Le secteur de la restauration collective concédée en difficulté
11 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 200 000 salariés… le secteur de la restauration collective concédée est un poids lourd de l’économie. Mais le secteur connaît de grandes difficultés depuis 2010, et la crise a fait chuter son chiffre d’affaires.
Pression sur les prix dans les collectivités
Globalement, le secteur de la restauration collective représente 25 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an. Plus de la moitié de cette activité (14 milliards d’euros) est exercée en gestion directe (notamment en régie dans les collectivités) ; le reste est concédé à un prestataire privé – dans 70 % des cas, à l’un des trois géants mondiaux du secteur, Elior, Compass ou Sodexo.
Le secteur est en difficulté depuis de nombreuses années : la crise financière de 2008 a engendré un fort recul de l’emploi salarié dans le privé et des fermetures de sites, ce qui a représenté autant de marchés en moins pour les entreprises de restauration. Elle a également provoqué un recul du pouvoir d’achat, qui a influé sur le montant du « ticket moyen » dépensé dans les restaurants d’entreprise.
L’Insee note que le secteur concédé n’occupe qu’une faible part de la restauration scolaire, « très largement dominé par la gestion directe, notamment dans le primaire ». Quant aux collectivités qui ont fait le choix de la concession pour le scolaire, elles exercent « une pression sur les prix » qui « pénalise » les entreprises du secteur : les prix n’augmentent que de 0,4 % par an depuis 2015 dans la restauration scolaire concédée, soit « trois fois moins que dans la restauration commerciale ».
Seul le secteur de la restauration collective dans la santé est en forte augmentation, « du fait de l’essor des maisons de retraites et des Ehpad ».
S’il existe 484 entreprises spécialisées dans la restauration collective, 70 % de l’activité est phagocyté par trois groupes. Mais, note l’Insee, « leur hégémonie est en repli, du fait de l’offensive de plus petits opérateurs sur le terrain de la différenciation et de la proximité, qui valorisent notamment le bio et le local ». Les trois géants du secteur ont perdu 12 points de part de marché entre 2010 et 2018.
Portrait économique du secteur
Le chiffre d’affaires du secteur provient pour les trois quarts de la restauration collective elle-même (préparation des repas et gestion des cantines). Le dernier quart provient d’activités annexes (gestions de cafétérias, plats livrés à domicile, traiteurs, restauration rapide).
200 000 personnes travaillent pour ce secteur, mais elles ne représentent que 110 000 équivalents temps plein. Le temps partiel est donc très fréquent, notamment chez les femmes – 42 % d’entre elles sont à temps partiel dans ce secteur, contre 11 % des hommes. L’activité est peu qualifiée, avec 74 % d’ouvriers et employés et seulement 6 % de cadres. Les postes les moins qualifiés sont occupés à 70 % par des femmes. Les salaires sont assez bas, davantage pour les femmes que pour les hommes – ceux-ci sont payés 10 % de plus y compris à profession et durée de travail identiques.
L’Insee signale que les taux de marge du secteur sont en baisse constante depuis dix ans – ils sont passés de 13 % en 2010 à 7 % en 2018. Malgré tout, le taux de rentabilité de la restauration collective concédée reste « très élevé », nettement supérieur à celui de la restauration classique. Les taux d’investissements y sont « faibles » et le mode de règlement (« paiement des fournisseurs à terme, mais perception immédiate ou rapide du prix des repas » ) est favorable à la rentabilité.
Impact de la crise sanitaire
Les premiers chiffres relatifs à l’année 2020 montrent que la restauration collective a durement souffert de la crise épidémique, mais dans une mesure moindre que la restauration dite commerciale (restaurants classiques) : en effet, les restaurants d’entreprise n’ont jamais été fermés lors des différents confinements, contrairement aux restaurants classiques. Résultat : en mai 2020, la restauration collective a connu une perte de chiffre d’affaires de 40 % par rapport à janvier, contre 74 % pour les restaurants. La baisse de fréquentation des restaurants collectifs s’explique par la fermeture des écoles, de nombreuses entreprises pendant le premier confinement, et le développement du télétravail.
À la fin du premier confinement, la restauration collective a moins bénéficié de l’effet de rebond que les restaurants classiques. « Les restaurants d’entreprises ont continué à être affectés par le maintien du télétravail, les règles de distanciation qui limitent le nombre de convives présents simultanément à table et les craintes de contamination. De nombreux salariés présents sur site apportent ou se font livrer leurs repas. » Le récent décret autorisant les salariés à manger dans leur bureau ne va, naturellement, pas arranger les choses.
L’Insee note cependant que le deuxième confinement, en novembre, n’a eu que peu d’impact sur l’activité de la restauration collective, les écoles et les entreprises étant restées ouvertes.
F.L.
Télécharger l’étude de l’Insee.
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