’école rurale. Leurs 15 recommandations ont été adoptées par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, à l’origine de leur mission, lancée au printemps dernier. L’enjeu, rappellent-ils à Maire info, était de cerner ce qui ne fonctionnait plus autour de l’école entre les élus locaux et l’Éducation nationale et de « renforcer l’efficacité de la politique éducative ». L’examen du projet de loi pour une école de la confiance avait révélé « des tensions de plus en plus lourdes », et « des décisions souvent brutales et non comprises de fermetures de classes ou d’écoles », résume Laurent Lafon.
Cela s’explique selon eux par le fait que la « dimension territoriale de l’enseignement scolaire » ne prend pas assez en compte les spécificités de l’école rurale. Pour plusieurs raisons. Notamment, l’absence de données. « Il n’y a pas eu d’études et statistiques sur la ruralité depuis1995. L’école rurale est noyée nationalement au nom de l’égalité de traitement. Sauf qu’il y a des difficultés dans les territoires ruraux qui ne sont pas prises en compte », explique Jean-Yves Roux. L’échec récent du plan Mercredi dans les territoires ruraux n’en serait qu’une illustration. Les sénateurs proposent la création d’un observatoire pour y remédier.
Changement de méthode
Pour eux, ce qui presse avant tout, c’est « un changement de méthode ». Cela passe par trois changements plus exactement. Le premier serait de « prendre en compte les spécificités territoriales ». Deuxièmement, il faudrait laisser aux recteurs et aux Dasen (directeurs académiques de l’Éducation nationale) « plus de moyens et de marges de manoeuvre dans l’affectation des postes, des régimes indemnitaires ». De telle sorte « qu’en consultation avec les acteurs locaux, ils puissent agir là où sont les besoins » et les difficultés (comme celles de recrutement de professeurs). Les sénateurs imaginent pour cela de nouveaux outils, par exemple des indices d’éloignement géographiques.
Enfin, troisième étape à franchir, il faudrait développer « la contractualisation ». À l’exemple de ce qui se fait depuis quelques années avec les conventions ruralité signées entre les élus locaux et les représentants départementaux de l’Éducation nationale. « Elles peuvent aider à anticiper les mouvements de population, les besoins qui en découlent, à être plus précis sur les besoins de recrutement », énumère Laurent Lafon. Ou encore « laisser les acteurs de terrain innover et expérimenter », ajoute Jean-Yves Roux.
Avec un impératif : il ne s’agit en aucun cas de rendre ces conventions obligatoires, assurent-ils. Préférant laisser là encore « le territoire » décider ce qui lui convient le mieux. D’autant que « les collectivités financent à un tiers les dépenses éducatives » relèvent au passage les deux sénateurs.
In fine, il s’agirait ni plus ni moins que de reproduire ce qui existe pour l’éducation prioritaire, aujourd’hui concentrée sur les villes. « Nous ne remettons pas en question les REP, mais nous demandons que sur le reste du territoire national, il y ait une appréciation différente ». Et de rappeler ce chiffre, mis en relief dans leur rapport, que « 70% des enfants socialement défavorisés ne sont pas scolarisés en REP ». « Ce qui signifie qu’une vision trop fragmentée ne répond pas à un ensemble de problématiques », reprend Jean-Yves Roux.
Leur rapport doit être prochainement remis au ministre de l’Éducation nationale. Les deux sénateurs n’écartent pas l’idée de traduire certaines de leurs recommandations sous forme de propositions législatives.
E.S.
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