Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 10 juillet 2023
Décentralisation

Le Sénat formule 15 propositions pour redonner aux élus locaux leur « pouvoir d'agir »

Lancé par le président du Sénat en octobre 2022, le groupe de travail sur la décentralisation a présenté 15 propositions visant à rendre aux élus locaux leur « pouvoir d'agir », avec pour fil rouge la simplification.

Par Lucile Bonnin

Jeudi dernier, le groupe de travail du Sénat sur la décentralisation a rendu publiques ses propositions à travers la publication d’un rapport adopté à l’unanimité. Le groupe de travail a formulé 15 propositions concrètes, « simples et efficaces »  pour redonner aux élus locaux le « pouvoir d’agir » , qui s'articulent en sept axes.

Le constat tiré est sans appel : « Les collectivités territoriales et leurs élus ont aujourd’hui réellement perdu leur pouvoir d’agir », comme le fait remarquer François-Noël Buffet, rapporteur général du groupe de travail. Trois obstacles ont été identifiés pour les élus locaux : « le carcan normatif qui étouffe au quotidien l’action des élus et singulièrement les maires »  ; « le système de financement des collectivités territoriales dans son ensemble (qui) est à bout de souffle »  et enfin le fait que « les collectivités territoriales n’ont plus à l’égard de l’État ou de la part de l’État »  le partenariat « qu’elles ont connu autrefois ». 

C’est en partant de ces conclusions, et dans la continuité des travaux sénatoriaux qui ont été réalisés pour que les collectivités territoriales disposent d’une vraie liberté d’administration et « pour simplifier l’action locale afin de mieux servir les citoyens », que des mesures pouvant être mises en place rapidement ont été présentées par les sénateurs. 

Pouvoir agir sur des thématiques prioritaires 

La première proposition concerne le pouvoir d’agir et la capacité d’initiative des élus. Le rapport insiste sur l’importance de ménager « des marges de manœuvres locales sur des champs d’action où seules l’hyper-proximité et l’adaptation aux réalités territoriales sont garantes de l’efficacité des politiques publiques ».

Ainsi, les auteurs du rapport identifient plusieurs thématiques prioritaires pour lesquelles l’élu de proximité devrait pouvoir agir directement. Le logement et l’urbanisme sont en quelque sorte le nerf de la guerre pour l’action locale. C’est pourquoi le rapport propose de « mieux prendre en compte, dès le lancement des constructions de logements, les conséquences budgétaires et fiscales pour les communes de l’arrivée de nouveaux habitants »  et ainsi de soutenir les maires bâtisseurs.

Autre proposition importante concernant la réglementation des meublés touristiques (Airbnb) : octroyer aux communes la faculté d’abaisser le plafond actuel de 120 nuitées par année civile de location des résidences principales. « À Saint-Malo les 120 nuits c’est beaucoup trop, et en même temps on a dans le centre de la France des territoires ruraux qui ont un patrimoine extraordinaire et qui sont en train de signer un partenariat avec Airbnb pour permettre d’accueillir des touristes et renforcer les commerces, explique Françoise Gatel, présidente de la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Pour eux, 120 nuit ou plus serait alors une excellente réponse. » 

Sur l’urbanisme, plusieurs propositions ont été formulées : redonner des marges d’appréciation locales pour les constructions dispensées de formalités ; simplifier les décisions d’implantation en matière d’urbanisme commercial ; permettre aux communes ou intercommunalités compétentes de repousser le calendrier imposé de restriction de circulation de tout véhicule en fonction des vignettes Crit’air ou encore redonner des marges de manœuvre aux maires dans la définition des outils consultatifs, en particulier la commission consultative des services publics locaux (CCSPL). 

Repenser la relation avec l’État 

« L’État est parfois un contremaître mais il doit se détendre et doit surtout être en accompagnement des collectivités, pointe Françoise Gatel. Aujourd’hui un maire ne peut plus supporter, quand il a un projet d’aménagement, d’aller frapper à toutes les portes et qu’à chaque fois on lui donne des réponses qui se contredisent. Tout cela l’empêche de faire ». 

Le groupe de travail insiste dans son rapport sur le fait que l’État déconcentré doive s’adapter aux réalités du territoire. Il propose de « faire du préfet de département un interlocuteur unique en réduisant le nombre d’agences de l’État »  et de « mettre fin à la logique d’appel à projets au profit d’un accompagnement sur mesure ». Autre proposition : « Sécuriser les décisions des élus locaux en développant les rescrits, pour préférer le conseil au contrôle ».

Aussi, face à la vague de démissions des maires et aux agressions dont ils sont victimes de manière croissante ces dernière années, la groupe de travail insiste sur la nécessité de « consacrer un véritable statut de l’élu adapté à la diversité des profils et plus protecteur » . En effet, « les conditions d’exercice des mandats locaux et les dispositifs de protection des élus doivent être améliorés, tant pour faciliter l’exercice des mandats locaux afin de permettre à une diversité de profils d’y participer que de mieux protéger les élus dans l’exercice de leur mandat ».

Revoir le système de financement 

Le rapport plaide aussi pour « une réforme globale des finances publiques locales à moyen/long terme » . Cette réforme passerait par trois mesures : renforcer l’autonomie fiscale, essentielle au lien citoyen/territoire ; attribuer les recettes en cohérence avec les compétences et les charges et enfin réformer la dotation globale de fonctionnement (DGF) et les dispositifs de péréquation. 

Le but est avant tout de « redonner aux collectivités territoriales une réelle maîtrise de leurs finances ». Le Sénat explique qu’il est primordial de redonner des marges de manœuvre fiscales aux élus locaux. « Concrètement, un maire doit pouvoir être en mesure, dans le cadre d’une politique de lutte contre la sous-occupation des logements, d’augmenter dans une certaine limite le taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires sans être contraint d’accroître la pression fiscale sur l’ensemble des redevables de la taxe foncière sur les propriétés bâties » , peut-on lire dans le rapport. 
 

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